Bienvenue !

Vous avez des choses à dire...
Vous vous posez des questions, pour donner un sens à votre vie...
Vous cherchez un espace d'échange convivial pour exprimer ce que vous ressentez...
Vous attendez des réponses à vos questions...


...Alors, en réponse à vos attentes, Olivier Gaignet vous propose de vous exprimer librement.
Ici, tout pourra être dit dans les limites de la courtoisie et du respect mutuel.

Merci d'avance de votre participation.


Depuis novembre 2007, Olivier Gaignet partage sur son blog ses réflexions sur Dieu et sur l’Eglise. bien sûr,
mais aussi sur la marche du monde. Il nous invite à réfléchir à des thèmes aussi essentiels que : notre société, les autres religions,
la télé, la politique, l’art, sans oublier ses propres paroissiens.
Les billets des cinq premières années (de novembre 2007 à septembre 2012 )ne figurent plus sur ce blog. Pour les consulter, se référer aux cinq volumes intitulés: "Ma paroisse.com", que vous pouvez vous procurer en envoyant un mail à : olivier.gaignet@yahoo.fr



dimanche 31 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2387 : Une Pentecôte qui nous déconfine enfin !

Chaque jour, sur ce blog, en ce moment, nous cheminons, de religion en religion, dans le grand souffle de l'Esprit, présent et vivant aussi bien en notre temps que jadis à Chavouot ou sur la place publique à Jérusalem lors de la 1° Pentecôte.

Aujourd'hui, c'est François, prêtre aux Sables d'Olonne, de la congrégation des Pères Rédemptoristes, lui aussi membre du Conseil d'administration de l'association interreligieuse "Dialogue pour la Paix", qui nous partage ce que représente pour lui la fête de Pentecôte.

                                                                      ****

Les chrétiens ont vécu Pâques dans le confinement : églises et temples fermés comme l'étaient les synagogues et les mosquées.  Il n'en sera pas ainsi à la Pentecôte, même si des règles sanitaires strictes s'imposeront : distanciation, port du masque... Des chrétiens nombreux reprendront avec joie le chemin de leur église ou de leur temple pour faire communauté et partager ensemble la Parole et le Corps du Seigneur.  Bientôt, synagogues et mosquées accueilleront, elles aussi, leurs fidèles.

Cette mise à l'épreuve imposée par la covid-19 durant ces temps forts de notre année liturgique est un peu à l'image de ce qu'ont vécu les disciples eux-mêmes à la suite de la mort de leur maître crucifié.  Apeurés, ils ont pris soin de verrouiller les portes par crainte d'être reconnus et pourchassés en tant que porteurs de ce virus si contagieux qui prône tout à la fois la liberté de conscience, l'égale dignité de toute personne humaine et l'humble proximité d'un Dieu qui s'est fait l'un de nous pour nous dire combien tous, nous avons un prix infini pour lui.

Et quand Jésus leur est apparu au matin de Pâques, victorieux de la mort, il a fallu aux apôtres un temps de mûrissement pour que cesse leur peur et que naisse en eux le désir fou de partager avec d'autres l'incroyable révélation de ce "Dieu de tendresse et de pitié, lent à la colère, riche en grâce et en fidélité" (Exode 34,6).

Ainsi, Pâques et Pentecôte forment un tout que nous ne pouvons séparer.  La Pentecôte, c'est Pâques à son dernier sommet.  Ces deux fêtes ne sont que l'expression d'une même réalité : Christ ressuscité nous donne en abondance son Esprit et fait de nous ses témoins.  Le bourgeon pascal a gonflé et mûri.  Aujourd'hui, il éclate.

Mais cet Esprit est donné à des gens apeurés, à des gens qui ont verrouillé leurs portes, tant est grande leur angoisse.  Seul l'Esprit divin aura raison de leur crainte.  A l'occasion de sa venue, Luc, dans les Actes des Apôtres, fait état d'un "bruit pareil à celui d'un violent coup de vent" qui remplit toute la maison où se tenaient les disciples.  Il aura fallu cette tempête pour secouer leurs esprits figés et délier leurs langues muettes.  Une pluie de feu était nécessaire pour embraser leurs coeurs glacés de peur.  Seul l'Esprit de Dieu était capable de leur faire affronter le vent du large afin de rejoindre tous ces peuples si divers, disséminés sur la terre.

Les différences de nos cultures et de nos sensibilités, aimons-les et respectons-les. L'arc-en-ciel, qui dessine un demi-cercle flamboyant dans le ciel, tire sa beauté du chatoiement de toutes les couleurs.  Que l'Esprit de Pentecôte nous aide à nous ouvrir à l'universel en sachant nous enrichir mutuellement de ce que vit chacun de nous.  Cet Esprit nous rassemble au-delà de nos diversités de langues, de mentalités et de croyances.  Il nous élève vers l'unité même de Dieu.

samedi 30 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2386 : Parole d'un responsable de l'Eglise Protestante Unie sur la Pentecôte

Ce blog se veut une véritable plate-forme d'expressions, venant de tous horizons.
En ces jours, aussi bien de l'Islam que du Judaïsme, du Protestantisme à présent.
C'est le monde entier qui vient à notre rencontre.
Pour nous déconfiner de nos petits sentiers parfois étriqués.
Pour nous aider à sortir de nous-mêmes, et à avancer en frères et soeurs sur un commun chemin de Fraternité !
Aujourd'hui, en cette veille de Pentecôte, c'est Christian, en responsabilité sur la Paroisse de la Vendée-Ouest, au sein de l'Eglise Protestante Unie, qui nous partage un aperçu à propos de la fête de Pentecôte.
On verra dans cette description les liens profonds qui unissent le Judaïsme et le Christianisme.

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C'est, après la Pâque, la deuxième des grandes fêtes annuelles des Israélites qui jalonnaient l'année agricole au rythme des travaux des champs.

C'était à l'origine la fête de la Moisson, sanctifiée par l'offrande à Dieu des premiers fruits.
On la célébrait le cinquantième jour après l'offrande de la première gerbe d'orge, c'est-à-dire la fête des Azymes ; d'où le nom venu du grec pentecostè, cinquantième, employé dans les livres tardifs.

Pour info, le pain "azyme", c'est le pain sans levain que les Juifs consommaient pendant la semaine de la Pâque, en souvenir de la sortie d'Egypte.

On comptait "sept semaines, des semaines entières", après que la faucille avait été mise dans les premiers blés, à partir du premier sabbat qui suivait la Pâque ; aussi la fête est-elle appelée encore "fête des semaines", en hébreu chavouot.

Outre les prémices des moissons, on faisait des offrandes et des sacrifices, on tenait une assemblée solennelle et on se dispensait de toute occupation :  c'était une fête joyeuse où l'on se réjouissait devant Yahvé.

Comme pour la fête des Azymes, à la fête agraire vint rapidement s'ajouter une commémoration historique ; celle ici de la promulgation de la Loi au Sinaï et de la conclusion de l'Alliance, peut-être dès le règne du roi Asa, 10 siècles avant notre ère.

Au matin de la fête juive de Pentecôte, alors que nombreux étaient les Juifs de la Diaspora présents pour la fête à Jérusalem, se réalise la promesse que Jésus a faite à ses disciples avant de les quitter : ils reçoivent l'effusion, le don de l'Esprit-Saint.

Comme lors de la théophanie du Sinaï que les Juifs célébraient en ce jour, l'Esprit se manifeste par des signes audibles et visibles : on entend le bruit d'un grand coup de vent et des langues de feu se posent sur la tête des apôtres ; aussitôt, tous se mettent à parler dans les langues des Juifs qui au bruit s'étaient rassemblés.

Mais l'effusion de l'Esprit confère surtout aux apôtres l'intelligence de la foi et la force de persuasion pour la répandre : aussitôt, Pierre prend la parole et rappelle à ses auditeurs comment le prophète Joël avait annoncé ce jour.  Puis, il prêche la Bonne Nouvelle et les premiers baptêmes marquent la fondation de l'Eglise.

Ainsi, l'Alliance nouvelle est-elle scellée en ce jour où l'on commémore l'Alliance ancienne.  Désormais, la Pentecôte sera, dans la liturgie chrétienne, la fête de l'Esprit Saint.

vendredi 29 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85 n° 2385 : Jeûne eucharistique en temps de confinement

Suite à l'appel que j'avais lancé, dans le but de déconfiner un peu ce blog, afin qu'il ne soit pas centré seulement sur ma personne, je reçois de temps en temps des contributions extérieures, que je me fais une joie de vous transmettre.  Ce blog se veut en effet un lieu de parole partagée.

Aujourd'hui, c'est une militante du CMR (Chrétiens dans le Monde Rural), d'un département de l'Ouest de la France, très engagée dans sa paroisse comme dans des actions de solidarité, qui nous fait part de son ressenti à propos de cette période de jeûne eucharistique que nous venons de traverser.  Puisse son témoignage nourrir notre réflexion !



J’ai lu avec intérêt les articles de la newsletter du CMR, relatifs au jeûne eucharistique.
Ils donnent à réfléchir et j’ai personnellement beaucoup à prendre.
Mais je souhaitais régir car certaines prises de position, certaines expressions employées m’ont un peu heurtée.

Je partage ce qui est dit des bienfaits du jeûne : « pratique saine et sainte », ce qui est dit du fait de pouvoir retrouver une certaine intériorité.
Je partage aussi cet appel à profiter de l’expérience de ce temps si particulier pour apprendre à se dépouiller nous-mêmes de ce qui nous encombre, à dépouiller nos rites religieux également (vêtements liturgiques compris !).

Mais j’ai eu du mal à entendre parler « d’ersatz » de célébration, de curés « ignorant la vie réelle de ceux qui les écoutent », « d’idolâtrie, d’enfermement de Dieu dans des rites….. »
Je veux bien entendre que ce sont des dérives possibles.
Mais personnellement, je n’ai pas eu le même ressenti.
J’ai apprécié de pouvoir, non pas « regarder » la messe à la télévision, mais y participer réellement. J’ai prié, j’ai chanté, j’ai reçu la Parole et pu la méditer.
Je ne me suis pas sentie dans un cadre restreint, centré sur une communauté, mais au contraire élargi à l’Eglise universelle, porteuse des intentions du monde entier, unie aux malades, aux soignants à tous les acteurs en première ligne dans cette crise, soucieuse des plus pauvres et des plus isolés.
Je n’aurais pas pu prier seule durant tout ce temps. J’ai eu besoin de ces moments de communion. Communion avec tous ceux que je viens de citer. Communion partagée plus localement, avec des voisins, des personnes contactées par téléphone, des proches, auxquels il était possible de dire : « on sera en communion durant la messe de 11h ».
J’ai eu besoin d’entendre la Parole de Dieu et de participer au sacrifice eucharistique même, s’il est tout-à-fait vrai que des manques évidents sont apparus : la dimension de « peuple rassemblé » , le fait de ne pouvoir communier au Corps du Christ (c’est là que nous mesurerons les bienfaits du jeûne, lorsque nous pourrons enfin communier ensemble).
J’ai eu besoin de ces temps pour me ressourcer et puiser à cette source pour maintenir le lien avec toute ma famille, soutenir chacun dans ce qu’il avait à vivre, pour puiser la force de poursuivre d’une autre manière les missions qui m’ont été confiées en Eglise :
-        -   écoute et réconfort des personnes endeuillées pour lesquelles il a été si difficile de vivre ces sépultures, sans rites cette fois, et sans pouvoir être entourées, sans même avoir pu accompagner leurs proches dans les derniers instants.
        -   solidarité avec les personnes encore plus isolées, les malades physiques et psychologiques, particulièrement perturbés en cette période.
-        -    rôle de veilleur dans le cadre du Pôle Solidarité face aux situations difficiles engendrées ou accentuées par cette crise.
     Il est si facile de donner un coup de fil, d’envoyer un message, d’écouter, de rassurer….surtout quand on a tout son temps !. Tant d’autres l’ont fait durant cette période et ceux-là aussi je les ai portés dans la prière.
Pour moi, sans la prière et le retour à la source, comment tenir ? Comment garder la confiance, la motivation sur une longue durée ? Comment résister au repli sur soi, à la désespérance parfois ?
Alors, ce que les écrans, ou les radios, ont pu proposer pour nourrir ma foi (au niveau national ou local) m’ont permis de vivre ce temps plus « en paix » et plus « en lien ».

J’ajouterai seulement que les prêtres, comme tous, se sont trouvés face à une situation inédite et ont fait ce qu’ils ont jugé bon pour maintenir le lien, nourrir ce temps de confinement et appeler à la fraternité. Merci à eux.

jeudi 28 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2384 : En "communion" avec nos frères et soeurs Juifs qui fêtent Chavouot

Voici le message que viennent de nous adresser Hélène, membre du Conseil d'Administration du groupe interreligieux sablais "Dialogue pour la Paix", et Roland, vice-président de la synagogue des Sables d'Olonne, à l'occasion de la fête juive de Chavouot.

Bonjour à vous Tous,

J'espère que vous et vos familles avez traversé cette épreuve de confinement dans la santé et la sérénité. Quant à Roland et moi, nous nous apprêtons à fêter Chavouot à partir de jeudi soir jusqu'à samedi soir avec des amis, (2) à chaque repas pour respecter certaines distances, dans une joie relative, mais heureux après avoir passé Pâque sans amis ni famille. En effet, au vue des consignes gouvernementale,s nous n'avons pas pu encore voir nos enfants et moi ma famille. Encore un peu de patience, l'essentiel pour nous c'est que tous soient en bonne santé. Vive whattsap et Zoom!!!!!!

Je vous joins notre exposé sur Chavouot que nous avions déjà fait mais pas encore présenté. Nous espérons que cela vous intéressera, et ainsi, nous partagerons virtuellement avec vous ce moment si important pour nous. 

Merci à vous de le diffuser à tous.

Dans la joie de se revoir bientôt et surtout bonnes fêtes de la Pentecôte pour vous aussi.

A très bientôt j'espère.

Amitiés

Hélène - Roland

                                             L'OMER  -  CHAVOUOT

Le mot "Chavouot" signifie "semaines" et fait référence aux 7 semaines que comptèrent nos ancêtres entre la sortie d'Egypte et le don de la Thora.  En noere temps, nous comptons aussi les 49 jours de cette période, avec une bénédiction auparavant et une petite prière. Nous le faisons jour après jour depuis le 2° jour de Pessa'h (la Pâque) jusqu'à la veille de Chavouot.  Pas à pas, nous nous préparons de cette façon à recevoir la Thora le jour venu.  Cette période s'appelle "l'Omer"

La Thora fut donnée par D.ieu au peuple juif sur le mont Sinaï il y a plus de 3332 ans. Chaque année, lors de la fête de Chavouot, nous renouvelons notre acceptation de ce cadeau divin, c'est-à-dire notre engagement à accomplit cette grande oeuvre spirituelle.  Ce fut la 1° et unique fois que D... s'adressa à son peuple tout entier.  50 jours à peine après les avoir sortis de l'esclavage, il donna à son peuple la mission essentielle d'amener la lumière divine dans le monde. "Vous étiez au pied de cette montagne, vos grands-parents et arrière-grands-parents aussi. Les âmes de tous les Juifs, de toutes les époques, se sont réunies pour entendre les Dix Commandements de la bouche de D.ieu lui-même..."

En ce jour, D.ieu fit serment d'alliance perpétuelle avec nous et, en retour, nous lui avons juré une fidélité éternelle.  Le don de la Thora fut un événement spirituel d'une grande portée, qui marqua l'essence de l'âme juive pour l'éternité. Nos Sages l'ont comparé à un mariage entre D.ieu et le peuple juif. "Chavouot" signifie aussi "Serment".

Comment Chavouot est-elle célébrée ?

-  les femmes et les jeunes filles allument les bougies de la fête pour accueillir celle-ci, le 1° et aussi le second soir.

-  la 1° nuit de Chavouot, les Juifs de par le monde suivent la tradition millénaire de veiller toute la nuit en étudiant la Thora et en se préparant à la recevoir de nouveau le lendemain matin.

-  l'une des explications de cette coutume est que les Juifs ne s'étaient pas levés tôt le jour où D.ieu a donné la Thora au Sinaï, et il fallut que le Créateur lui-même les réveille.  Pour réparer cette erreur, les Juifs ont pris sur eux l'habitude de rester éveillés toute cette nuit.

-  il est de coutume de consommer des aliments lactés à Chavouot.

-  le second jour de Chavouot, la prière de Yizkor, à la mémoire des disparus.

-  dans certaines communautés, on lit le livre de Ruth, car le Roi David, qui quitta le monde à Chavouot, était un descendant de Ruth la Moabite.

-  tous les hommes, femmes et enfants se rendent traditionnellement à la synagogue le 1° jour de Chavouot pour écouter la lecture des Dix Commandements. Gravés sur deux Tables, ils furent déposés à l'intérieur de l'Arche Sainte, dans le Saint des Saints.

Les cinq premiers furent gravés sur la 1° Table, car ils constituent la base de notre relation avec le Créateur :

-  "Je suis l'Eternel ton D.ieu qui t'ai sorti de la terre d'Egypte."
-  "Tu n'auras pas d'autres dieux en Ma présence"
-  "Tu ne prononceras pas le nom de l'Eternel ton D.ieu en vain."
-  "Souviens-toi du jour du Chabbat pour le sanctifier."
-  "Honore ton père et ta mère."

Les cinq autres, gravés sur la 2° Table, sont le fondement de notre relation avec nos prochains :

-  "Tu ne tueras pas."
-  "Tu ne commettras pas d'adultère."
-  "Tu ne voleras point."
-  "Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton voisin."
.  "Ne convoites pas les possessions de ton voisin."

___________

         Belle fête de Chavouot à nos frères et soeurs Juifs !

mercredi 27 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2383 : Il n'y aura pas de "Primate des Gaules" (Gilles Bély)

Vous avez appris l'info qui a fait la une hier, à propos d'Anne Soupa, "candidate à l'archevêché de Lyon", pour reprendre le titre de "Ouest-France".
Gilles Bély, de la Ferrière, près de la Roche-sur-Yon, en Vendée, ancien journaliste, qui a déjà apporté trois belles contributions à ce blog (voir les billets 2321, 2341 et 2362) nous en dit plus long à ce sujet.
"L'Eglise d'après", c'est pour quand ???
Comme toujours, vos réactions seront les bienvenues !


Il n'y aura pas de "Primate des Gaules…"

Anne Soupa, théologienne et bibliste, vient de présenter sa candidature à l'archevêché de Lyon, vacant depuis la démission du Cardinal Barbarin, suite à l'affaire Preynat. C'est évidemment une provocation. Le prochain archevêque de Lyon, Primat des Gaules, ne sera pas davantage élu que les autres évêques. Il sera nommé par le Pape au terme d'une longue procédure. Qu'on imagine à la fois complexe et embarrassante en raison de la situation lyonnaise et de la personnalité du Cardinal Barbarin.

L'archevêque de Lyon est, depuis 1079, reconnu comme le Primat des Gaules, c'est-à-dire le premier parmi ses pairs. Un privilège historique, conséquence de la proximité entre le pouvoir temporel et l'Eglise, qui n'a pas de valeur hiérarchique. Il n'est pourtant pas négligeable : la parole du Primat des Gaules en impose de fait à celles du Président de la Conférence des évêques de France, de l'Archevêque de Paris et de tous les autres évêques. Il est nécessairement un homme très médiatisé et le siège de Lyon a de fait été donné à des archevêques de grande réputation, comme les cardinaux Gerlier et Decourtray, ou encore le Vendéen Louis-Marie Billé.

Anne Soupa avait été, voici quelques années, personna non grata dans notre diocèse. Elle y était pourtant venue ensuite pour une conférence. Bien sûr, elle n'envisage pas de coiffer la mitre, ni de présider les célébrations dans la Primatiale Saint-Jean ou à la basilique de Fourvière…

Elle attire l'attention sur une distinction possible - et peut-être souhaitable - du ministère ordonné de l'évêque, successeur des apôtres, et de la gouvernance d'un diocèse. Il n'y a donc là aucune revendication pour l'ordination de femmes.

Ce courrier spectaculaire  n'obtiendra aucune réponse officielle, il est contraire au droit canon. Il a surtout pour objectif de faire prendre conscience du fossé qui existe - et peut-être se creuse - entre la place majeure que les femmes ont prise dans la vie de l'Eglise et le peu de reconnaissance qu'elles recueillent. Dans toutes nos paroisses, il est facile d'établir le pourcentage de femmes dans toutes les fonctions : la catéchèse, l'accompagnement des familles en deuil, les sépultures, les permanences, le chant, l'entretien de l'église, le secrétariat, l'action caritative… et j'en passe. Comment notre Eglise fonctionnerait-elle sans elles ?

Je connais le curé d'une paroisse difficile de la banlieue parisienne. L'équipe de trois prêtres qu'il anime s'investit totalement dans le ministère ordonné. Mais c'est une femme qui, avec une équipe, "dirige" et gère de fait la vie quotidienne de la paroisse. Et cela se passe bien. Donc, ce n'est pas une utopie…

Il n'y aura donc pas de "Primate" des Gaules… ce qui ne serait d'ailleurs pas très élégant, ni du meilleur goût.  Mais il y aura eu au moins une voix, une femme qui s'est levée pour déconfiner notre Eglise. Il n'est pas interdit de l'espérer.
                                                                                                                        Gilles Bély


mardi 26 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2382 : "La prière, c'est avant tout une rencontre" (Denise, une habituée de ce blog)

Lorsque j'ai mis en ligne le billet, vendredi dernier (n° 2378), où il était question de Dieu considéré parfois comme "bouche-trou", je me suis dit que cela allait peut-être surprendre et déconcerter certains. Mon but était de nous inviter, moi y compris, à nous poser des questions par rapport à notre façon de concevoir le rôle de Dieu dans nos vies. L'une d'entre vous, Denise, a envoyé alors un commentaire, que vous avez pu consulter, et qui complétait bien ce billet.  C'est un peu comme cela que je conçois le rôle de ce blog : je lance des pistes, et alors, c'est à vous, si vous le jugez bon, de venir apporter des précisions, d'utiles compléments.

Par mail, Denise m'écrivait également ceci : "Pour moi, il n'y a pas de mauvaise prière ; la prière, c'est avant tout "une rencontre".  Ceci m'a donné l'idée de poursuivre cette réflexion à propos de la prière.

En fait, soyons francs, il nous arrive fréquemment de faire part à Dieu de nos soucis : j'aimerais avoir un nouvel emploi, réussir un examen, que ma fille puisse être heureuse, que mon mari guérisse de sa maladie, etc...  Les longues listes de nos prières sont presque infinies... Infini des demandes, infinies d'espérance...

Problème : beaucoup de ces demandes ne sont pas exaucées... Alors, on en rajoute... : chapelets, pèlerinages, neuvaines... Toujours rien !  Est-ce parce que Dieu n'entend pas ?  Parce qu'il n'a pas le temps de s'occuper de nous ?  Parce qu'il nous punit à cause de nos imperfections ?  Ou peut-être parce qu'il n'existe pas...

Alors, on essaye de trouver des excuses au Bon Dieu, parce qu'il ne fait pas ce qu'on attend de lui, ce qu'on espérait de lui...  Et pourtant, Jésus nous a bien dit, et encore dans l'évangile de samedi dernier, il nous disait : "En vérité, je vous le dis : tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous le donnera (...) Demandez, et vous recevrez, et votre joie sera parfaite." (Jean 16/23-24)

Oui, nous avons raison de demander, nous avons raison de prier. Mais il faut également se souvenir que la prière, cela ne peut consister à demander à Dieu de changer la réalité, de la tordre, en le priant de faire que les choses se passent autrement.

La prière en effet, c'est d'abord prendre le temps de rencontrer le Seigneur ; on vient vers lui avec tous nos soucis, on les lui confie, et alors, on les dépose en lui, on s'abandonne à lui. Car la prière, c'est une question d'intimité, de relation avec le Seigneur.

Que va faire alors le Seigneur ?  Son désir, c'est que nous puissions vivre unis à lui, dans les événements heureux ou malheureux. La prière, au-delà de la liste de nos demandes à Dieu, c'est de lui dire, à la suite de Jésus : "Seigneur, je te fais confiance ; fais pour moi, ou pour tel autre, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux." Cf à Gethsémani : "Tombant la face contre terre, Jésus priait en disant : "mon Père, s'il est possible, que ce calice s'éloigne de moi ! Pourtant, non pas comme je veux, mais comme tu veux !" (Matthieu 26/39)

Prier, c'est alors abandonner toutes nos listes, pour entrer dans la confiance, totalement. C'est trouver auprès du Seigneur la force de traverser la vie, d'assumer ce qu'il nous faut vivre en nous appuyant sur le Seigneur.  En se rappelant ce que disait frère Roger, de Taizé : "Ce qui te préoccupe, Dieu s'en occupe !"

Je vous citais vendredi cette réflexion de St Augustin : "je ne prie pas Dieu pour l'instruire (l'instruire à propos de ce qu'il serait bon qu'il fasse), mais pour me construire."

On ne fait pas des prières, on est fait par la prière !

Le Seigneur veut que l'on soit unifié intérieurement. La prière nous donne alors la force intérieure pour vivre ce que nous avons à vivre, dans le secret de notre rencontre confiante avec Dieu, lui qui ne veut que notre bien !

Demander à Dieu de pouvoir le rencontrer de façon toujours plus intime, pour affronter notre vie, cette prière là est toujours exaucée !


lundi 25 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2381 : "La Paix et la miséricorde de Dieu sur vous !" (Yasmine)

Voici le témoignage d'une jeune femme, Yasmine, qui nous partage ce qu'elle a vécu, et dans quel esprit, pendant cette période du Ramadan.
Yasmine fait partie du Conseil d'Administration de l'association "Dialogue pour la paix", groupe interreligieux présent et actif, comme à la Roche-sur-Yon, sur le Pays des Olonnes.

dimanche 24 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2380 : La Messe : échange, repas, lavement des pieds

Un communiqué de presse du Ministère de l'Intérieur, daté de ce vendredi 22 mai, vient d'annoncer la possibilité de reprendre les cérémonies religieuses. Nombre de catholiques ont poussé un "ouf" de soulagement. Dès hier soir samedi, à 19h, une messe était célébrée en l'église principale de Talmont-St Hilaire, et deux autres aussi sur Talmont ce dimanche matin ; selon les normes en vigueur bien sûr: port d'un masque, respect des distances... Pour les participants, bonheur de se retrouver, de pouvoir célébrer le Christ ressuscité, avec d'autres, en chair et en os ; avec la joie de recevoir le pain qui fait vivre et de se mettre ensemble en attente de l'Esprit de Pentecôte.

Le temps de ce jeûne eucharistique "hors normes" a été bien long, et bien difficile à vivre ; assez frustrant, pas aisé à comprendre pour certains, et même un peu conflictuel parfois, selon l'analyse que l'on en faisait... Cependant, quoiqu'il en soit, chacun de nous a fait un chemin !  Il nous a fallu revoir notre relation au Christ, à l'Eglise ; mais aussi à notre paroisse et avec tous les frères et soeurs qui partagent notre foi.

En tout cas, l'essentiel, c'est que, durant ces semaines pendant lesquelles nous nous sommes sentis "sevrés" de la messe, cela nous a obligés à repenser notre rapport avec l'eucharistie.  Ainsi, j'ai été frappé d'entendre des réflexions très positives du genre de celles-ci : "Je me suis mis à suivre la messe en semaine, celle de Lourdes, ou celle avec le pape à Rome, moi qui ne vais à la messe que le dimanche habituellement ; et cela m'a beaucoup apporté."  Ou encore : "J'ai beaucoup apprécié la simplicité des messes du "Jour du Seigneur" ; cela m'a fait du bien !" Autre réaction : "Le fait d'avoir été privé de l'eucharistie m'a entraîné à me demander ce que cela représentait pour moi."  Etc...

Ce qui serait bien, c'est que chacun de nous puisse ainsi partager ce que cette période lui a permis de redécouvrir quant au sens profond de la messe. Pour mon compte, trois aspects me sont apparus plus essentiels que jamais, à partir de ce qui s'est vécu lors de l'Eucharistie du Jeudi-Saint :

-  un temps d'échange
On est tellement heureux de rencontrer nos frères et soeurs à l'occasion de la messe ; avant et à la sortie, de partager joies et soucis ; de se reconnaître tout petits devant Dieu, mais plus encore, de chanter sa gloire et sa bonté ; d'échanger avec Dieu, dans un vrai coeur à coeur, une vraie rencontre, un vrai partage avec lui : écouter ce que Dieu veut nous dire, avec la même avidité que les disciples suspendus aux lèvres de Jésus lors des échanges qu'ils ont eus avec lui au moment de la Cène.

-  le temps d'un repas
Avec une double nourriture : celle dont nous n'avons pas manqué durant ce temps de confinement, à savoir la Parole de Dieu. Qu'en avons-nous fait durant ces dernières semaines ? Nourriture à la portée de chacun, à ne pas consommer seulement pendant les messes, mais à relire chaque jour ; même si personne alors n'est là auprès de nous pour nous la lire ou nous y faire réfléchir comme durant les messes...
Et quel bonheur de recevoir le corps du Christ, le pain pour la route, la semence de vie éternelle. "Celui qui mange ma chair vivra pour toujours." (Jean 6/54)  C'est alors le Christ qui vient habiter en nous.

-  le lavement des pieds
Vous allez me dire : "mais, il n'y a pas de lavement des pieds à nos messes !"  Et c'est peut-être cela qui est dommage... En tout cas, lors de chaque messe, nous ne devons jamais oublier que lors de la Cène, lors de "l'unique Messe de l'histoire", il y a eu le temps du lavement des pieds. N'oublions jamais que, lors de cette messe unique, Jésus nous a rappelé que le rôle de l'Eglise, et donc des chrétiens, c'était d'être à genoux devant l'humanité. Cela fait partie de la messe, donc, que de nous mettre au service du monde, particulièrement des plus défavorisés. Et nous avons toujours à nous souvenir qu'il ne peut pas y avoir eucharistie sans service ni engagement, "pour que tous aient la vie en abondance." (Jean 10/10)

Nous nous sommes dit souvent, pendant le temps de confinement : "après, les choses vont changer..." Puisse-t-il en être ainsi, dans notre façon de voir et de vivre la messe désormais !  Même si ce ne sera pas tout simple, alors que nous abordons, avec les lourdeurs du passé récent, l'inconnu du déconfinement...


samedi 23 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2379 : Un témoignage sur le mois du Ramadan vécu en confinement

 Christiane a fait passer aux membres du groupe interreligieux "Dialogue pour la paix" de la Roche-sur-Yon et du Pays des Olonnes ce magnifique témoignage, qui va nous aider à comprendre comment peut se vivre le Ramadan.
 Avec l'accord de cette dame anonyme, quel bonheur de vous le partager, à l'occasion de la fin, demain, de ce mois de jeûne et de prière !
Merci à cette amie musulmane, et toutes nos amitiés fraternelles à nos frères et soeurs musulmans !


Pour ma part, je n'ai pas ressenti de rupture d'habitudes avec les Ramadans précédents quant à la fréquentation des gens. J’ai toujours vécu ce mois dans une forme de solitude dûe au fait que je n’ai pas de famille avec qui le partager. Cela ne me dérange pas, je ne connais rien d’autre. J’ ai même fini par associer Ramadan et retraite / solitude.

Cela commence dans la nuit quand, à 4 h, je mets le réveil pour me lever avant l'aube. La maison est silencieuse et je ne fais pas de bruit, j'évite les lumières fortes et je prépare seule mon sohour (repas d’avant l’aube). Je m’assieds et mets du Coran sur mon téléphone, c’est mon rituel depuis des années. Puis je mange et bois en l’écoutant, seule dans la nuit. Je réitère chaque jour à mon Seigneur le souhait de jeûner la journée à venir pour Lui et qu’Il puisse me faciliter cette démarche et m’en donner les fruits spirituels. 

Ensuite, je remonte dans ma chambre, fais mes ablutions et prie. Cette prière est souvent la plus douce et la plus profonde de la journée, car elle est effectuée quand tout le monde dort et aucune trépidation du monde en mouvement ne vient la perturber ou l'écourter. Enfin, je prends le Coran en français ; c’est mon moment de la journée pour le lire dans ma langue et me laisser pénétrer par son sens et par les compréhensions que Dieu voudra bien m’y révéler. 
 
Je le lis jusqu’ à ce que mes yeux se ferment et là, j’éteins pour essayer de dormir quelques heures de plus. Cela est possible le week-end ou cette année, grâce au confinement qui m’a permis de vivre ce temps à mon rythme. Quand je travaille, j’essaye aussi de cumuler plus de 4 h de sommeil pour tenir la journée ; donc, je dois écourter ce temps de lecture.

Cette année, mes journées ont eu un goût bien différent : grâce au confinement, j’ai vraiment eu la possibilité, Dieu merci, d’être en retrait, et d'aller à un rythme naturel. L'objectif était de profiter de cette rupture du temps normal pour rompre aussi avec les habitudes de distractions (écrans, sorties, etc...). Donc, j'ai pris le temps de m’imprégner de la lecture en arabe du Coran, puis de mon aspiration à en comprendre les sens... J'avais 5 traductions autour de moi et je lisais en arabe puis en français dans ces 5 traductions. Je pouvais y passer des heures ....

J’ai aussi vécu de riches moments de partages et de nourritures spirituelles grâce aux réunions en visio conférences qui m’ont permis de partager prières, rappels et conférences interactives. La lecture de livres spirituels venait ponctuer ces moments ; les autres années, je me faisais le cadeau de deux ou trois livres à découvrir durant le Ramadan. Cette année, j'ai voulu revoir aussi ma façon de « consommer » et j'ai décidé que recycler mes lectures serait bienvenu. Et effectivement, j'ai pu relire des livres déjà lus il y a quelques années avec un regard différent. Le soleil, le hamac et le chant des oiseaux ont donné un goût délicieux à ces moments livresques.

Après ces temps de lectures et rappels, je préparais le repas léger, habituel ; je ne modifie pas mon alimentation durant ce mois. Puis, je passais du temps avec mes grands enfants quand ils étaient là.

Souvent, comme ils étaient décalés avec ce confinement, ils m’ont fait le plaisir de manger en même temps que moi à la rupture. Mais parfois, quand ils n'étaient pas là,  je la vivais seule, ce qui ne me change pas du tout des autres années. J'en profite alors pour mettre une conférence (exemple les conférences si nourrissantes de Tayeb Chouiref). .Au moment de la rupture, je fais des invocations car le moment est très propice, puis je bois un verre, mange une datte et vais prier. Ensuite je reviens chauffer mon repas et diner. La soirée passe alors vite et le temps de ranger et de préparer rapidement la table pour le sohour du lendemain, il est déjà 22h30. Ensuite je prie Ichala dernière prière, puis je lis en essayant  de faire attention à ne pas m'endormir au delà de minuit pour réussir à me lever à 4 h .

Oui, vraiment le confinement fut une bénédiction spirituelle ! J’aime ce temps ralenti qui correspond à mes besoins profonds. . 

Puis, j’ai dû préparer la reprise du travail pour le 11 mai. Et là, c’est vraiment un autre défi spirituel : réussir à garder la connexion, le silence intérieur quand tout s’agite autour, va trop vite, sollicite mes émotions .... J’échoue beaucoup à garder cette bulle intérieure, mais je persévère avec l'aide de Dieu. C’est le but : réussir à être avec les hommes tout en restant avec Dieu et à n’agir et ne penser que dans Son rappel ...Si un jour, Inchallah, je progresse sur cette voie grâce à Dieu, tu le verras sans que je le montre, l'entendras sans que je le dise, le comprendras sans que je l’explique !

Pour l’instant, que Dieu m’ aide et me pardonne, j’en suis à mille lieues et heureusement que j’ai pu avoir les 15 premiers jours en confinement pour profiter pleinement de ce Ramadan dans des conditions facilitées par Dieu, j'en avais grand besoin ! 

Ce mois passe vite, il est chargé de bénédictions, et chaque année je me dis que je n'en ai pas assez profité …

vendredi 22 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2378 : "Nous n'avons pas le droit d'utiliser Dieu comme "bouche-trou" !" (pasteur Dietrich Bonhoeffer)

Vous savez qu'une des principales critiques de nombre de nos contemporains face à la croyance en un Dieu, c'est que, quand on souffre, l'idée d'un Dieu consolateur, cela fait du bien au coeur, même si c'est tout à fait une illusion : Dieu est alors considéré un peu comme comme une béquille, qu'on s'invente ; on s'appuie sur lui, pour recevoir des consolations ; et l'on s'imagine qu'un jour, au ciel, on le trouvera enfin, ce bonheur que l'on aura bien mérité, grâce à nos souffrances ici-bas et à nos prières !  C'est ce que Freud appelait : "le besoin infantile de Dieu."  Marx disait quant à lui : "Dans notre vallée de larmes, la religion, c'est l'opium du peuple." (= un palliatif qui aide à accepter les difficultés)

Si j'aborde cette question, c'est que, durant ce temps de pandémie, j'ai entendu des personnes dire : "Ah ! Heureusement qu'on est croyants car, avec tout ce qui arrive, comment on ferait pour vivre et garder espoir si on n'avait pas la foi ?"

J'ai également repéré, dans tel ou tel article, des réflexions expliquant que, si la foi se perd et si les églises se vident, c'est bien parce que les gens, "devenus adultes", n'ont plus besoin d'un Dieu pour expliquer le monde et les réalités terrestres, ni quand ça va mal, pour nous consoler.

 D'où l'étonnement de certains, quand ce n'était pas de l'ironie, quand on a vu quelques curés de paroisse, y compris en Vendée, monter dans leur clocher pour, du haut du ciel, remettre tout leur territoire paroissial dans la main du Seigneur et, pourquoi pas, faire fuir la pandémie hors de ces lieux ? S'en sont suivies des interpellations du genre : "Pourquoi tout ce spectacle ?  Vous croyez vraiment que Dieu va comme ça arrêter la pandémie ?"

Ces réactions ont au moins l'avantage de nous rappeler le vrai sens de la prière : on ne prie pas pour faire changer Dieu d'avis, pour le "domestiquer", pour le mettre à notre service, ni pour lui rappeler ce qu'il devrait faire pour nous :
-  comme l'a si bien enseigné St Augustin : "nous ne prions pas Dieu pour l'instruire, mais pour nous construire."
quant à la forme, la façon de prier, Gandhi nous apprend que "la meilleure arme, c'est la prière silencieuse."  Ou disons, si l'on préfère, celle qui ne s'impose pas par le bruit ou l'éclat ; ni par des dorures ou dans l'exhibitionnisme : "Jésus s'en alla dans la montagne pour prier." (Luc 6/12)

Nos amis Juifs sont affrontés aux mêmes objections. Comme l'écrit Pauline Bebe, femme rabbin : "pour certains, la religion est là pour les faibles. On entend par exemple : "Je considère votre synagogue comme un hôpital. Je suis content d'être suffisamment équilibré pour ne pas en avoir besoin."

Voici comment le théologien protestant Dietrich Bonhoeffer, pendu sur ordre d'Hitler, pour cause de résistance au nazisme, le 9 avril 1945 au camp de concentration de Flossenbürg, envisageait cette question ; dans des formules à la fois percutantes et énigmatiques, à lire et relire et à méditer :

Le monde a appris à venir à bout de toutes les questions importantes sans faire appel à "l'hypothèse Dieu".

Les gens religieux parlent de Dieu quand les connaissances humaines (quelquefois par paresse) se heurtent à leurs limites, ou quand les forces humaines font défaut ; ou bien pour le faire intervenir comme la force capable de subvenir à l'impuissance humaine ; bref, ils exploitent toujours la faiblesse et les limites des hommes.

Mais il m'est apparu que nous n'avons pas le droit d'utiliser Dieu comme bouche-trou.

Bonhoeffer a toujours refusé que le christianisme soir réduit à être une religion pour les faibles ou les personnes en difficulté ; mais il envisage la souffrance humaine comme une participation à la souffrance du Christ en croix : Il y a une faiblesse qui n'appartient pas au christianisme ; mais les chrétiens se tiennent près de Dieu dans sa souffrance.

Bonhoeffer met en garde ceux qui essaieraient de "prouver à ce monde devenu majeur qu'il ne peut pas vivre sans le tuteur "Dieu" : je voudrais arriver à ce que Dieu ne soit pas introduit en fraude, par un biais habilement dissimulé, mais qu'on reconnaisse tout simplement le caractère adulte du monde et de l'homme. 

En devenant majeurs, nous sommes amenés à reconnaître de façon plus vraie notre situation devant Dieu.  Dieu nous fait savoir qu'il nous faut vivre comme des êtres qui parviennent à vivre sans Dieu.  Le Dieu qui est avec nous est celui qui nous abandonne ; "mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?" (Marc 15/34)   (cf aussi le départ de Jésus lors de l'Ascension...)

L'évolution du monde vers l'âge adulte, faisant table rase d'une fausse représentation de Dieu, libère le regard de l'homme pour le diriger vers le Dieu de la Bible, qui acquiert sa puissance et sa place dans le monde par son impuissance.

Il nous faut apprendre à vivre dans le monde, non pas comme si Dieu n'existait pas, mais comme si Dieu ne nous était pas donné.

Un jour viendra où des hommes seront appelés de nouveau à prononcer la Parole de Dieu de telle façon que le monde en sera transformé et renouvelé.  Ce sera un langage nouveau, peut-être tout à fait non religieux, mais libérateur et rédempteur, comme celui du Christ. Ce sera le langage d'une justice et d'une vérité nouvelles, qui annoncera la réconciliation de Dieu avec les hommes.  Jusqu'à ce jour, la  vie des chrétiens sera silencieuse et cachée ; mais il y aura des hommes qui prieront, agiront avec justice et attendront le temps de Dieu.

Qui regarde dans la foi le corps de Jésus-Christ ne peut plus parler du monde comme s'il était perdu et séparé du Christ ; le Christ ne peut plus se séparer du monde ; le monde appartient au Christ.


 

jeudi 21 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2377 : "Je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin des temps." (Matthieu 28/20)

Depuis le début de la pandémie, on peut à bon droit se poser la question de la présence, ou de l'absence de Dieu dans ce qui vient de se passer... Mais qui d'entre nous a vu le Seigneur à l'action ? Tant de gens sont morts, trop souvent très seuls. Nombre de personnes ont perdu leur travail. Tout s'est arrêté...  On pourrait continuer longtemps comme cela à faire une lecture très négative de l'événement ; mais est-il possible d'en rester là ?  Est-ce que ce ne serait pas faire injure aux hommes et aux femmes de bonne volonté qui, innombrables sur tous les continents, ont sauvé l'honneur de l'humanité ? Par leur espérance, par leurs engagements solidaires, et parfois en famille, ou dans leur Ehpad, tout simplement...

En cette fête de l'Ascension, Jésus, au moment de quitter ses disciples de façon visible, apaise leurs craintes en leur donnant cette assurance : "Je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin des temps." Donc, au milieu de ce qui va comme de ce qui ne va pas, au plus profond de la vie de chacun comme parmi les nations, invisiblement, pour ceux qui croient en lui, Jésus est bien là, présent et agissant.  En voici quelques signes, parmi des milliers d'autres que, pour la plupart, nous ne connaîtrons sans doute jamais.

Jamy Gourmaud (C'est pas sorcier) déclarait ceci, dans le journal "La Croix" du 30 avril : "Jean-Paul Sartre, à l'évidence, s'était trompé en affirmant que "l'enfer, c'est les autres", nous en faisons ces temps-ci l'expérience quotidienne."  Me revient aussi à l'esprit cette réplique de l'acteur Vincent Cassel dans le film "Hors Normes", de Nakache : "Quand tu t'occupes de l'autre, Dieu est là."  J'ignore si ces deux personnalités ont la foi ou non, mais ce qu'ils expriment, cela sent l'Evangile !

Voici une réflexion reçue le 2 avril de la part d'une résidente en Ehpad : "Bonjour Olivier.  Je viens de voir passer devant ma porte une "procession" que je ne peux garder pour moi. Jacqueline (prénom modifié) et plusieurs aides-soignantes ont bien emmitouflé des résidents pour leur faire faire le tour de l'Ehpad, les arrêtant devant les fleurs du printemps et les jeunes frondaisons des chênes..., ou devant des portes ouvertes sur le soleil comme la mienne, pour que nous puissions échanger quelques mots.  Une vraie procession de "Fête-Dieu" : je n'ai pu m'empêcher de partager ce temps de grâce...sans vous déranger.  Je suis sûre que vous allez comprendre ce qui s'est vécu là... Oui, le Seigneur fait pour nous des merveilles !"  "Avec nous, tous les jours..."

Toujours dans le journal "La Croix", j'avais noté des "fleurs de Pâques", dans un article de Flore (Fleur) Vasseur daté du 8 avril : "Le virus pose la question de notre présence au monde. Trois pays semblent l'avoir compris : le Portugal a octroyé la citoyenneté, certes temporaire, à tous les migrants sur son sol, leur permettant ainsi d'avoir accès, entre autres, au système de soins. L'Allemagne va accueillir 1500 migrants en provenance de l'horrible camp de Moria. Il y a une seule humanité, un énorme "nous" dans lequel, incroyable, chacun compte !  Quant à l'Espagne, elle réfléchit à instaurer un revenu universel. L'unité, la réconciliation, c'est une ligne de vie."

=  Jésus présent dans les familles ; sans sa casquette, mais l'on devine les signes de sa présence. Témoin ce mail reçu mardi :   "Bonjour ! J'ai envie de vous raconter une rencontre qui m'a fait du bien : vendredi j'étais chez Juliette, la coiffeuse ...  En m'y rendant, je me disais qu'elle allait être déprimée : 2 mois, sans rentrée d'argent... Après ma question sur le confinement, elle me regarde et dit : "Que du bonheur !..." Elle m'explique comment elle a passé ce temps, avec son fils, 5 ans ; elle avait pu lui donner du temps, beaucoup de temps...  Que de joies partagées simplement, près de la nature, des animaux...  Elle aime passionnément son métier ; pourtant, elle est revenue au salon en traînant les pieds, consciente de ce qu'elle perdait dans la relation avec son fils ... Elle m'a bien parlé du manque d'argent pour me dire : "mais l'argent, qu'est-ce que c'est ?" Dernière réflexion:" Je n'aime pas les masques des clients, je ne vois pas leur sourire !" C'est beau, l'Esprit travaille..."  "Tous les jours, jusqu'à..."

A méditer : cette superbe réflexion du Paul Eluard, "le grand poète de la Résistance" (1895-1952) :
             "Il y a une autre monde, mais il est dans celui-ci."
Et Dieu aussi !
Alors, "Pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ?"...


mercredi 20 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2376 : Prière pour les oiseaux qui nous entourent !

Tandis que, pendant le temps de confinement, tous, à la campagne, et parfois aussi en ville, se réjouissaient d'entendre le chant des oiseaux dans le ciel, cela ne nous empêchait pas - et cela continue... - de nous envoyer à la figure des noms d'oiseaux : voleur, profiteur, menteur, incapable,incompétent, sans coeur, prétentieux, bon à rien, etc...

Et si on faisait une petite pause, en lisant paisiblement cette prière originale que nous offre Eric George, pasteur de l'Eglise protestante unie de France, à Versailles ?

Peut-être cela pourra-t-il nous apaiser, tout en nous invitant à regarder autrement les "oiseaux" qui nous entourent, en les portant tous dans notre intercession ; ceux dont le chant nous plaît, et les autres également ! 

Et merci à nos frères oiseaux de la nature, qui volent dans le ciel et chantent en choeur, de moins en moins nombreux malheureusement...


Dieu notre Père
Nous voulons te prier pour tous les oiseaux du monde
Et surtout pour tous ceux à qui nous donnons des noms d’oiseaux
 
Nous te prions bien sûr pour ceux que nous appelons
Mon poussin, mon canard, ma poulette
Tous ceux, qu’avec ou sans surnom, nous aimons
 
Nous te prions également pour ceux que nous appelons vautours
Et pour les faucons de guerre
Ceux-là qui croient pouvoir puiser leur force et leur vie
dans la faiblesse et la mort des autres
Donne-nous d’être face à eux des témoins vigilants
Donne-nous ton esprit de prophétie qui dénonce l’oppression
Et annonce la justice.
 
Nous te prions pour ceux que l’on appelle pigeons
Donne nous d’accepter de faire, aux yeux de ce monde, partie de ceux-là
Donne-nous de réaliser ta parole « Heureux les doux, heureux les simples »
 
Nous te prions pour les triples buses, les bécasses et les têtes de linottes
Donne-nous d’accueillir avec amour et patience les limites de nos frères et de nos sœurs
Donne-nous la lucidité et l’humour nécessaires pour reconnaître et assumer nos propres limites
 
Nous te prions pour ceux que nous voyons
Majestueux comme des aigles
Libère nous de l’aigreur et de l’idolâtrie
Et permets-nous de prendre notre place au service des autres
 
Fais sortir leur tête du sable aux autruches
Fais atterrir un peu les albatros
Donne aux coqs l’humilité
Et rend aux moineaux la dignité
 
Nous te remercions pour les colombes
Annonciatrices de paix et d’espoir
Pour les alouettes, porteuses d’espérance
Et pour les pinsons qui nous communiquent leur joie
 
Seigneur,
Que ton Royaume germe sur la terre
Et qu’il rassemble dans son feuillage
Tous ces oiseaux que nous sommes
  
 __________

A présent, j'invite chacun à relire cette prière en se demandant de quelle catégorie d'oiseaux il fait lui-même partie, et quelle suite donner à cette découverte...
C'est aussi par là que cela peut passer, le "monde d'après" ! 
 
 
 
 

mardi 19 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2375 : Message du pape François aux Travailleurs (les invisibles, ou les premiers de corvée)

Tellement préoccupés par le fait que l'on n'avait pas de messes, ce discours exceptionnel du pape, daté du jour de Pâques,adressé  aux travailleurs du monde entier, n'a absolument pas été répercuté dans notre Eglise de France.
Et pourtant !  Si le pape pouvait être entendu !
Mais cela dépend sans doute aussi de nous...
Le texte est un peu long, mais cela vaut le coup de prendre le temps d'en découvrir les richesses.
La vraie Communion, elle est là !


Chers amis,

Aujourd’hui, en pleine pandémie, je pense particulièrement à vous et je tiens à vous dire que je suis à vos côtés.

En ces jours de grande angoisse et de difficultés, nombreux sont ceux qui ont parlé de la pandémie dont nous souffrons en utilisant des métaphores guerrières. Si la lutte contre le Covid-19 est une guerre, alors vous êtes une véritable armée invisible qui combattez dans les tranchées les plus périlleuses. Une armée sans autres armes que la solidarité, l’espoir et le sens de la communauté qui renaissent en ces jours où personne ne peut s’en sortir seul. Vous êtes pour moi de véritables poètes sociaux qui, depuis les périphéries oubliées, apportez des solutions dignes aux problèmes les plus graves de ceux qui sont exclus.

Je sais que très souvent vous n’êtes pas reconnus comme il se doit, car dans ce système, vous êtes véritablement invisibles. Les solutions prônées par le marché n’atteignent pas les périphéries, pas plus que la présence protectrice de l’État. Vous n’avez pas non plus les ressources nécessaires pour remplir sa fonction. Vous êtes considérés avec méfiance parce que vous dépassez la simple philanthropie à travers l’organisation communautaire, ou parce que vous revendiquez vos droits au lieu de vous résigner et d’attendre que tombent les miettes de ceux qui détiennent le pouvoir économique. Vous éprouvez souvent de la colère et de l’impuissance face aux inégalités qui persistent, même lorsqu’il n’y a plus d’excuses pour maintenir les privilèges. Toutefois, vous ne vous renfermez pas dans la plainte : vous retroussez vos manches et vous continuez à travailler pour vos familles, pour vos quartiers, pour le bien commun. Votre attitude m’aide, m’interroge et m’apprend beaucoup.

Je pense aux personnes, surtout des femmes, qui multiplient le pain dans les cantines communautaires, en préparant avec deux oignons et un paquet de riz un délicieux ragoût pour des centaines d'enfants ; je pense aux malades, je pense aux personnes âgées. Les grands médias les ignorent. Pas plus qu’on ne parle des paysans ou des petits agriculteurs qui continuent à travailler pour produire de la nourriture sans détruire la nature, sans l’accaparer ni spéculer avec les besoins du peuple. Je veux que vous sachiez que notre Père céleste vous regarde, vous apprécie, vous reconnaît et vous soutient dans votre choix.

Comme il est difficile de rester chez soi pour ceux qui vivent dans un petit logement précaire ou qui sont directement sans toit. Comme cela est difficile pour les migrants, pour les personnes privées de liberté ou pour celles qui se soignent d’une addiction. Vous êtes là, physiquement présents auprès d’eux, pour rendre les choses plus faciles et moins douloureuses. Je vous félicite et je vous remercie de tout mon coeur. J’espère que les gouvernements comprendront que les paradigmes technocratiques (qu’ils soient étatistes ou fondés sur le marché) ne suffisent pas pour affronter cette crise, ni d’ailleurs les autres grands problèmes de l’humanité. Aujourd’hui plus que jamais, ce sont les personnes, les communautés, les peuples qui doivent être au centre de tout, unis pour soigner, pour sauvegarder, pour partager.

Je sais que vous avez été privés des bénéfices de la mondialisation. Vous ne jouissez pas de ces plaisirs superficiels qui anesthésient tant de consciences. Et pourtant, vous en subissez toujours les préjudices. Les maux qui affligent tout un chacun vous frappent doublement. Beaucoup d’entre vous vivent au jour le jour sans aucune garantie juridique pour vous protéger. Les vendeurs ambulants, les recycleurs, les forains, les petits paysans, les bâtisseurs, les couturiers, ceux qui accomplissent différents travaux de soins. Vous, les travailleurs informels, indépendants ou de l’économie populaire, n’avez pas de salaire fixe pour résister à ce moment… et les quarantaines vous deviennent insupportables. Sans doute est-il temps de penser à un salaire universel qui reconnaisse et rende leur dignité aux nobles tâches irremplaçables que vous effectuez, un salaire capable de garantir et de faire de ce slogan, si humain et chrétien, une réalité : pas de travailleur sans droits.

Je voudrais aussi vous inviter à penser à « l’après », car cette tourmente va s’achever et ses graves conséquences se font déjà sentir. Vous ne vivez pas dans l’improvisation, vous avez une culture, une méthodologie, mais surtout la sagesse pétrie du ressenti de la souffrance de l’autre comme la vôtre. Je veux que nous pensions au projet de développement humain intégral auquel nous aspirons, fondé sur le rôle central des peuples dans toute leur diversité et sur l’accès universel aux trois T que vous défendez : terre, toit et travail. J’espère que cette période de danger nous fera abandonner le pilotage automatique, secouera nos consciences endormies et permettra une conversion humaniste et écologique pour mettre fin à l’idolâtrie de l’argent et pour placer la dignité et la vie au centre de l’existence.

 Notre civilisation, si compétitive et individualiste, avec ses rythmes frénétiques de production et de consommation, ses luxes excessifs et des profits démesurés pour quelques-uns, doit être freinée, se repenser, se régénérer. Vous êtes des bâtisseurs indispensables à ce changement inéluctable. Je dirais même plus, vous avez une voix qualifiée pour témoigner que cela est possible. Vous connaissez bien les crises et les privations… que vous parvenez à transformer avec pudeur, dignité, engagement, effort et solidarité, en promesse de vie pour vos familles et vos communautés. Continuez à lutter et à prendre soin de chacun de vous comme des frères et soeurs.

Je prie pour vous, je prie avec vous et je demande à Dieu, notre Père, de vous bénir, de vous combler de son amour et de vous protéger sur ce chemin, en vous donnant la force qui nous permet de rester debout et qui ne nous déçoit pas : l’espoir. Veuillez aussi prier pour moi, car j’en ai besoin.
Fraternellement,


Cité du Vatican, dimanche de Pâques, le 12 avril 2020


lundi 18 mai 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2374 : Le confinement : découvertes, leçons, questions...

Vous êtes habitués à présent à ce que je donne la parole, de temps à autre, sur ce blog, à d'autres personnes.
Je ne sais pas ce que vous en pensez ?  Il faudra aussi me le dire, confidentiellement bien sûr ; par exemple, par mail à mon adresse qui figure sur la page de garde de ce blog.
Pour ma part, je pense que cela permet de varier un peu le style et les apports.
Mais c'est surtout une façon de donner la parole, en Eglise, ce qui est trop rare, au Peuple de Dieu ! 

Vous avez déjà pu lire des contributions de Bernard Robert ; par exemple, le mercredi-saint 8 avril, dans le billet n° 2229, il nous proposait une façon originale, mais surtout très novatrice, en ce temps de confinement, de vivre la célébration du Jeudi-saint de façon très proche de ce qu'avait pu être la Cène.

Bernard Robert, qui proposait cette démarche d'un autre type, a oeuvré un certain nombre d'années comme aumônier de la Jeunesse Ouvrière Croyante (JOC) au Mali, là ou moi-même j'avais eu la même responsabilité auparavant, durant 9 ans.
Il est actuellement prêtre coopérateur demeurant à la Flocellière, tandis que pendant son autre "mi-temps", il parcourt les 5 continents en tant qu'aumônier du MMTC : Mouvement Mondial des Travailleurs Chrétiens.

Puisse son questionnement nous inviter à une salutaire réflexion !



DECOUVERTES… pendant le confinement !

            Le temps du confinement nous a permis de réfléchir au fonctionnement de notre monde, et de se poser les questions sur notre manière de produire,  d’acheter et vendre, de consommer… espérons que toute cette réflexion produira de bons fruits pour un avenir meilleur, pour chaque personne humaine, et pour la planète elle-même ! Espérons que cette crise nous « servira de leçon de vie » !  Espérons-le !!!

         Et en Eglise ? Nous avons vécu aussi des expériences vraiment particulières… inouïes dans notre imaginaire de chrétien, impensables il y a quelques mois seulement avec nos projets pastoraux bien programmés !  Quelles leçons allons-nous en tirer ?


            Leçon N° 1 : Nous avons été privés d’eucharisties régulières, en semaine ou le dimanche.  Mais nous n’avons pas été privés de la Parole de Dieu. Au contraire, nous avons été invités à la lire sur les réseaux sociaux, ou à l’entendre à la radio ou à la télé.  Nous avons redécouvert toute son importance. Cette Parole a été nourriture pour notre foi. Et certains ont même organisé des groupes de paroles sur les réseaux sociaux, pour partager leur avis et leur réflexion ! FORMIDABLE !

            QUESTION N° 1 : A une époque où il faut sans doute imaginer des liturgies de la Parole, de manière plus régulière….et si l’expérience vécue pendant cette crise était une chance pour développer nos capacités pour les programmer, les organiser, les animer ?



Leçon N° 2 :   Nous avons été privés de communion réelle, mais nous n’avons pas été privés de prières…et cela nous a permis d’inventer ! Nous avons pris le temps de nous poser, d’aménager pour cela, un coin de notre chambre ou notre maison.  On nous a dit que nous faisions alors une « communion spirituelle ». Le Jeudi saint, ou le samedi saint, certains ont même posé des objets symboliques, fait des démarches pour donner du sens à ces célébrations. Ils sont devenus  ACTEURS et non pas simples  spectateurs devant un écran de télé. FORMIDABLE !

QUESTION N° 2 : Dans des bâtiments d’église, (tous disposés de la même manière !) nous nous installons pour « assister » à la messe, comme à un « spectacle »….  Et si l’expérience vécue pendant cette crise était une chance pour  être inventifs,  être plus participatifs dans les célébrations  à venir ?


Leçon N° 3 :  En  passant notre matinée du dimanche matin devant  la chaine « France 2 », nous avons découvert des courants religieux (comme le Bouddhisme), d’autres religions  qui croient –comme nous- au Dieu unique (Le Judaïsme, l’Islam) , d’autres religions chrétiennes qui professent –comme nous- le même Jésus-Christ Mort et Ressuscité (Orthodoxes, protestants réformés, Evangélistes, Anglicans …). Nous avons  appris beaucoup de choses en les écoutant.  Certains jours même, nous avons vraiment prié, de bon cœur, avec eux, en appréciant leur liturgie.  FORMIDABLE !

QUESTION N° 3 : Même s’ils ne sont pas très nombreux, ils existent près de nous (surtout grâce à la migration) ces hommes et ces femmes qui vivent leur Foi avec une autre religion que le catholicisme. ….Et si l’expérience vécue pendant cette crise était une chance pour mieux les rencontrer, et les connaitre, mieux les respecter, et les aimer ? …. Et pourquoi  pas, former avec eux, un groupe inter-religieux ?


Leçon N° 4 :  Le jeudi saint, nous avons célébré la « fête de l’eucharistie » sans nous rassembler, et sans célébrer réellement la messe ! Un « exploit » diraient certains ! « un non-sens » disent d’autres !
Le fait est là ! Ce qui est remarquable, c’est que celles et ceux qui voulaient vraiment célébrer ce jeudi saint, ont pris du temps pour cela ; ils ont posé des gestes (avec la bougie, le pain, le vin, le tablier ou l’outil du service…) pour vivre vraiment cette liturgie en communion avec les autres, en communion avec toute l’Eglise,…. Et cela,  sans mettre de distinction de hiérarchie, sans faire de séparation (par l’habit ou l’emplacement)  entre les clercs -prêtres et diacres-  et les laïcs.   Tous réunis avec le Christ (par-delà les distances) au nom de notre baptême = Eglise, Peuple de Dieu !         FORMIDABLE !

QUESTION N° 4 :    Nous avons vécu alors UNE MEME CELEBRATION en étant tous, des célébrants…ce qui devrait être le cas dans toute célébration ! Et si l’expérience vécue pendant cette crise était une chance pour oser organiser des communautés chrétiennes de base, avec des responsables  nommés et reconnus (certes), mais sans présence obligatoire de ministres ordonnés ?



            Leçon N° 5 : Tous les rendez-vous avec la communauté chrétienne (pour messes, sépultures, baptêmes, mariages, première communion) ont été annulés ou repoussés….mais les rendez-vous avec le Christ ont toujours été au programme et ont été possibles. Cette expérience nous rappelle que notre religion chrétienne n’est pas l’adhésion à une idéologie, une manière de pensée, ou à un Livre, mais l’adhésion à une Personne qui nous invite à le suivre sur son chemin du Don par Amour. FORMIDABLE !

            QUESTION  N°5 : Vivons-nous notre religion comme une relation ? Relation personnelle avec le Christ, relation engageante avec et pour les autres (en priorité les pauvres et les petits) ? ….  Et si l’expérience vécue pendant cette crise était une chance pour développer
-          cette relation réelle en prenant du temps personnellement, par l’écriture ou l’expression orale de prières ?
-          cette relation vitale en prenant du temps avec d’autres, dans des équipes de croyants  ou de « chercheurs de sens »,  pour un partage de vie et de Foi ?



Leçon N° 6 : Tous nos efforts pour « garder une certaine dynamique chrétienne de notre vie », ont consisté à assurer des temps de prières et à regarder des célébrations diverses à la télévision ou par internet. Chacun y a été de son expérience médiatique (plus ou moins heureuse !) et nous avons pu remarquer que ces liturgies étaient  parfois colorées d’un « certain classicisme » (avec beaucoup « d’hommes à chapeau pointu » et beaucoup d’habits et rites liturgiques…..quand ce n’était pas « d’un certain rigorisme proche de traditionalisme ». Si cela nous a  rendus insatisfaits et, peut-être, fait réagir intérieurement, c’est FORMIDABLE !

QUESTION  N°6 : Car,  ne faut-il pas se poser aussi une question plus fondamentale : A quoi tient notre vécu ecclésial et paroissial ?  Seulement à des célébrations (si belles ou si émouvantes soient-elles) ? Ou aussi à notre engagement dans la société auprès des plus déshérités, oubliés, abimés par la vie ? Méditons le chapitre 25 de St Matthieu (jugement dernier), et demandons-nous : et si l’expérience vécue pendant cette crise, (avec tous ces gestes de solidarité  reconnus par tous) était une chance pour que nos paroisses  ne regardent pas seulement leur fonctionnement liturgique,  ne s’intéressent pas d’abord et/ou seulement aux organisations sacramentelles… mais deviennent de vrais lieux missionnaires pour annoncer au monde –par des engagements concrets- la Bonne Nouvelle de  L’Amour de Dieu ?  Ensemble, Déconfinons nos communautés chrétiennes !
                                              Idées farfelues émises par Bernard ROBERT
(qui ne veut surtout pas être « un donneur de leçons ! »)