Bienvenue !

Vous avez des choses à dire...
Vous vous posez des questions, pour donner un sens à votre vie...
Vous cherchez un espace d'échange convivial pour exprimer ce que vous ressentez...
Vous attendez des réponses à vos questions...


...Alors, en réponse à vos attentes, Olivier Gaignet vous propose de vous exprimer librement.
Ici, tout pourra être dit dans les limites de la courtoisie et du respect mutuel.

Merci d'avance de votre participation.


Depuis novembre 2007, Olivier Gaignet partage sur son blog ses réflexions sur Dieu et sur l’Eglise. bien sûr,
mais aussi sur la marche du monde. Il nous invite à réfléchir à des thèmes aussi essentiels que : notre société, les autres religions,
la télé, la politique, l’art, sans oublier ses propres paroissiens.
Les billets des cinq premières années (de novembre 2007 à septembre 2012 )ne figurent plus sur ce blog. Pour les consulter, se référer aux cinq volumes intitulés: "Ma paroisse.com", que vous pouvez vous procurer en envoyant un mail à : olivier.gaignet@yahoo.fr



lundi 30 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2517 : La persécution, en France ? Vous voulez rire !

Les catholiques sont-ils persécutés en France en 2020  ?

 Il y a un gros mot que j'ai entendu à diverses reprises en ce mois de novembre, c'est celui de "persécution". 2 ou 3 exemples seulement : ces personnes de Chambéry déclarant, le 14 novembre : "Ne pas avoir le droit d'aller à la messe, c'est une persécution."  Ou encore, ces paroissiens interviewés par le journal "La Croix" du 26 novembre : Les catholiques n'ont pas vocation à se laisser persécuter." Je repensais chaque fois à la fameuse réplique d'Albert Camus : "Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde."  Scandale aussi que cet homme criant face à la caméra, devant les portes fermées d'une église : "J'ai faim !" Je comprends sa faim de l'eucharistie, et sa douleur d'en être privé ; mais cependant, ce cri n'était-il pas un peu déplacé ?  Ou encore cette photo parue dans le journal "M" du "Monde" du 21 novembre, montrant un homme à genoux sur les pavés, devant une église de Nantes, en train de se confesser à un prêtre en soutane. Cette exhibition, ce sentiment de persécution, tout cela est-il bien évangélique ?

A propos de persécution, soit dit en passant, il vaut mieux être blanc, catholique, que noir, musulman, en France ; en effet, l'on risque moins de se faire persécuter, insulter ou tabasser. Si je réagis ainsi, par rapport au terme de "persécution", et, depuis quelques semaines, vis-à-vis de ce sentiment d'incompréhension qui semble tétaniser un certain nombre d'évêques de France ainsi que pas mal de catholiques, c'est que j'ai aussi à l'esprit ce que c'est qu'une vraie persécution. Je vous raconterai peut-être un jour comment un jeune catéchiste de ma paroisse, au Mali, a été empoisonné en haine de la foi ; non par des musulmans, je crois important de le souligner, mais par des adeptes de la religion traditionnelle locale.

Une autre raison est d'ordre familial. Je suis profondément marqué, depuis ma jeunesse, par le fait qu'un de mes cousins, l'abbé Jean-Baptiste-René Gaignet, a été fusillé au nom de sa foi, sous la Révolution, son corps ayant été jeté ensuite dans une fosse commune. Je vous relate brièvement cette histoire, une vraie persécution celle-là. 

L'exemple de Jean-Baptiste-René Gaignet, assassiné par la République à 34 ans

Jean-Baptiste-René est né au Gué de Velluire, en 1761. Je ne vais pas vous barber en vous racontant toute sa vie. Ordonné prêtre en 1785, il fut nommé vicaire à l'île de Ré, puis, envoyé en poste à Doix, près de Fontenay-le-Comte, dans le sud-Vendée. Mais il prit position publiquement contre les décisions visant à supprimer la liberté religieuse et fit partie des nombreux prêtres "non-jureurs" qui ont refusé le serment à la constitution civile du clergé ; il fut alors expulsé de Doix, condamné à l'exil, conduit aux Sables d'Olonne pour y prendre un bateau à direction de l'Espagne. Petite anecdote : à ceux qui l'avaient condamné, il répondit : "Vade retro, satana" ; la même réponse que fit l'abbé Jacques Hamel face à son assassin : "Retire-toi, satan."

Une fois débarqué à Bilbao, il se reprocha sa fuite et pris le bateau pour l'Angleterre, d'où il espérait pouvoir regagner la France afin d'y assurer un ministère, clandestinement. Le 16 juin 1795, il trouva enfin le moyen de rentrer ; le 27 juin, il débarqua à Carnac, avec 10 autres prêtres et un évêque. Malheureusement, ils furent presque aussitôt faits prisonniers.  Jean-Baptiste-René arriva à s'échapper ; bon nageur, il regagna le bateau qui se trouvait encore au large. Mais, pris de remords, et ne voulant pas séparer son sort de celui de ses compagnons, il revint vers eux et se constitua prisonnier (!!!)

Les prêtres n'avaient pas d'armes, bien sûr, et avaient débarqué en soutane. Le 27 juillet 1795, ils furent condamnés à mort ; je possède d'ailleurs le texte du "jugement", qui commence par les quatre mots suivants : "Liberté, Humanité, Egalité, Justice". Quelle dérision ! Quel mensonge ! Quelle impudence ! C'était vraiment se moquer du monde ; notre pauvre République est vraiment née dans le sang et sous de mauvais auspices !  Voilà pourquoi, de temps à autre, sur ce blog, je me permets de rappeler vertement aux dirigeants de notre nation qu'ils doivent purifier leur conception idéologique de la Liberté, l'Humanité, l'Egalité et la Justice. Même si les révolutionnaires avaient, comme par hasard (!), oublié l'essentiel : la FRATERNITE, heureusement rajoutée à nos idéaux en 1848,  mais que nous avons tant de peine à faire exister, dans nos petits esprits limités.

"Qu'un sang impur abreuve nos sillons !"

Les soldats républicains témoignèrent du sang-froid des condamnés, l'indice d'une grande paix intérieure. Le 27 juillet, à Vannes, les condamnés, les mains liées derrière le dos, entre deux colonnes de soldats, au son du tambour, devant la foule assemblée, marchèrent vers le lieu du supplice. A la vue de ces condamnés, les habitants, émus et saisis de respect, versaient des larmes. Une fois arrivés, ces prêtres récitèrent la prière des morts, présidée par l'évêque de Dol de Bretagne.  On aligna les condamnés le long d'un mur, le long de l'Allée des Soupirs, pour ceux qui connaissent Vannes. On les fit mettre à genoux, l'attitude qui convenait pour une dernière prière. Ils furent alors fusillés.

Rouget de l'Isle, témoin de la scène, mais extérieur à cette affaire, déclara par la suite : "Ils moururent avec courage et dignité." (lire "Historique et Souvenirs de Quiberon", p. 428). Merci, Rouget, pour cet hommage posthume ! Ensuite, après la fusillade, les exécuteurs dépouillèrent les prêtres de leurs vêtements, qu'ils allèrent vendre chez les fripiers de la ville.  Les corps des suppliciés restèrent sur le lieu de l'exécution, dénudés et baignant dans leur sang.  Selon les dires des témoins, les chiens purent venir à leur aise s'abreuver à ce "fleuve", devant la population indignée, mais impuissante. "L'étendard sanglant est levé... Qu'un sang impur abreuve nos sillons." Dire que, dans les écoles de la République, l'on force les enfants à reprendre en choeur de telles paroles, porteuses de haine, un exemple magnifique pour les terroristes de Daech et autres, aujourd'hui !  Commis également dans la Vendée martyre et ailleurs, de tels massacres représentent le péché originel de notre République, toujours prégnant, bien qu'injustement poussés sous le tapis de l'Histoire  Ensuite, les corps furent jetés anonymement dans une fosse commune : pas de sépultures ! Cependant, par la suite, une inscription en marbre, toujours visible, fut placée sur le lieu de l'exécution. Puis, le 7 novembre 1814, les ossements mêlés furent transportés solennellement en la cathédrale de Vannes et, au terme d'une grand-messe pontificale du souvenir, en présence d'une immense foule, descendus dans un caveau creusé sous le dallage de cette cathédrale.

Il n'y avait personne pour filmer ! Mais je tiens tous ces détails du livre écrit en 1925 par le chanoine Boutin, non seulement sur Jean-Baptiste René Gaignet, mais aussi à propos de deux de ses compagnons fusillés avec lui : Jacques-Pierre Gouraud, ex-curé de Mareuil, et François-Pierre de Rieussec, ex-vicaire général de Luçon.  Ce livre a été écrit à partir de nombreux témoignages recueillis et validés historiquement.  En se basant entre autres sur un ouvrage intitulé "Les Martyrs de la Foi", écrit dès 1799 et publié en 1821 par un abbé Guillon. Quant à moi, je respecte la République, mais je n'oublie pas !... En tout cas, voici le genre de fait qui mérite vraiment le mot de "persécution" !


dimanche 29 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2516 : Des chauves-souris déprimées?... Ou des adultes dans la Foi ?

 Je ne sais pas si je vais être à la hauteur de l'attente de Simone, une fidèle habituée de ce blog, qui m'a lancé par mail cette semaine, du département de l'Ain, l'appel suivant : "Je compte beaucoup sur vous pour devenir meilleure pendant ce temps de l'Avent !"  Mais je me rassure en me disant que, bien au-delà de moi, c'est d'abord Dieu qui fait le boulot !  Et aussi vous, Simone, dans votre fidélité à ses appels.

En tout cas, pas de meilleures pistes pour avancer, en ce 1° dimanche de l'Avent, que de méditer les superbes lectures, ainsi que le psaume 79, que nous offre la liturgie de ce jour. Avec un petit problème cependant, qui peut nous désarçonner. En effet, dans l'évangile qui nous est offert ce dimanche, il nous est annoncé que ce que nous sommes appelés à vivre, "C'est comme un homme parti en voyage : en quittant sa maison, il a donné tout pouvoir à ses serviteurs, fixé à chacun son travail et demandé au portier de veiller."  Si je comprends bien, cela veut dire que Dieu n'est plus là, mais qu'il nous a laissé tout le boulot. "Tout pouvoir", c'est bien beau ; mais le pouvoir de faire quoi ?  Aujourd'hui, avec cette pandémie, en ce temps de crise, alors qu'on est même brimés pour aller trouver du réconfort à la messe, en fait de pouvoir, on se sent plutôt oubliés, laissés à nous-mêmes, abandonnés.  Si Dieu, avec son pouvoir de salut, n'est plus là, comment on va s'en sortir ?

C'est d'ailleurs la question qui est posée dans le texte tiré du Livre d'Isaïe : "Pourquoi, Seigneur, nous laisses-tu errer hors de tes chemins ? Tu nous as caché ton visage, tu nous as livrés au pouvoir de nos fautes. Tous, nous étions desséchés comme des feuilles, personne n'invoque plus ton nom..." C'est vrai que, dans les temps difficiles que nous vivons, avec les actes de violences qui défigurent notre société, comme le passage à tabac terrible de cet artiste parce qu'il était noir, devant les angoisses de tant de commerçants ou autres professionnels par rapport à l'avenir, face à l'arrêt des restaus contraints de rester fermés jusqu'au 20 janvier, et sans la communion par-dessus le marché, nous nous sentons vraiment comme dans le "pot au noir", pour reprendre une expression du Vendée Globe !

Et en plus, on dirait que l'ensemble de la société, gouvernement en tête, semble ignorer superbement les attentes des cathos. Alors, Seigneur, toujours avec Isaïe, nous te redisons, en t'implorant : "Reviens, Seigneur, à cause de tes serviteurs.  Pourquoi laisser nos coeurs s'endurcir ? Ah !  Si tu déchirais les cieux, si tu descendais, les montagnes seraient ébranlées devant ta face..."

 Mais, quand on y réfléchit, nos craintes, nos peurs, sont-elles compatibles avec ce que le Seigneur attend de nous ?  Est-il normal de perdre ainsi courage, parce que, selon nous, Dieu est absent, qu'il ne nous répond pas, alors que nous nous sentons soit-disant relégués par la société dans un angle mort de l'histoire ?  Mais ceci est-il une attitude adulte ?  Pourquoi est-ce qu'on se conduit comme de pauvres chauves-souris en panne d'ultra-sons, qui se débattent désespérément, perdues dans les ténèbres ?  Est-ce là notre espérance de chrétiens ?  Sommes-nous, ou non, suffisamment adultes dans notre foi ?  Avons-nous oublié que, lorsque tout semble perdu, c'est alors que Dieu est le plus proche de nous ?  Nous vivons des temps qui mettent les croyants en crise, c'est vrai. 

Mais il va falloir arriver à faire en sorte que les catholiques apprennent à gérer leur façon de croire, de pratiquer, de prier d'une autre façon, plus appropriée aux temps de crise justement !

Comme l'a si bien dit le Pasteur Bonhoeffer : "Vivre en majeur dans un monde sans Dieu."

Surtout que, comme saint Paul le rappelle dans la 2° lecture de ce jour, et c'est à super méditer : "aucun don de grâce ne vous manque."  Même si on n'a pas la communion ?  Oui, même si on n'a pas la communion, du moins pour un temps. Suivons seulement l'appel de Jésus : "Prenez garde, restez éveillés."   Appel relayé par l'apôtre Paul : "Le Seigneur Jésus-Christ, c'est lui qui vous fera tenir fermement jusqu'au bout." Relisez à ce propos le magnifique commentaire de Geneviève, suite au billet d'hier, et vous trouverez la paix !

"Tour pouvoir" nous est donné ; ces pouvoirs consistant avant tout en des missions de services, dans le but d'apporter un peu plus d'humanité dans ce monde, un peu plus d'espérance, un peu plus de fraternité. On est bridés pour aller à la messe, mais réjouissons-nous de ce que 200.000 commerces peuvent rouvrir à partir de ce week-end : ces petites boutiques ne sont-elles pas l'âme de nos villes et de nos bourgs ?  Rendons grâce à Dieu de ce que, d'après les échos, la collecte au profit de la Banque alimentaire, hier, a été très fructueuse. Bravo aussi aux groupes d'entraide qui naissent sur les réseaux sociaux !  Et mettons-nous en état de veille totale, à l'image des marins engagés dans le Vendée Globe, qui ne se laissent en rien abattre par les multiples avatars et difficultés de toute sorte auxquelles ils doivent faire face. A l'exemple de Damien Seguin, né sans main gauche, mais qui s'accroche et tient bien sa 10° place dans cette course qui fait honneur au courage humain.

Pour notre marche en adultes vers Noël, nous pouvons aussi relire, comme Geneviève, l'évangile d'hier samedi : "Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi, vous aurez la force d'échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l'homme."

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Rappel  :

Lorsque l'on pense que l'on est "privé de messes", de la communion, de la rencontre habituelle du dimanche avec les autres cathos pratiquants, ce n'est pas inexact en effet !  Mais on risque d'oublier un point essentiel : jamais nous ne sommes privés de la communion spirituelle avec le Christ, même sans aller à la messe.  Et nous ne sommes nullement coupés de la communion avec nos frères et soeurs humains, dont nous devons prier pour eux, téléphoner aux plus délaissés, servir ceux et celles qui sont dans le besoin. "La Messe sur le monde" quoi,...comme aurait dit le P. Teilhard de Chardin ... Une messe essentielle, dont jamais nous ne serons privés !   (voir les billets n° 2366 et 2373, en mai dernier)

samedi 28 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2515 : L'Eglise en Italie défend la figure de la Vierge Marie contre la mafia

 Encore un billet aujourd'hui pour nous sortir un peu des frontières étroites de notre confinement franco-français, et nous permettre de revoir où nous en sommes dans notre propre rapport à la Vierge Marie, sans l'emprisonner un peu trop dans certaines de nos attentes.Un fidèle lecteur de ce blog depuis de très longues années, Bernard, m'a fait parvenir le texte suivant à propos de l'attitude scandaleuse de la mafia, qui a osé faire de la Vierge Marie une sorte de protectrice de ses actions criminelles, et un otage de ses méfaits. Mais heureusement, l'Eglise a su réagir, afin de sortir Marie des griffes diaboliques de ce monstre.

                                                         =o=o=o=o=

Dans une lettre récente adressée à un groupe de travail anti-mafia dirigé par  le père Stefano Cecchin, président de l'Académie Mariale Internationale Pontificale, le pape François a appelé à « libérer la figure de la Madone de l'influence des organisations criminelles ».

« La dévotion mariale est un héritage religieux et culturel à sauvegarder dans sa pureté originelle, en le libérant des superstructures, des pouvoirs ou des conditionnements qui ne répondent pas aux critères évangéliques de justice, de liberté, d'honnêteté et de solidarité », a souligné le pape François.

L'objectif de cet organisme anti-mafia est de mettre fin à l'influence de la pègre sur les événements religieux et les lieux dédiés à la Vierge. Quand on parle de la « mafia » en Italie, on fait référence à une réalité extrêmement multiforme qui s'infiltre dans tous les aspects de la vie quotidienne. Le père Cecchin a déclaré que la nouvelle organisation combattra la « spiritualité déviante » reconnaissable dans plusieurs secteurs de la société italienne, où il est normal d'honorer la Mère de Dieu et les parrains de la mafia en même temps !

En mai 1993, le pape Jean-Paul II s'est opposé à la mafia, décrivant la Cosa Nostra comme « une culture de la mort » et « un ennemi de la dignité humaine et de la paix civile », et s'est exclamé : « Au nom du Christ, je dis aux personnes impliquées : Convertissez-vous ! Un jour, vous serez confrontés au jugement de Dieu ! ... Que l'harmonie règne sur cette terre qui est la vôtre ! »

Ces propos improvisés à la fin d'une messe en plein air au cours de laquelle Jean-Paul II a demandé aux mafieux de se convertir, de changer de voie ou de faire face à la colère du jugement final de Dieu, ont marqué un tournant dans l'histoire de l'Église italienne. L'intersection entre le crime organisé et la vénération de la Vierge Marie ne se limite d’ailleurs pas à l'Italie !

La dévotion mariale est un héritage religio-culturel qui doit être conservé dans sa pureté originelle. », le pape François apporte son vif soutien à l’Académie pontificale mariale internationale (PAMI).

Il a exprimé sa grande satisfaction à la suite de la création au sein de l’Académie d’un bureau d’études qui a pour mission de lutter contre l’usage d’une certaine représentation par l’imaginaire mafieux de la Vierge Marie. Ce département d’analyse, d’étude et de suivi des phénomènes criminels et mafieux rassemble des prêtres, des membres des forces de l’ordre et des experts spécialistes dans la lutte contre le racket.

« Je désire exprimer mon soutien à cette importante initiative », écrit le pape qui fustige régulièrement la mafia depuis son élection. Pour illustrer cette « récupération » de la Vierge, nous pouvons citer l’exemple des détours que peuvent faire certaines processions mariales, notamment dans le sud de l’Italie, afin de saluer des mafieux assignés à résidence.

Ces organisations mafieuses sont régulièrement la cible du pape François. Lors d’un déplacement en Sicile, en septembre 2018, il avait rendu hommage à Don Puglisi, un prêtre assassiné par Cosa Nostra, et livré un puissant message anti-mafia. « On ne peut pas croire en Dieu et être mafieux. Qui est mafieux ne vit pas en chrétien, car il blasphème avec sa vie le nom de Dieu-amour », avait-il clamé devant 100 000 fidèles réunis sur le port de Palerme. « Changez ! Arrêtez de penser à vous-mêmes et à votre argent, convertissez-vous ! », avait-il martelé à l’adresse des mafieux.

Selon l’Académie, la femme, telle que la mafia se la représente, doit manifester « une obéissance absolue aux ordres, l’absence de liberté devant le Destin, l’acceptation de la violence et de la force comme logiques constitutives de la société et le dévouement total aux liens du sang. » Une telle représentation contredit fortement l’image de la femme telle que véhiculée dans les Évangiles, qui se caractérise, selon l’Académie, par « la liberté, l’autodétermination, l’existence proactive, la persévérance et la sérénité ».

En Italie, la mafia s’articule autour de trois grandes organisations : la Camorra (en Campanie), la’Ndrangheta (en Calabre) et la Cosa Nostra (en Sicile). Si l’Académie se réfère sans doute davantage à la mafia italienne, il convient de noter que l’appropriation de l’image de la Vierge Marie par des groupes criminels n’est pas cantonnée à l’Italie. Comme le souligne le site Crux, l’image de Notre-Dame de Guadalupe est un tatouage fréquent chez les barons de la drogue mexicains.

L’Académie dénonce ainsi une « opération culturelle », menée par les mafias, qui vise à « ancrer dans les communautés les germes de la culture mafieuse à partir d’une vision déformée et historiquement irréelle de la mère du Christ ». C’est donc sur ce terrain que doit être menée une entreprise de « restitution » de la véritable figure de Marie.

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Déclaration de l'archevêque de Rennes  :

Dans une note du 26 novembre aux prêtres de son diocèse, Pierre d'Ornellas prend position :

"Je ne peux pas demander aux prêtres d'effectuer une discrimination entre les fidèles, en autorisant certains à venir à la Messe et en l'interdisant à d'autres.  C'est pourquoi, les prêtres n'ont pas à compter les fidèles dans le but d'en exclure, sous peine d'une grave discrimination contraire à l'affectation légale au culte des églises et contraire à la foi catholique. Ils accueillerons donc les fidèles qui viendront, en leur demandant le strict respect des gestes barrières.  

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Ma question  : on dirait une invitation à la désobéissance !  La petite gué-guerre continue, dans la cour de récré...


vendredi 27 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2514 : En tant que chrétiens, peut-on consulter un guérisseur ?

Pour changer.......Suite à une question qui m'est revenue hier !  Le guérisseur a reçu un don du Ciel, et non de la part du démon.  Son but est de guérir, tandis que celui du démon est de faire mourir.  Témoin ce témoignage simple, vrai et émouvant.  Inspiré par la bonté de la Vierge Marie !

                                                              =o=o=o=o=   

  "Le  "secret",  c'est Dieu qui montre le bout de son nez ! "                                                                                                                                                 

Ingrid Fankhauser pratique le ‘secret’ depuis une trentaine d’années à Genève. Pour cette croyante particulièrement attachée à la Vierge Marie, c’est une façon pour Dieu de signaler discrètement sa présence dans notre vie quotidienne.

Dans l’appartement d’Ingrid, flotte une douce odeur de spiritualité. Les statuettes de bouddha qui côtoient les portraits de la Vierge et les tableaux originaux qu’elle peint elle-même dénotent son ouverture à diverses formes de transcendance. Un décor haut en couleur et éclectique qui montre que la petite femme blonde et joyeuse d’une cinquantaine d’années marche surtout au «feeling» et refuse les carcans.

Le ‘secret’ lui vient de son grand-père, qui était «coupeur de feu» et s’occupait aussi des hémorragies. Mais elle ne l’a pas réellement «reçu». Lorsque sa grand-mère décède, son mari «perd les pédales» et ne peut pas transmettre les paroles en question. «Quelque chose» passe tout de même du vieil homme à la petite fille. «Il me disait tout le temps: Cocotte t’as hérité. Mais je ne comprenais pas ce qu’il voulait dire», se souvient Ingrid.

Plus tard, alors qu’elle est en visite dans une famille, une petite fille se brûle en mettant la main sur une plaque chaude. La Genevoise se rappelle alors les gestes et les paroles de son grand-père. La douleur de la petite fille se calme très rapidement. «Je me suis dit: Génial, je peux aider les gens!» Ingrid recommence un peu plus tard et élargit petit à petit son éventail.

Une activité épuisante mais gratuite

Aujourd’hui, son activité principale est la réflexologie. Elle fonctionne également comme rebouteuse. Mais le ‘secret’ lui prend toujours une grande partie de son temps et de son énergie. «On me téléphone parfois de l’autre bout du monde, en plein milieu de la nuit. C’est donc parfois un don difficile à porter, mais je ne me plains pas, c’est un cadeau magnifique».

«Je n’ai pas besoin d’une explication ‘scientifique’»

Une activité épuisante pour laquelle elle n’a jamais touché un centime. Il est inconcevable pour elle de se faire payer pour ce qu’elle considère comme un cadeau. «Parfois des personnes insistent pour me payer, mais je leur suggère, s’ils veulent vraiment faire un geste, de verser l’argent à une association caritative ou de mettre un cierge à l’église et de prier pour ma famille et moi». Elle avoue trouver de temps en temps un bouquet de fleurs derrière la porte. La seule «rémunération» qui lui fait plaisir et qu’elle accepte volontiers.

Pas une alternative au médecin

Elle ne rencontre en fait pratiquement jamais les personnes qu’elle «traite». Tout se passe par téléphone. Elle n’a besoin de savoir que le nom, la date de naissance et la partie du corps affectée. La plupart du temps, il s’agit de «lever» une brûlure. Ingrid travaille aussi sur les hémorragies et les nausées suite à des chimiothérapies.

Elle précise que l’effet du ‘secret’ est essentiellement de soulager la douleur. Elle a tout de même constaté que cela aidait à la cicatrisation. La Genevoise insiste sur le fait qu’elle demande toujours à la personne d’aller voir un médecin, car le ‘secret’ n’est pas censé agir directement sur la plaie.

«Personne ne devrait payer pour cela»

Depuis 30 ans qu’elle exerce son activité, elle a pignon sur rue en Suisse romande et ailleurs. Elle mentionne d’ailleurs la dizaine de centres hospitaliers dont elle figure sur la liste de faiseurs de ‘secrets’. Des spécialistes médicaux de grande renommée la contactent aussi régulièrement.

Ingrid constate que les personnes sont de plus en plus ouvertes à ces phénomènes. «Lorsqu’un jour j’ai dit à mon généraliste ce que je faisais dans la vie, je me préparais à affronter des sarcasmes. Au lieu de cela, il m’a affirmé qu’il y croyait dur comme fer et qu’il y avait lui-même eu recours». Elle constate que ce sont souvent les personnes au premier abord les plus sceptiques qui deviennent ensuite les plus convaincues.

Au service de tous

Ingrid n’a aucun doute sur l’efficacité de sa méthode. Comment cela fonctionne? Elle n’en sait rien et n’est pas réellement intéressée de le savoir. «Je fonctionne au ressenti, je n’ai pas besoin d’une explication ‘scientifique’ ou ‘intellectuelle’ pour ces choses-là».

Elle relève également que tout le monde est accepté pour ce service, au-delà des religions, des croyances, des professions, ou autres. Une seule fois, Ingrid a été face à un dilemme. Un hôpital de la région de Lyon l’a appelée un jour pour un homme brûlé sur une grande partie du corps. L’infirmière lui a confié avec gêne qu’il s’agissait d’un fabricant de bombes qui s’était fait exploser accidentellement. «Je me suis demandée si j’avais réellement envie que cet homme aille mieux, alors qu’il pouvait dans le futur tuer des gens que j’aime. Je l’ai fait quand même, par respect du principe de non discrimination que j’applique. Mais avec moins de conviction que d’habitude».

Aucune odeur de soufre

Concrètement, elle explique qu’il s’agit d’une demande faite à la Vierge Marie sous forme de prière. Un ‘secret’ qui par définition ne peut pas être révélé. La Genevoise assure pourtant que cette prière est tout ce qu’il y a de plus conforme à la tradition catholique. «Il n’est nullement fait allusion à Judas ou à je ne sais quelle autre entité, mes requêtes sont uniquement adressées à Marie».

Elle comprend cependant que l’Eglise puisse être prudente face à ces pratiques. «Moi, je sais que je suis dans le bien. Mais, il est possible que des personnes jouent aux apprentis-sorciers avec cela. Donc, il faut effectivement faire attention. Il faut surtout affirmer haut et fort que personne ne devrait payer pour cela». Pour elle, la réflexologie et la pratique de rebouteuse n’ont en outre aucun rapport à la religion et ne font appel qu’à ses connaissances et expériences professionnelles tout à fait ordinaires.

«Ce ‘cadeau du ciel’ ne doit pas se perdre»

Ingrid souligne qu’elle ne connaît pas les pratiques des autres faiseurs de ‘secret’, guérisseurs ou voyants. Elle n’en fréquente aucun et ne veut pas le faire. «Je désire rester libre et sans influence extérieure».

L’humilité avant tout

Le maître mot de sa pratique est «humilité». Elle assure n’avoir aucun pouvoir d’action en elle-même. «Ce que je fais, c’est uniquement de demander, moi je ne guéris rien. J’essaye juste d’être un bon canal, un ‘tuyau pas trop percé’ entre ce monde et l’au-delà», plaisante-t-elle.

La Genevoise est elle-même très croyante, avec une sympathie particulière pour la Vierge Marie. Elle avoue ne pas aller à la messe très souvent, par manque de temps. Mais elle adresse tous les soirs une prière à la mère de Jésus. Elle a également besoin de se ressourcer régulièrement à la Bénite Fontaine, un sanctuaire marial en France voisine. Une statuette de Notre-Dame de la Bénite Fontaine constitue son «support» de demande pour le ‘secret’. Un objet consacré par le curé du lieu.

Ingrid a transmis son ‘secret’ à sa fille, âgée de 29 ans. Cette dernière l’a déjà utilisé occasionnellement, mais ne veut pas en faire une activité avant la disparition de sa mère. La faiseuse de ‘secret’ lui a également transmis les valeurs fondamentales qui vont avec cette pratique: le non jugement, la non discrimination, la volonté de faire le bien et ne pas en tirer profit.

Car la Genevoise est persuadée que ce «cadeau du ciel» ne doit pas se perdre. «Pour moi, le ‘secret’, c’est avant tout un signe. A travers ces phénomènes inexplicables scientifiquement, Dieu nous montre le bout de son nez».

                                                                                                          par Raphaël Zbinden


jeudi 26 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2513 : Et si Dieu nous parlait ...en "langage" COVID !

 Si vous êtes des habitués de ce blog, vous connaissez déjà Bernard Robert, dont j'ai publié plusieurs très intéressantes contributions, particulièrement durant le premier confinement.  Bernard est prêtre, à mi-temps en Vendée, sur la paroisse de Pouzauges, domicilié à la Flocellière.  L'autre mi-temps, il assure son rôle d'aumônier international du MMTC (Mouvement Mondial des Travailleurs Chrétiens). Le billet de ce jour reprend l'un des articles du numéro de décembre 2020 d'INFOR, le bulletin de ce mouvement. Numéro entièrement consacré à un "voir-juger-agir" sur la façon dont les travailleurs-euses d'un certain nombre de pays des cinq continents se situent par rapport à cette pandémie mondiale. Je vous présente ici, rédigée par Bernard, l'une des pages de la partie "juger", qui peut également nous aider à progresser dans la réflexion et à entrer dans un vrai temps de prière.

                                                              =o=o=o=o=

            La situation que nous vivons et qui marque les travailleurs et les travailleuses du monde entier amène parfois à se poser la question de la volonté de Dieu dans tout cela. Certains, en s’appuyant sur des textes de l’Ancien Testament, y voient une « punition de Dieu » parce que nous malmenons la planète… Mais avec les militants des mouvements MMTC, nous voulons d’abord  affirmer notre Foi  au DIEU DE JESUS-CHRIST :  un Dieu BON et qui veut notre bonheur à toutes et tous, sans exception ; un Dieu JUSTE qui compte sur chacun d’entre nous pour réaliser Sa Justice ; un Dieu AMOUR qui pardonne sans cesse toutes nos erreurs, et qui veut nous remettre DEBOUT, militants de son Amour !

                Forts de cela, nous pouvons dire qu’au cœur de cette crise sanitaire qui provoque morts et catastrophes, Dieu est toujours là…. Oui :

 

Dieu est là, dans le SILENCE. Cette crise a entrainé le silence de la mort, le silence des machines, le silence des fonctionnements économiques… « un » monde s’est arrêté… mais le cœur du monde a continué de battre.  Dieu n’est pas intervenu directement… il n’a pas pris notre place…il nous a laissé libres de vivre cet évènement. Son silence ressemble à celui du Golgotha… un silence plein de sa présence !  

Seigneur, aide-nous à comprendre ce silence ! Aide-nous à ne pas t’accuser à tort, à cause de ce silence ! Aide-nous à savoir écouter tous les silences de nos vies, comme autant de « paroles » venant de Toi !

 

Dieu est là, dans la SOUFFRANCE. Cette crise a provoqué des milliers de morts, a provoqué la chute d’entreprises diverses et entrainé des millions de travailleurs dans une plus grande précarité et parfois dans le chômage. Cette crise est un « énorme cri de souffrance qui vient de tous les coins du monde », et plus particulièrement des milieux les plus pauvres. Et dans cette souffrance, nous voulons encore dire que Dieu est là, car il souffre avec nous. Il porte notre souffrance,  comme il a porté la croix de son Fils.

Seigneur, toi qui portes nos joies comme nos souffrances, toi qui t’intéresses à tous nos projets et nos peurs, regarde celles et ceux qui désespèrent aujourd’hui, qui ne voient plus d’avenir possible, pour eux,  pour leur travail, pour leur famille, pour la planète, pour une économie solidaire, pour une Eglise fraternelle …..  Ouvre-leur la porte de Ton Espérance.

 

Dieu est là, dans La SOLIDARITE. Cette crise a aussi permis de beaux gestes de solidarité entre voisins, entre collègues de travail ; elle a permis la reconnaissance (même partielle et temporaire) de catégories de travailleurs souvent les plus délaissés ; elle a permis surtout de porter une attention plus respectueuse envers les autres, en portant le masque… Pendant des semaines et des mois, la solidarité a été à l’honneur.

Seigneur, fais-nous comprendre que dans ces gestes de solidarité, d’amitié, d’entraide, c’est Toi qui agis par la force de ton Esprit. A travers ces gestes, tu veux nous montrer quel monde tu souhaites pour tous. Aide-nous à grandir encore dans la prise de conscience, et donne-nous le courage de continuer sur ce chemin.

 

Dieu est là, dans l’INTERROGATION : Cette crise sanitaire, relayée et parfois amplifiée par les médias, a été révélatrice de la peur qui envahit nos vies… peur devant la perte de l’emploi, peur devant la maladie, peur surtout devant la mort possible. Or nous le savons bien : nous sommes tous « de passage » sur cette terre. Il n’y a que Dieu qui est éternel…et son Amour dans lequel il nous entraine…. si nous le voulons bien ! Il s’agit donc de nous interroger constamment pour donner du sens à notre vie.

Seigneur, aide-nous, à travers nos interrogations, à trouver du sens pour notre vie personnelle, familiale, sociale, religieuse… Aide-nous à découvrir que Tu es « le Chemin, la Vérité, La Vie », comme le disait ton Fils Jésus. 

 

Dieu est là, dans l’IMAGINATION : Cette crise a été l’occasion de créer des moyens nouveaux pour la vie en société, en consommant et commerçant plus localement, en inventant des transports plus solidaires et plus respectueux de la planète. Et surtout, nous avons beaucoup pensé, beaucoup écrit, beaucoup publié pour imaginer une vie meilleure, un monde plus équilibré au plan local, national ou mondial. Mais nous savons bien que tout reste à réaliser concrètement.

Seigneur, donne-nous la force de Ton Esprit pour que nos actes et nos choix soient en conformité avec nos paroles ou nos écrits. Que ton Esprit nous aide surtout à résister à la solution de facilité qui est de « recommencer comme avant ». Aide-nous à être des Inventeurs de Ton monde d’Amour, de Justice et de Paix.

                                                          =o=o=o=o= 

Infos sur le MMTC  et son bulletin  :  www.mmtc-infor.com

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RIONS  un peu !

Il est possible que ce jeudi en fin de matinée, le premier ministre retoque le président par rapport à la "jauge" (quel joli mot !) concernant le nombre de présences aux messes.  En tout cas, sur les réseaux sociaux, c'est un déchaînement d'humour et de moqueries pour souligner le sentiment d'absurdité ressenti après les déclarations d'E. Macron à propos de la reprise des cultes. Deux exemples :

-  Philippe Clanché, un ami journaliste avec lequel j'ai vécu un pélé en Terre Sainte en 2003, en compagnie de paroissiens des Sables d'Olonne  :  "Macron a une vision historique de l'Eglise qui date un peu : le Concile de Trente !

-  Le Nain  :  "Si 30 fidèles sont présents au début de la messe, l'un d'eux devra quitter l'église au moment de la consécration, la présence réelle comptant comme un participant de plus...  Et encore, on ne parle pas de la Sainte Trinité !"

 

mercredi 25 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2512 : La réaction de certains cathos est-elle à la hauteur de l'Evangile ?

 Sur Europe 1, ce matin, on sentait Matthieu Rougé, évêque de Nanterre, très remonté contre la décision gouvernementale de restreindre à 30 personnes maxi le nombre de paroissiens pouvant participer à une messe, et ceci, quel que soit le l'ampleur du lieu concerné. Très déterminé, il n'a pas ménagé ses adjectifs, parlant d'une décision "contradictoire, ridicule, grotesque, irrespectueuse et incohérente".  Il n'est quand même pas allé jusqu'à traiter le président d' "adolescent immature", comme l'a fait Jean-Marie Rouart, membre de l'Académie Française, hier matin, sur cette même antenne, au sujet des propositions d'E. Macron concernant la rénovation de la cathédrale Notre-Dame, mais il n'en était pas loin !

On peut comprendre, bien sûr, la déception d'un certain nombre d'évêques et de catholiques par rapport à une telle décision !  Et moi le premier, je souffre de cette impossibilité de me retrouver au milieu de belles assemblées de frères et soeurs, célébrant joyeusement avec eux le Repas du Seigneur. Mais nous catholiques, nous sommes, comme les autres, citoyens de la République et, tout en ne manquant pas de faire part de nos souhaits, il nous faut prendre acte humblement des décisions proposées, pour le bien et la santé de l'ensemble de notre société.  Et l'Eglise catholique, avec ses failles internes trop graves en cette époque, peut-elle se permettre de donner quand même des leçons de bonne gouvernance à la société, du haut de son clocher branlant ?

Surtout que, jusqu'ici, un certain nombre de catholiques en colère ne se sont pas gênés de tourner le dos aux consignes sanitaires en vigueur. Chaque jour, je célèbre, chez moi, en priant la messe avec les Assomptionnistes de "Prions en Eglise". Mais, par curiosité, je vais aussi voir, sur internet, comment se passent d'autres messes ici et là. Je dois dire que j'ai été étonné de constater que, dans bien des cas, l'on avait oublié le masque et le gel hydroalcoolique. Le gouvernement est au courant de tels écarts, et cela ne l'aide pas à prendre l'Eglise catholique au sérieux dans ses engagements.  Les écarts de trop de brebis galeuses pénalisent ainsi la grande majorité des catholiques qui, eux, se font un point d'honneur à porter le masque, et au-dessus du nez, malgré le désagrément.

Avant-hier, la presse signalait le décès vendredi dernier du patriarche de l'Eglise orthodoxe serbe, des suites de la Covid-19, trois semaines après avoir célébré les funérailles du chef de cette Eglise au Monténégro, victime également du coronavirus. La télé nous a montré des images de cette sépulture : une foule nombreuse, dont les participants étaient serrés les uns contre les autres, aucun masque à l'horizon ! Etait-ce une attitude responsable ?  Tout cela ne joue pas en notre faveur !

Et parallèlement, les réactions de ces cathos outragés m'amènent à me demander s'ils ont bien lu l'évangile de dimanche dernier, en la fête du Christ-Roi. A mon avis, ils seraient même prêts à faire le reproche à Jésus d'avoir oublié quelque chose de plus important que tout le reste, dans ce qu'il a exprimé. Je les verrais bien ajouter un impératif à ce discours : "J'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger..." OK, OK ; mais surtout : "Je vous avais donné l'obligation d'aller à la messe chaque dimanche, et vous y êtes allés, entrez dans mon Royaume éternel..."  Pas de chance ! Ou Matthieu a oublié une phrase, ou, plus sûrement, Jésus ne l'a pas exprimée.  Par contre, comme l'a rappelé le pape François dans son homélie de dimanche dernier : "Au soir de notre vie, nous serons jugés sur l'Amour". (St Jean de la Croix)

Une dernière réflexion : j'ai entendu un catho indigné s'écrier : "Ils vont finir par nous bouffer !"  Cela m'a renvoyé à cette réflexion que nous a rappelée le Bréviaire en la fête de St Ignace d'Antioche, le 17 octobre dernier. Cet évêque fut jeté aux bêtes, dans l'arène, à Rome, vers l'an 110. Voici un extrait de la lettre qu'il écrivit alors aux Romains : "J'écris, moi, à toutes les Eglises, et je fais savoir à tous que de grand coeur je mourrai pour Dieu, si vous ne m'en empêchez pas. Je vous supplie, ne me portez pas une pitié importune. Laissez-moi devenir la pâture des bêtes : elles m'aideront à atteindre Dieu. Je suis son froment : moulu sous la dent des fauves, je deviendrai le pain pur du Christ. Suppliez le Christ pour que ces animaux fassent de moi une victime offerte à Dieu."

 Quant à nous, sommes-nous vraiment des victimes ?  Il faut raison garder ! Qu'il aurait été plus évangélique, plus symbolique, que les évêques de France fasse un communiqué solennel redisant leur solidarité fraternelle avec les propriétaires de bars, de  restaurants, de salles de sport..., confinés comme nous, mais bien plus touchés que nous par les mesures de confinement !!!

Espérons cependant que bientôt, un certain bon sens ait le dernier mot des deux côtés !

mardi 24 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2511 : La mise au pas des Pieds-Nickelés !

En septembre, suite à la republication des caricatures du Prophète, alors que s'ouvrait le procès des attentats de janvier 2015, l'on n'a pas entendu beaucoup de réactions remettant en cause une telle initiative !  Au point qu'un temps, l'on a pu croire que la France entière était "Charlie". Malheur en tout cas à celui qui osait dire que ces dessins plutôt navrants n'étaient pas le nec plus ultra de la liberté d'expression...

Pour ma part, trois jours de suite, j'avais publié des billets où je faisais part de mon effarement devant une telle republication. Vous pouvez aller relire mes billets des 2, 3 et 4 septembre, celui du mercredi 2 étant intitulé : "Charlie Hebdo, ou le naufrage de la Fraternité."  Mais je me sentais bien seul à réagir ainsi. Le 21 septembre, un ami prêtre m'a demandé, un peu inquiet : "Tu n'as pas eu des "réactions" (d'opposition ou de colère) suite à tes billets ?" C'était risqué en effet !  Je vous laisse deviner ce qui s'est passé !  En tout cas, je redoutais surtout les conséquences, directes ou indirectes, d'une telle republication. J'aurais préféré me tromper, mais ça n'a pas traîné : s'en est suivi l'horrible assassinat de S. Paty !  Puis, ceux de Nice, terrifiants et totalement immérités. Mais toujours, plus que jamais, ces caricatures semblaient ce qu'il y avait de mieux pour témoigner de la liberté d'expression, dans les écoles et dans tout notre pays. Vraiment navrant !

Cependant, peu à peu, quelques voix ont osé s'élever :

Monique Hébrard  (journaliste et écrivaine, prix de littérature religieuse pour son livre "Les femmes dans l'Eglise") : "La liberté d'expression, tout le monde est pour.  Mais au regard du nombre de victimes qu'ont fait et que continuent de faire les caricatures de Mohammed, je me demande si la sacro-sainte liberté d'expression ne doit pas être limitée par ce que l'on sait de l'incapacité d'un autre à la supporter. Il y a là du respect et de la prudence.  Mon questionnement (le 26 octobre) n'est pas dans l'air du temps, mais je le formule quand même car il m'habite."

Jean-François Bouthors (écrivain et éditeur) : "Rien ne justifie que l'on tue pour une caricature, mais il ne suffit pas de brandir les caricatures comme un totem pour défendre la liberté d'expression.  Ce serait croire que l'on peut faire l'économie d'une initiation aux différentes étapes et facettes de la liberté d'expression."  (22 octobre)

Dominique Moïsi  (expert en politique internationale) :  "L'assassinat de S. Paty repose la question de l'islam. Pourquoi la violence ?  (...)  Distribuer généreusement les caricatures de "Charlie Hebdo" n'est peut-être pas la meilleure des réponses."  (23 octobre)

P. Jean-Marie Petitclerc (Salésien, éducateur) :  "Si la liberté est un droit, la fraternité est un devoir.  La liberté d'expression doit être associée avec le devoir de fraternité, qui impose le respect de chacun dans ses convictions, qu'il soit croyant ou incroyant.  Il faut apprendre à conjuguer liberté d'expression et devoir de fraternité."

Bernard Valetes  (édito du 13 novembre dans "L'Echo de l'Ouest")  :  "Vive la caricature, certes ; mais faut-il ériger en étendards de la liberté les provocations les plus grossières, voire vulgaires, dont seulement une minorité se gausse ? "Charlie Hebdo" était -il la voix de la France ?  La liberté de penser, c'est autrement plus sérieux.  Peut-être faudrait-il s'interroger sur l'arrogance française et cesser d'agiter un chiffon rouge devant les deux-tiers de la planète qui, pensent nos élites, n'ont pas encore (les pauvres) reçu les lumières que notre pays s'arroge le droit de leur dispenser..."

Mgr Sébastien Shaw (président des évêques du Pakistan, pays où, comme dans d'autres nations, les chrétiens ont eu à subir les conséquences des caricatures venues de France) : "Nous condamnons fermement ces gestes sacrilèges ; une société libérale ne signifie pas qu'il faille blesser les sentiments des communautés."

Cependant, aucune de ces voix n'a eu autant d'impact chez nous que celle d'Edgar Morin, dont l'analyse, publiée samedi sur deux grandes pages dans le journal "Le Monde", qui fait référence auprès de la soit-disant "intelligentsia" française, cette intervention est sans appel ; celui qui l'a interviewé, Nicolas Truong, précisant que "Edgar Morin est plébiscité dans le monde entier."  Et hier matin, à 7h40, à une heure de grande écoute, il a de nouveau été interviewé, sur Europe 1  :  "Il faut résister dans son esprit contre tout ce qui peut nous démoraliser, mais toujours dans la fraternité. Autour de ces caricatures, il s'est créé un climat de psychose collective. Les caricatures ont été sacralisées. On a cru, y compris au niveau le plus élevé de notre pays, que ces caricatures étaient l'expression la plus haute de la liberté française.  Alors que, si je fais un acte sans mesurer les conséquences, je fais un mauvais usage de ma liberté. Je suis très heureux de pouvoir continuer à faire comprendre les choses que je crois avoir comprises."

Je suppose que mis en face d'un tel jugement, médiatique, incontestable et sans appel, dans leurs bureaux hyper protégés grâce à l'argent de nos impôts, les Pieds Nickelés vont avoir envie de venger leur soit-disant virginité offensée !  Mais ils auront à se faire du souci car  -  à leur tour d'être caricaturés  -  selon l'expression ironique populaire, "la bave du crapaud n'atteint pas la blancheur de la colombe."

 

 

 


lundi 23 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2510 : "Celui qui croyait au ciel, celui qui n'y croyait pas", tous frères !

 Vous connaissez tous ce superbe poème de Louis Aragon, "La Rose et le Réséda", écrit pendant la période de la Résistance, en 1943, alors que communistes et chrétiens, de droite ou de gauche, croyants ou non, tous se considéraient au service d'un même idéal : le salut de notre pays.

"Celui qui croyait au ciel

Celui qui n'y croyait pas

Qu'importe comment s'appelle 

Cette clarté sur leurs pas

Que l'un fut de la chapelle

Que l'autre s'y dérobât..."

Il me semble que ce poème a quelque chose à voir avec la Bonne Nouvelle proclamée dans l'évangile d'hier, en la fête du Christ-Roi.  A savoir que, contrairement à ce que l'on a pu croire pendant de longs siècles, parce que l'on n'avait peut-être pas suffisamment médité cette scène de l'Evangile, même les non-croyants pourront avoir une place au paradis ; ou plutôt, auprès de Dieu, pour l'Eternité !  Et cela, même si ce n'est toujours pas évident pour un certain nombre de chrétiens ! Avec Dieu pour toujours, s'ils ont, bien sûr, essayé d'être fidèles, comme cela nous est demandé également à nous croyants, à leur conscience éclairée, et s'ils ont servi leurs frères de tout leur coeur.  Mais aussi, Dieu respectant leur liberté, s'il font le choix de Dieu, au moment du Jugement final ; ceci demeurant un grand mystère.

En fait, on ne peut plus diviser l'humanité entre d'un côté, les croyants, plutôt catholiques évidemment, et de l'autre, les autres : les mal-croyants, les non-croyants  -  j'ai d'ailleurs horreur de ces termes  -   les Francs-Maçons, les musulmans, les homosexuels, les communistes, les païens et j'en passe...

La classification finale  -  c'est écrit noir sur blanc en Matthieu 25  -   devrait plutôt répartir, d'un côté, ceux qui auront servi leurs frères, qu'ils soient croyants ou non, et de l'autre, ceux qui n'auront pas fait le choix de la fraternité, qu'ils soient croyants ou non. 

Attention : ce n'est pas Dieu qui fera cette répartition ; c'est chacun de nous qui, devant le déroulé de sa vie, comprendra de quel côté lui-même s'est placé.

Comme l'a dit très justement hier le prédicateur de la messe télévisée : "Dieu vient pour sauver tous ceux qui ont fait le choix d'aimer."  Relisez les intéressants commentaires du billet d'hier dimanche : ils expliquent bien cela.

Je conclus avec ces réflexions du pape François dans sa lettre-encyclique "Tous frères" , réflexions que j'avais déjà citées récemment (voir billet du 14 novembre) :

-  n° 74  :  "Croire en Dieu et l'adorer ne garantit pas de vivre selon sa volonté."

-  idem  :  "Le paradoxe, c'est que, parfois, ceux qui affirment ne pas croire peuvent accomplir la volonté de Dieu mieux que les croyants."

-  n° 281  :  "Au dernier jour et quand il y aura la lumière suffisante sur la terrepour voir les choses telles qu'elles sont, il y aura des surprises."

Si nous pouvions éviter la mauvaise surprise, en ce qui nous concerne personnellement, mais pas que..., ce serait quand même pas mal !

Bon courage, sur le chemin évangélique de la foi au Christ et de la Fraternité !

dimanche 22 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2509 : A quoi Jésus invite-t-il chacun, en ces jours difficiles ?

            "La Bible dans une main, le journal dans l'autre."

Voilà quelle doit être sans doute l'attitude de tout pasteur, dans son service d'évangélisation, selon le grand théologien Karl Barth ; et pourquoi pas également, ce que doit être la façon de prier et d'agir de tout baptisé !

Hier, je vous proposais, comme maître et guide en humanisme, la belle figure d'un Sage de notre temps, Edgar Morin, unanimement respecté. J'espère que vous n'avez pas été choqués par le fait que, par souci de vérité, j'ai publié ce que, en tant qu'agnostique, il pense des religions. Cela ne l'empêchant pas de défendre, de façon quasi évangélique, le droit au respect pour chaque religion et chaque croyant.

Aujourd'hui, nous sommes invités à prendre pour guide un Pasteur suisse de l'Eglise réformée, Karl Barth (1886-1968), considéré comme l'une des personnalités majeures de la théologie chrétienne au XX° siècle. Très innovant, il a établi un rapport étroit entre la vie concrète des hommes et le Salut en Christ Sauveur. C'est l'une des personnalités qui m'ont le plus inspiré durant toutes mes années au service de l'Evangile. Hier, en parcourant la presse, alors que j'avais en tête l'évangile de la messe du Christ-Roi, dans cette même perspective, je n'ai pu m'empêcher de faire le lien entre les nouvelles du jour et la parole de Jésus.  Je vous livre, tout à fait en vrac, et en paraphrasant l'évangile de ce jour, ce qui m'est alors venu à l'esprit, tandis que je feuilletais le journal.

             "C'est à moi que vous l'avez fait..."

-  j'étais malade, étranger, en prison, j'avais faim, j'avais soif..., et tu m'as aidé.

-  j'étais confiné, seul, isolé, sans espoir, et tu m'a téléphoné... Cela m'a fait un bien ! 

-  j'étais sans espoir, dans le couloir de la mort, au pénitencier de Terre-Haute, dans l'Indiana, et tu as signé en ma faveur un appel de l'ACAT (Action des Chrétiens pour l'Abolition de la Torture et de la peine de mort). J'ai un peu repris courage.

-  je n'arrivais plus à faire tourner mon entreprise, et tu es venu à mon secours, avec une association de soutien entre dirigeants d'entreprises... 

-  j'étais présent, invisiblement, dans le coeur croyant de nombreux musulmans et, quand j'ai été injustement injurié, humilié, tu n'as pas craint de me défendre.  Là, j'ai pensé à Edgar Morin, agnostique, ne comprenant rien aux religions, mais combattant toute injustice.  "Mais Seigneur, quand t'avons-nous vu injurié ?" Cet homme compréhensif et fraternel sera sans doute devant nous dans le Royaume des cieux !

-  je me sentais fragile, j'avais peur de la Covid et, quand tu es passé près de moi, tu avais ton masque, et bien sur le nez ! Ainsi, sans le savoir, tu m'as protégé. 

-  j'avais besoin d'une aide fraternelle, et tu as reconnu en moi, pauvre type en peine, ma "présence réelle" ; car je ne suis pas confiné dans un tabernacle ni dans une hostie seulement, mais bien réel : tu l'as vu, tu l'as compris, merci ! 

- en tant que jeune, subissant de plein fouet la crise de la Covid, tu m'as offert une aide, à travers ton association, pour me permettre d'acheter un ordinateur, et j'y vois ainsi un peu plus clair dans mon petit budget d'étudiant.

-  j'étais étranger, je fuyais la guerre, j'avais peur d'être une fois de plus rejeté, condamné ; mais tu m'as regardé, tu m'as tendu la main comme à un frère.  J'ai recommencé à espérer.

-  je ne savais pas si je pourrais offrir des jouets à mes enfants, mais tu m'a mis en lien avec le Secours Catholique, qui va m'inviter pour que je puisse choisir moi-même des jouets, et faire un paquet-cadeau pour chacun de mes enfants. 

Seigneur, c'est très dur, souvent, de te voir dans les autres ; surtout dans ceux qui quémandent, ceux qui pratiquent telle autre religion que nous comprenons mal, ceux qui ne savent pas s'organiser dans leur vie, du moins le croyons-nous. Alors, nous nous confions à toi, car c'est de toi, le Bon Berger, que nous recevons la vie.  Apprends-nous à te reconnaître dans tous les frères et soeurs que nous rencontrons, particulièrement ceux que l'Evangile appelle "les plus petits d'entre les miens", d'après Jésus. Aide-nous à mettre l'amour des autres au coeur de notre actualité.  Dans un esprit de Fraternité !   Amen ! Qu'il en soit ainsi !

            Le Jugement dernier selon Albert Camus (dans "La Chute")

"Vous parliez du Jugement dernier. Permettez-moi d'en rire respectueusement. Je l'attends de pied ferme : j'ai connu ce qu'il y a de pire, qui est le jugement des hommes.  Pour eux, pas de circonstances atténuantes, même la bonne intention est imputée à crime."    (C'est aussi cette attitude-là qu'il nous faut combattre en nous-même !)

 



samedi 21 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2508 : Caricatures : analyse d'un des plus grands esprits de notre temps, Edgar Morin

Paru dans le journal "Le Monde" de ce samedi 21 novembre, l'entretien exceptionnel que le sociologue Edgar Morin vient d'accorder à ce quotidien, et dans lequel il revient sur la republication récente des caricatures de Mahomet. A ce propos, en France, on a peu écouté, et encore moins essayé de comprendre les réactions des musulmans à ce sujet.  Puisse cette grande voix emblématique de la raison française, qu'est Edgar Morin, être mieux entendue ! Merci à Monique, et aussi à Claude, qui m'ont orienté vers cette réflexion, dont voici quelques trop brefs extraits.

Je rappelle tout d'abord qu'Edgar Morin est né en 1921 ; si la vie continue de lui sourire, il pourrait fêter ses 100 ans le 8 juillet 2021 ; ce qui n'enlève rien à la perspicacité de son esprit ! Il est issu d'une famille juive originaire de Salonique (Grèce). Résistant, communiste, puis antistalinien exclu du parti, défendant l'Algérie indépendante, pionnier de l'ère écologique, il fut directeur de recherche émérite au CNRS, récompensé par trente-huit doctorats "honoris causa" dans le monde entier. A 99 ans, il vit confiné à Montpellier avec son épouse, Sabah Abouessalam. Son ami Régis Debray écrit : "Mieux qu'un grand esprit, il est un grand vivant."  Très bien placé donc pour analyser enfin sérieusement cette question des caricatures.

                                                          =o=o=o=

"A propos de l'assassinat de Samuel Paty et de la tuerie de Nice, tout d'abord, il me semble important de me situer. En ce qui concerne les religions, je pense que les esprits humains créent des dieux qu'ils adorent et auxquels ils obéissent.  Je suis, comme on dit, agnostique.  Ou plutôt, je crois que l'univers comporte un mystère qui échappe aux capacités de nos esprits. Je considère la Bible, fondement des trois religions, juive, chrétienne et musulmane, comme un tissu de légendes et de mythes ; mi-légendaires mi-historiques sont également les Evangiles et le Coran. J'admire Jésus sans croire à sa résurrection.

Quand les religions sont toutes-puissantes, j'exècre leur haine des impies, des croyants autres, des non-croyants.  J'exècre les interdits qu'elles imposent.  (...)  Je ne confonds pas pour autant islam et djihadisme : entre le pieux musulman et le fanatique meurtrier, comme entre François d'Assise et Torquemada, il y a tout un monde extrêmement divers.  Le mot "islamisme" occulte cette diversité pour n'y voir que prosélytisme et refus de démocratie et de laïcité. (...) Mais la majorité des musulmans de France accepte les lois républicaines et les croyants sont d'autant plus pacifiques qu'ils pensent candidement que leur religion est une religion de paix.  (...)

J'ai horreur de tout fanatisme meurtrier. (...) J'aime discuter avec les croyants, mais je n'aime pas les offenser ; ne pas offenser ni humilier est mon credo éthique à valeur universelle : le respect d'autrui me demande de ne pas bafouer ce qui est sacré pour lui, mais je me donne le droit de critiquer ses convictions. Le respect de la liberté comporte ma liberté de parole. (...) et la condamnation du fanatisme meurtrier des djihadistes islamistes. (...)

Les caricatures, il ne faut pas oublier qu'elles choquent les musulmans pieux. Pire, elles ont suscité des folies meurtrières. Enfin, leur officialisation a provoqué de délirantes et innombrables manifestations antifrançaises dans le monde islamique.  Il y a certes des cas où l'on doit braver l'incompréhension étrangère, mais il y a aussi des cas où il vaut mieux ne pas la susciter ou l'exciter.

Il faut être attentif aux effets pervers d'actes à intentions salutaires.  Il y a parfois contradiction entre liberté et responsabilité de parole ou d'écrit. Nous sommes dans un de ces cas, et nous devons savoir que le choix comporte un risque. Il y a parfois coïncidence entre responsabilité et irresponsabilité ; ainsi, il me semble irresponsable de prendre la responsabilité d'assumer, comme vérité de la liberté française, la propagation à l'infini de ces caricatures. (...)

L'éthique ne peut se borner aux bonnes intentions.  Elle doit avoir le sens des conséquences de ses actions, qui souvent sont contraires aux intentions. Et surtout, toute décision prise dans un contexte incertain ou conflictuel comporte un risque d'effets contraires.  Aussi, les caricatures ne peuvent être jugées seulement selon les intentions libératrices ou libertaires de leurs auteurs et diffuseurs, mais aussi selon les possibilités de leurs néfastes ou désastreuses conséquences.

La liberté d'expression ne saurait exclure toute prévoyance des malentendus, incompréhensions, conséquences violentes ou criminelles qu'elle peut provoquer.?  Est-ce que ces caricatures peuvent aider des êtres pieux et croyants à mettre en doute leur croyance ?  Nullement.  Est-ce qu'elles peuvent contribuer à affaiblir le djihadisme ?  Nullement.  (...)"

                Parole d'un Sage de notre temps !  Tout est dit !

                Merci au journal "Le Monde" d'avoir eu l'intelligence de publier de tels propos, suggérant par là leur utilité pour faire avancer la réflexion au sein de notre nation. 

                Albert Camus, comme bien d'autres grandes plumes, était sur la même longueur d'onde quand il écrivait, dans "Le manifeste du journalisme libre" :  

                  "Ne rien publier qui puisse exciter la haine ou provoquer le désespoir."

vendredi 20 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2507 : Il existe différentes "présences réelles" de Jésus (Cardinal Grech, suite et fin)

 Même si cela peut demander un petit effort au plan intellectuel, je vous invite à poursuivre la réflexion entamée dans le billet d'hier avec le Cardinal maltais Mario Grech.  Je pense que vous avez apprécié le bon sens qui ressort de son témoignage, la clarté de ses explications, son enracinement au plus profond de l'Evangile, son ouverture d'esprit, ainsi que la façon dont il sait répondre aux questions que se posent beaucoup de catholiques quant à cette "privation" temporaire de la célébration de la messe.

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Vous avez évoqué la question de la "pauvreté spirituelle" : quelle est sa nature et quelles sont, à votre avis, les causes les plus évidentes de cette pauvreté ?

Il est indéniable que l'Eucharistie est la source et le sommet de la vie chrétienne ou, comme d'autres préfèrent le dire, le sommet et la source de la vie même de l'Eglise et des fidèles ; et il est également vrai que "la célébration liturgique (...) est l'action sacrée par excellence, et qu'aucune autre action de l'Eglise n'égale son efficacité au même degré" ; mais l'Eucharistie n'est pas la seule possibilité pour le chrétien d'expérimenter le Mystère et de rencontrer le Seigneur Jésus.  Paul VI l'a bien observé en écrivant que dans l'Eucharistie, "la présence du Christ est "réelle", mais non de façon exclusive, comme si les autres n'étaient pas "réelles"."

Par conséquent, il est préoccupant que quelqu'un se sente perdu en dehors du contexte eucharistique ou du culte, car cela monter une ignorance des autres façons de s'engager dans le Mystère.  Cela indique non seulement qu'il existe un certain "analphabétisme spirituel", mais c'est la preuve de l'insuffisance de la pratique pastorale actuelle.  Il est très probable que, dans un passé récent, notre activité pastorale a cherché à conduire aux sacrements, et non à conduire - à travers les sacrements - à la vie chrétienne.

La pauvreté spirituelle et l'absence d'une vraie rencontre avec l'Evangile ont de nombreuses implications...

Certainement.  Et on ne peut pas vraiment rencontrer Jésus sans s'engager à l'égard de sa Parole.  Concernant le service, voici une réflexion : ces médecins et infirmières qui ont risqué leur vie pour rester proches des malades n'ont-ils pas transformé les salles d'hôpital en "cathédrales" ?  Le service aux autres dans leur travail quotidien, en proie aux exigences de l'urgence sanitaire, était pour les chrétiens un moyen efficace d'exprimer leur foi, de refléter une Eglise présente dans le monde d'aujourd'hui, et non plus une "Eglise de sacristie", absente des rues, ou se satisfaisant de projeter la sacristie dans la rue.

Ainsi, ce service peut-il être un moyen d'évangélisation ?

La fraction du pain eucharistique et de la Parole ne peut se faire sans rompre le pain avec ceux qui n'en ont pas. C'est cela, la diaconie.  Les pauvres sont théologiquement le visage du Christ.  Sans les pauvres, on perd le contact avec la réalité.  Ainsi, tout comme un lieu de prière dans la paroisse est nécessaire, la présence de la cuisine pour la soupe, au sens large du terme, est importante.  La diaconie ou le service d'évangélisation, là où il y a des besoins sociaux, est une dimension constitutive de l'être de l'Eglise, de sa mission. (...)

La foi, en fait, n'est plus une condition préalable évidente pour vivre ensemble.  Le manque de foi, ou plus clairement la mort de Dieu, est une autre forme de pandémie qui fait mourir les gens.  (...)

Peut-on dire que, dans la vie quotidienne, il peut se vivre une vie eucharistique et ecclésiale en famille ?  Et que le foyer familial peut être considéré comme "l'Eglise", y compris "église" au sens liturgique ?

Cela m'a semblé très clair. Et ceux qui, pendant cette période où la famille n'a pas eu l'opportunité de participer à l'Eucharistie, n'ont pas saisi l'occasion d'aider les familles à développer leur propre potentiel, ont raté une occasion en or.  D'un autre côté, il y a eu des familles qui, en cette période de restrictions, se sont révélées, de leur propre initiative, "créatives dans l'amour". Cela inclut la manière dont les parents accompagnent leurs jeunes dans des formes de scolarisation à domicile, l'aide offerte aux personnes âgées, la lutte contre la solitude, la création d'espaces de prière et la disponibilité aux plus pauvres.

Que la grâce du Seigneur multiplie ces beaux exemple et nous aide à redécouvrir la beauté de la vocation et des charismes cachés dans toutes les familles !

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Dans ces deux billets, n'ont été publiés que des extraits de cette interview dans son ensemble.  Il y aurait eu d'autres aspects intéressants à communiquer, mais il m'était difficile d'être plus long...Vous avez ci-après une possibilité de retrouver le texte dans son intégralité, si vous le souhaitez  :

 

 


jeudi 19 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2506 : Des cathos exigent la reprise des messes, la réponse d'un Cardinal !

 Il se trouve des catholiques pour réclamer avec insistance l'autorisation de pouvoir retrouver "leur messe". Ils argumentent en assurant qu'avec eux, il n'y a aucun danger. Mais le Conseil d'Etat en a jugé autrement, ainsi que le gouvernement. Et on peut les comprendre, quand "Ouest-France" d'hier mercredi fait savoir que "la communauté charismatique de l'Emmanuel (présente en Vendée) a accueilli un rassemblement de catholiques du Grand Ouest sans demande d'autorisation préalable, alors que tout rassemblement de plus de dix personnes sur la voie publique ou dans un lieu ouvert au public devait en faire l'objet, explique la préfecture. (...)  A la Chapelle-Montligeon, dans le Perche ornais, du jeudi 22 au  dimanche 25 octobre, (...) une retraite spirituelle a réuni 190 personnes, qui sont ensuite reparties chez elles.  Mais le virus ne plaisante pas et, le 28 octobre, des participants en ont développé les symptômes. Bilan à ce jour : quatre personnes contaminées, dont une décédée et une autre encore en réanimation."

L'on peut comprendre la douleur de ces catholiques qui s'estiment privés de leur rencontre avec Jésus-Eucharistie !  Mais quel mauvais signal lancé à la société, que ces manifestations aux portes des églises, qui ont indigné nombre de nos concitoyens, ou des rassemblements tels celui de l'Emmanuel, tenus sans demande d'autorisation !  Pas facile d'y voir clair...  Aussi, je vous propose quelques extraits d'une belle interview, le 23 octobre dernier, par le jésuite Antonio Spondaro, d'un proche du pape François : le cardinal Mario Grech, de l'île de Malte, secrétaire du Synode des évêques.  Merci à Sr Emmanelle et à Marie-France, de Fontenay-le-Comte, ainsi qu'à Bernard Robert, de la Flocellière-Sèvremont, qui m'ont fait parvenir ce document.

Mgr Grech, l'Eglise a été touchée par cette suspension de toute activité et les célébrations liturgiques publiques n'ont plus été autorisées.  Quelle a été votre réflexion en tant qu'évêque, en tant que pasteur ?

Si nous prenons cela comme une opportunité, cela peut devenir un moment de renouveau.  La pandémie a mis en lumière une certaine ignorance religieuse, une pauvreté spirituelle.  Certains ont insisté sur la liberté de culte, mais peu de choses ont été dites sur la liberté dans la manière de prier.  Nous avons oublié la richesse et la variété des expériences qui nous aident à contempler le visage du Christ.  Certains ont même dit que la vie de l'Eglise avait été interrompue !  Et c'est vraiment incroyable.  Dans la situation qui a empêché la célébration des sacrements, nous n'avons pas réalisé qu'il y avait d'autres manières de faire l'expérience de Dieu.

Dans l'Evangile de Jean, Jésus dit à la Samaritaine : "L'heure vient où vous n'adorerez le Père ni sur cette montagne ni à Jérusalem. (...)  L'heure vient, et c'est maintenant, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité, car tels sont les adorateurs que le Père recherche." (Jean 4/21-23) La fidélité du disciple à Jésus ne peut être compromise par l'absence temporaire de liturgie et de sacrements.  Le fait que de nombreux prêtres et laïcs soient entré en crise parce que, tout à coup, nous nous sommes retrouvés dans la situation de ne pas pouvoir célébrer l'Eucharistie "coram populo" (en présence du peuple) est en soi très significatif. Pendant la pandémie, un certain cléricalisme est apparu, même via les réseaux sociaux.  Nous avons été témoins d'un degré d'exhibitionnisme et de piétisme qui a plus à voir avec la magie qu'avec une expression de foi mature.

Quels aspects de la vie de l'Eglise ont émergé de cette période contrastée ?

(...)  Ce serait un suicide si, après la pandémie, nous revenions aux mêmes modèles pastoraux que ceux que nous avons pratiqués jusqu'à présent. Nous dépensons une énergie énorme à essayer de convertir la société sécularisée, mais il est plus important de nous convertir nous-mêmes pour réaliser la conversion pastorale dont le pape François parle souvent.

Je trouve curieux que beaucoup de gens se soient plaint de ne pas pouvoir recevoir la communion, mais bien moins se sont inquiétés de savoir comment se réconcilier avec Dieu et son prochain, comment écouter et célébrer la Parole de Dieu et comment vivre une vie de service.

En ce qui concerne la Parole, nous devons donc espérer que cette crise sera pour nous, en tant qu'Eglise, un moment opportun pour remettre l'Evangile au centre de notre vie et de notre ministère.  Beaucoup sont encore "analphabètes de l'Evangile" !

                (demain vendredi, suite et fin de cette interview)


mercredi 18 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2505 : Vu du Mali : "Sans la Fraternité, la liberté s'affaiblit !" (pape François)

 La Fraternité

Un 14 juillet, vous êtes bien d'accord que c'est le jour par excellence où l'on doit, non seulement fêter la Fraternité, mais surtout, la vivre ; où l'on se doit de se comporter le plus possible en conformité avec ses idéaux... Eh ben non, ce n'est pas toujours comme cela que ça se passe. Voici ce dont j'ai été témoin lors de mon premier 14 juillet en Afrique, à l'ambassade de France à Bamako.

Le Pére Blanc avec lequel je faisais équipe m'avait dit : "On ira ensemble à la réception à l'ambassade, à  laquelle nous avons été invités. Tu me diras ce que tu en penses." Nous voilà partis. A l'entrée de l'édifice, nous sommes reçus avec plein d'égards. il faut dire que le Père Blanc était en gandoura. Beaux salons, belles tables recouvertes de nappes blanches et de jolies fleurs, avec de belles bouteilles qui nous attendaient, ainsi que plein d'appétissants petits fours.  Pas mal de Blancs présents, des expat en majorité, et quelques Africains, des personnalités locales sans doute.  Discours de l'Ambassadeur, musique de la Marseillaise et hop, on débouche le champagne, qui coule à flots.

Le Père Blanc m'entraîne alors à l'arrière, dans le fond du jardin de l'ambassade ; là, on retrouve un certain nombre de Maliens, discutant gaiement. Il faut dire que, chaque année, et c'est très bien, l'ambassade invite aussi les anciens combattants de la 2° guerre mondiale, qui faisaient partie des "troupes coloniales". Là, changement de décor : pas de belles tables ornées, mais quelques planches, posées sur des tréteaux, assez loin du regard des invités "officiels". Et sur ces tables de préau, des bouteilles de jus de fruit "moyen", et même du vin !!!  Un vin rouge tout ordinaire, à la limite de la piquette ; mais pas de petits fours. Et pour fraterniser avec eux, qui s'étaient battus pour la France et pour laquelle un certain nombre de leurs copains étaient morts 30 ans auparavant, aucun Blanc, sinon nous deux. J'avoue que j'ai eu honte ! Le Père Blanc m'a dit : "Tu vois ?  En Afrique, il y a toujours deux mondes, qui ne trouvent pas le moyen de se rencontrer."  Et il a ajouté : "Tous ces beaux discours, où l'on se gargarise des mots "liberté, égalité, fraternité", tu sais comment on appelle ça en Afrique ?  "Faire du bruit avec sa bouche.

Tandis que je bafouillais encore le bambara, le Père Blanc, qui le parlait parfaitement, ce qu'aucun des Blancs présents n'était capable de faire, tout diplômés, décorés, intelligents (?) qu'ils étaient, lui par contre engagea une conversation animée et joyeuse avec ces anciens combattants, musulmans pour la plupart, heureux de nous voir tous les deux les avoir rejoints, ce qui semblait leur mettre un peu de baume au coeur.

Vous allez me dire qu'aujourd'hui encore, je suis vraiment négatif et pisse-vinaigre, par rapport à la France, à la colonisation, au "beau travail" qui s'est fait en Afrique...  Mais enfin, soyons réalistes. On a trop longtemps mis toutes ces réalités, inconnues en France, sous le tapis, pour nous donner une image plus belle que celle que l'on mérite. Ceci est insupportable, et en contradiction totale avec l'Evangile, avec le message de Jésus, que vient de nous rappeler le pape François à travers sa récente encyclique :

- n° 1  :  "Il invite à un amour qui surmonte les barrières de la géographie et de l'espace."

- n° 4  :   être "libéré de tout désir de suprématie sur les autres"

- n° 8  :   "faire renaître un désir universel d'humanité."

- n° 95 :  "Jésus nous disait : "Tous, vous êtes des frères." (Matthieu 23/8)

- n° 103 : "La fraternité a quelque chose à offrir à la liberté et à l'égalité."

Fin du voyage, au moins pour l'instant. Avec mes excuses auprès de ceux que j'aurais pu blesser. En les invitant à étudier notre histoire au-delà des lieux communs habituellement propagés !

Un souhait de ma part, en terminant ce triptyque "à la sauce malienne" à propos de notre devise nationale : puisse notre pays, la France, retrouver plus de cohérence entre ses idéaux et son action !  Alors, mais alors seulement, elle méritera le beau titre de "pays des lumières", et de "nation des Droits humains" !  Beaux titres qui, dans ce cas, ne seront plus usurpés !

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Ce même mercredi, je rajoute deux remarques à ce billet :

-  Bernard Valetes, dans son édito du 6 novembre à "L'Echo de l'Ouest"  :  "Le passé rattrape toujours ceux qui croient pouvoir s'en affranchir."

Corinne Renou-Nativel, dans son article à propos des "gens du voyage" et de Willian Acker, autour du rejet dont ils sont les victimes à travers par exemple leurs aires d'accueil et autres, voir "La Croix" de ce mercredi, page 25 entière : "Le racisme imprègne la majeure partie de la société française." "(...) La France n'a jamais réussi à reconnaître et intégrer la diversité de sa population." (W. Acker)

 

mardi 17 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2504 : Où en sommes-nous par rapport à nos idéaux républicains français ? (suite)

Deux ou trois personnes m'ont dit : "c'est drôle que tu parles de choses comme ça, les histoires de la colonisation, alors qu'on a tous ces problèmes de la Covid sur le dos..."  C'est vrai, leur ai-je répondu, et on ne les oublie pas !  Mais d'autres aussi m'ont remercié de parler d'autre chose que du confinement. Voilà pourquoi, ce matin encore, et aussi demain, je vous sors un peu, et je vous emmène faire un petit tour au Mali.

 

 La France sait faire des commémorations : le 100° anniversaire de la guerre de 14-18, les 200 ans de la Révolution, etc.  Mais je me suis toujours demandé, de façon plus instante encore lorsque je vivais à l'étranger, pourquoi, lors de telles évocations, l'on n'organisait pas en même temps un genre de débat avec l'ensemble du peuple français, d'une façon qui aurait été à inventer. Afin de profiter de l'occasion par exemple pour faire le point sur la façon dont notre République a été fidèle ou non à ses idéaux de liberté, d'égalité et de fraternité...  Ou bien on n'y a pas pensé, ou peut-être cela a-t-il semblé superflu, à moins que nous ayons eu peur de regarder notre histoire et notre vécu bien en face ?

Hier, je me suis exprimé à propos du premier mot de notre devise républicaine, la liberté ; et cela, vu du Mali, à propos de l'invasion de la région, puis de l'occupation de territoires immenses, privant les habitants de liberté pendant près d'un siècle, en contradiction totale avec notre idéal républicain. Pourquoi ? comment cela a-t-il pu être possible ?  Je continue donc cette réflexion aujourd'hui autour de l'égalité ; demain, je poursuivrai avec la fraternité. 

L'égalité

Un jour, en pleine brousse, dans ma vieille 2 CV, qui avait près de 100.000 kms, mais, vaille que vaille, roulait toujours, j'ai pris en stop un gendarme en tenue, qui semblait sortir de nulle part. La piste était horrible et très longue. Nous avons passé beaucoup de temps ensemble et eu le temps de bien échanger. A un moment, ce gendarme m'a posé la question suivante : "avez-vous été bien accueilli en arrivant au Mali ?"  Je lui ai répondu : "Accueil extra ! Comme si je faisais partie de la famille.  Cela m'a beaucoup surpris, et cela a été pour moi une découverte merveilleuse." Il me demande alors : "à la douane, avez-vous eu des problèmes ?  Est-ce que les douaniers ou les policiers vous ont fait des histoires ?" "Non, pas du tout ! Je me souviens qu'ils m'ont souhaité la bienvenue. Ils n'ont même pas ouvert ma valise."  "Et puis, poursuivit-il, les premiers jours, comment ça s'est passé ?"  "Je suis arrivé à l'aéroport de Bamako à trois heures du matin (suite à des incidents d'avion qu'il serait trop long de narrer ici), je n'avais pas pu avertir, si bien que personne n'était venu à l'aéroport pour me prendre en charge. Une famille de Maliens, voyant mon désarroi (je n'avais pas d'argent malien), m'a invité à prendre le même taxi qu'eux, et ils m'ont payé le transport."

J'arrête là ce fait. Le gendarme m'a alors raconté son arrivée à Roissy : complètement l'inverse de ce que je venais de lui décrire !  Je résume : il disposait pourtant des papiers en règle, avait cette profession de gendarme qui pouvait faciliter son passage ; cependant, il a eu droit à toute sorte de contrôles, soupçons, vexations, mots à la limite méprisants ; les choses ont traîné, il ne savait pas pourquoi, ne comprenait pas exactement tout ce qu'on lui disait ou demandait...  Je n'en dis pas plus, vous devinez la situation. Et sa question alors, qui m'a laissé honteux et sans voix : "pourquoi une façon de faire si méprisante ?  Pourquoi une telle inégalité de traitement ?"  Vous allez me dire : "c'est un cas particulier ; il ne faut pas juger la France sur de tels cas." Vous avez raison ; mais un seul de ces cas , c'est déjà de trop !  Car de telles façons de se comporter, en tant que Français, sont en contradiction totale avec ce qui figure en tête de notre  Constitution, à savoir :                   

      "Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits."   "Paroles, paroles..."

Pauvre France !  Je repensais à tout cela, samedi dernier, en méditant le texte de la liturgie du jour, tiré de la 3° lettre de saint Jean ; et même si cela a été écrit dans un contexte tout différent :

"Bien-aimé, tu agis fidèlement dans ce que tu fais pour les frères, et particulièrement pour les étrangers. En présence de l'Eglise, ils ont rendu témoignage à ta charité ; tu feras bien de faciliter leur voyage d'une manière digne de Dieu."

Heureusement, et je vous laisse développer la chose, de nombreuses personnes sauvent, jour après jour, l'honneur de notre pays, et aussi celui de l'Evangile : Pastorale des migrants et réfugiés, Secours Catholique, ACAT, Cimade, navire SOS Méditerranée, jumelages équitables, action de Cédric Herrou dans la vallée de la Roya, de courageux militants de nombreuses associations donnent le meilleur de leur coeur de Français en faveur de l'égalité entre tous les humains ! Que de Légions d'honneur qui se perdent ! Mais en voudraient-ils ?