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...Alors, en réponse à vos attentes, Olivier Gaignet vous propose de vous exprimer librement.
Ici, tout pourra être dit dans les limites de la courtoisie et du respect mutuel.

Merci d'avance de votre participation.


Depuis novembre 2007, Olivier Gaignet partage sur son blog ses réflexions sur Dieu et sur l’Eglise. bien sûr,
mais aussi sur la marche du monde. Il nous invite à réfléchir à des thèmes aussi essentiels que : notre société, les autres religions,
la télé, la politique, l’art, sans oublier ses propres paroissiens.
Les billets des cinq premières années (de novembre 2007 à septembre 2012 )ne figurent plus sur ce blog. Pour les consulter, se référer aux cinq volumes intitulés: "Ma paroisse.com", que vous pouvez vous procurer en envoyant un mail à : olivier.gaignet@yahoo.fr



mercredi 18 novembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2505 : Vu du Mali : "Sans la Fraternité, la liberté s'affaiblit !" (pape François)

 La Fraternité

Un 14 juillet, vous êtes bien d'accord que c'est le jour par excellence où l'on doit, non seulement fêter la Fraternité, mais surtout, la vivre ; où l'on se doit de se comporter le plus possible en conformité avec ses idéaux... Eh ben non, ce n'est pas toujours comme cela que ça se passe. Voici ce dont j'ai été témoin lors de mon premier 14 juillet en Afrique, à l'ambassade de France à Bamako.

Le Pére Blanc avec lequel je faisais équipe m'avait dit : "On ira ensemble à la réception à l'ambassade, à  laquelle nous avons été invités. Tu me diras ce que tu en penses." Nous voilà partis. A l'entrée de l'édifice, nous sommes reçus avec plein d'égards. il faut dire que le Père Blanc était en gandoura. Beaux salons, belles tables recouvertes de nappes blanches et de jolies fleurs, avec de belles bouteilles qui nous attendaient, ainsi que plein d'appétissants petits fours.  Pas mal de Blancs présents, des expat en majorité, et quelques Africains, des personnalités locales sans doute.  Discours de l'Ambassadeur, musique de la Marseillaise et hop, on débouche le champagne, qui coule à flots.

Le Père Blanc m'entraîne alors à l'arrière, dans le fond du jardin de l'ambassade ; là, on retrouve un certain nombre de Maliens, discutant gaiement. Il faut dire que, chaque année, et c'est très bien, l'ambassade invite aussi les anciens combattants de la 2° guerre mondiale, qui faisaient partie des "troupes coloniales". Là, changement de décor : pas de belles tables ornées, mais quelques planches, posées sur des tréteaux, assez loin du regard des invités "officiels". Et sur ces tables de préau, des bouteilles de jus de fruit "moyen", et même du vin !!!  Un vin rouge tout ordinaire, à la limite de la piquette ; mais pas de petits fours. Et pour fraterniser avec eux, qui s'étaient battus pour la France et pour laquelle un certain nombre de leurs copains étaient morts 30 ans auparavant, aucun Blanc, sinon nous deux. J'avoue que j'ai eu honte ! Le Père Blanc m'a dit : "Tu vois ?  En Afrique, il y a toujours deux mondes, qui ne trouvent pas le moyen de se rencontrer."  Et il a ajouté : "Tous ces beaux discours, où l'on se gargarise des mots "liberté, égalité, fraternité", tu sais comment on appelle ça en Afrique ?  "Faire du bruit avec sa bouche.

Tandis que je bafouillais encore le bambara, le Père Blanc, qui le parlait parfaitement, ce qu'aucun des Blancs présents n'était capable de faire, tout diplômés, décorés, intelligents (?) qu'ils étaient, lui par contre engagea une conversation animée et joyeuse avec ces anciens combattants, musulmans pour la plupart, heureux de nous voir tous les deux les avoir rejoints, ce qui semblait leur mettre un peu de baume au coeur.

Vous allez me dire qu'aujourd'hui encore, je suis vraiment négatif et pisse-vinaigre, par rapport à la France, à la colonisation, au "beau travail" qui s'est fait en Afrique...  Mais enfin, soyons réalistes. On a trop longtemps mis toutes ces réalités, inconnues en France, sous le tapis, pour nous donner une image plus belle que celle que l'on mérite. Ceci est insupportable, et en contradiction totale avec l'Evangile, avec le message de Jésus, que vient de nous rappeler le pape François à travers sa récente encyclique :

- n° 1  :  "Il invite à un amour qui surmonte les barrières de la géographie et de l'espace."

- n° 4  :   être "libéré de tout désir de suprématie sur les autres"

- n° 8  :   "faire renaître un désir universel d'humanité."

- n° 95 :  "Jésus nous disait : "Tous, vous êtes des frères." (Matthieu 23/8)

- n° 103 : "La fraternité a quelque chose à offrir à la liberté et à l'égalité."

Fin du voyage, au moins pour l'instant. Avec mes excuses auprès de ceux que j'aurais pu blesser. En les invitant à étudier notre histoire au-delà des lieux communs habituellement propagés !

Un souhait de ma part, en terminant ce triptyque "à la sauce malienne" à propos de notre devise nationale : puisse notre pays, la France, retrouver plus de cohérence entre ses idéaux et son action !  Alors, mais alors seulement, elle méritera le beau titre de "pays des lumières", et de "nation des Droits humains" !  Beaux titres qui, dans ce cas, ne seront plus usurpés !

__________

Ce même mercredi, je rajoute deux remarques à ce billet :

-  Bernard Valetes, dans son édito du 6 novembre à "L'Echo de l'Ouest"  :  "Le passé rattrape toujours ceux qui croient pouvoir s'en affranchir."

Corinne Renou-Nativel, dans son article à propos des "gens du voyage" et de Willian Acker, autour du rejet dont ils sont les victimes à travers par exemple leurs aires d'accueil et autres, voir "La Croix" de ce mercredi, page 25 entière : "Le racisme imprègne la majeure partie de la société française." "(...) La France n'a jamais réussi à reconnaître et intégrer la diversité de sa population." (W. Acker)

 

4 commentaires:


Marie-France Dauce a dit…

Cet épisode que tu as vécu Olivier est un symptôme de la difficulté de beaucoup de nos compatriotes à vivre la fraternité.

En Mars 2019, l'AG de l'ACAT (au niveau national) avait pour thème "la fraternité".
Christine LAZERGES* donnait une conférence passionnante dont je vous partage une ou deux phrases essentielles:

-Au sens étymologique, nous sommes tous frères. Frater ne signifie pas "frère ou sœur" par le sang, mais tout membre de l'espèce humaine. Notre ADN commun: l'égale dignité.
-Il y a toujours une réticence: seulement 11% des français sont attachés à la fraternité (connotation chrétienne) dans notre devise. On préfère solidarité.
-La fraternité a été constitutionnalisée le 6 Juillet 2018.

En effet, c'est seulement à cette date, à la suite du procès de Cédric Herrou, et sous la pression des associations que ce principe a été reconnu constitutionnel...
Voilà qui en dit long.

Tu as raison Olivier de bousculer nos certitudes, nos convictions pas toujours étayées... Notre pays s'est fait épingler à plusieurs reprises pour ses violations des droits... même si, ne l'oublions pas, nous sommes loin d'être les pires en la matière. Mais nous avons un devoir de vigilance.



*Professeur de droit à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne, docteur en droit et agrégée de droit privé et sciences criminelles, licenciée ès lettres, présidente de la Commission nationale consultative des droits de l'homme(CNCDH) jusqu'en Novembre 2018… (Source internet)

Unknown a dit…

J'ai lu avec beaucoup d'intérêt ce que vous avez vécu au Mali et rapporté en ce qui concerne la liberté, l'égalité, la fraternité. Ces mauvais traitements aident à mieux comprendre les jeunes des grandes banlieues qui en souffrent encore aujourd'hui. Il ne faut pas avoir de cœur envers ses frères humains pour prendre les autres pour des moins que rien, prendre plaisir à les rabaisser par des actes ou des paroles afin d'enlever toute confiance aux plus faibles, les faire douter dans tout ce qu'ils disent surtout lorsque la voie du mensonge vient appuyer les dires.
Alors, l'égalité peut-elle exister lorsque la liberté est entravée ?
pour moi, la liberté consiste à ne pas posséder l'autre, elle doit au contraire l'enrichir et se rappeler que tout être humain a une valeur sacrée et doit être aimé comme un frère car Dieu est présent dans chaque personne . Malheureusement, la fraternité n'existe que s'il y a une volonté humaine de ne pas se sentir supérieur aux autres, d'aimer.
Je trouve qu'il est difficile de séparer ces trois valeurs Liberté, Egalité, Fraternité ; elles sont liées. Alors, le pardon dans tout cela?
Dieu a beaucoup de travail pour changer le cœur des hommes à condition que l'homme ne fuie pas la remise en question de la réconciliation avec ses frères en humanité mais il faudra beaucoup de temps n'est-ce-pas?

Olivier a dit…

Le commentaire précédent est de Marie, qui a signalé qu'elle avait oublié de signer.
Merci à Marie, pour ses réflexions toujours fort pertinentes et interpellantes.
Merci à toutes celles et ceux qui envoient ainsi des messages toujours forts enrichissants !

Elodie a dit…

Merci pour ce partage Olivier !
Et merci à tous pour vos commentaires qui viennent compléter et enrichir le témoignage d'Olivier.
Il est évident que même sur le pas de nos portes, dans nos rues, dans nos villes ou villages, on voit déjà tant d'inégalités, tant de différences d'accueil et de traitements entre les êtres.
Je ne crois pas que les difficultés liées à l'idée (l'idéal?) de Fraternité soient forcément en lien avec le racisme, la domination ou le pouvoir. Je crois que le racisme et, par exemple, la différence ou l'indifférence, partent d'une profonde ignorance et d'un véritable mépris de l'humain à son égard.

Je me demande comment ces personnes qui étaient en train de fêter le 14 juillet au champagne se sentent et se voient, je veux dire "en eux-mêmes"...
Dans quelles valeurs "en eux" se reconnaissent-ils ?
Que vivent-ils en eux et que voient-ils d'eux-mêmes pour ainsi fermer leurs yeux et leur Coeur sur cette autre part de réalité qui fait pourtant partie de leur histoire et de ce qu'ils sont ?
Je me demande ce que ces personnes voient quand elles se regardent dans un miroir, si elles osent le faire...
Je me demande si le regard qu'elles posent sur elles est élogieux, aimant, reconnaissant, juste et équitable... ou plutôt dédaigneux, grave, éhonté et/ou de mépris.
Je me demande si ces hommes sont en paix avec eux-mêmes...

Bizarrement, je ne me pose pas tant de questions lorsque je place mon regard sur ces anciens combattants maliens ayant fait partie des troupes coloniales qui se contentent finalement de "si peu d'éloges" et de "si peu de reconnaissance".
Cela ne signifie pas bien sûr pour autant qu'ils ne méritent pas des éloges ou de la reconnaissance ; loin de là !

Il ne s'agit peut-être pas de prendre partie pour les uns plutôt que pour les autres bien sûr, ni même de se positionner dans un camp plutôt que dans un autre...
Simplement, peut-être que l'on peut réfléchir à ce que certains hommes font à d'autres hommes et à ce que l'homme se fait aussi à lui-même par la même occasion.
Blancs, Noirs, Maliens, Français, je ne vois là que des hommes et je crois qu'au fond je les aime Tous, sans distinction de rang social, de traitement, de couleurs de peau ou de races, et même, oserais-je dire, sans distinction d'actes.
Je ne vois là que des hommes que j'aime, simplement parce que nous sommes frères, Tous Frères.
Cela peut parfois sembler vertigineux mais je crois que nous sommes toujours autant oppresseurs qu'opprimés.
Tant que nous continuerons de faire des distinctions entre les êtres et que justement nous parlerons de Fraternité en mettant en Lumière tout ce qui ne relève pas (ou moins) de la Fraternité, je me demande parfois si une véritable Fraternité sera possible...

C'est important, bien sûr, de parler de tout cela, de raconter et de témoigner comme tu le fais, Olivier, c'est certain. C'est important et nécessaire.
Mais, de Grâce, essayons de ne juger personne et prions pour Tous.
N'est-ce pas cela, la Fraternité ?
N'est-ce pas cela, l'Egalité ?
Et si la Liberté, c'était simplement de choisir de croire ou de ne pas croire en l'Homme, en ce que nous sommes, et en TOUS les Hommes, quels qu'ils soient ?!
Je n'ai pas la réponse à toutes ces questions que ton billet de ce jour m'amène à me poser mais je pense que ce ne peut être que profitable de s'y aventurer et de s'y pencher un peu !

Je trouve aussi très bien que ce que nous traversons actuellement avec la Covid ne nous fasse pas oublier Tout le reste, ce qui existe comme ce qui a existé.

Alors merci pour l'invitation, Olivier, et merci pour la main tendue.

Sincèrement et amicalement.