Sans remonter plus avant dans l'histoire de notre nation, il n'est pas anodin de rappeler que, malgré les ordres venus de Vichy sous la pression des Allemands, la Corse fut le seul département - pour cette raison, elle fut dénommée "l'Ile des Justes" - dans lequel il n'a été procédé à aucune arrestation ni déportation de juifs, à une exception près ! En Corse, les juifs ont été défendus, protégés, cachés, sauvés ! Serge Klarsfeld a souligné "l'attitude exemplaire de la population corse, au caractère fort. Au-delà de l'élan d'humanité, son sens de l'hospitalité a montré qu'elle était imperméable à la propagande antisémite." L'ensemble de la population s'est élevée contre cette infamie. Il était donc possible que les choses aient pu se passer autrement en France, et pas seulement à travers quelques initiatives individuelles, si belles furent-elles ; mais il n'en n'a pas été ainsi...
Autre fait révélateur : on a tiré sur des enfants juifs, dans une école de Toulouse, en 2012, parce qu'ils étaient juifs. Croyez-vous que les Français se soient mobilisés à cette occasion ? Par contre, en mémoire de ceux qui avaient pondu des caricatures qui n'avaient rien de fraternel par rapport aux musulmans, s'est tenue une manifestation de soutien comme l'on n'en avait jamais vu en France ! Alors que les juifs, oubliés, n'avaient que leurs yeux pour pleurer ! Plus près de nous, les services officiels ont comptabilisé une explosion des actes antisémites de plus de 1000% dans les 3 mois qui ont suivi le 7 octobre ; si bien que beaucoup de juifs disent ne plus se sentir en sécurité dans notre pays !
Quant aux musulmans, dont l'immense majorité souhaite vivre paisiblement en France, beaucoup disent ressentir un "mal-être profond" : contrôles d'identité plus fréquents que pour leurs amis non typés, discriminations multiples, difficulté de vivre sereinement leur religion en France, remarques insidieuses, le fait d'être assimilés aux terroristes et mis dans le même sac qu'eux, épuisement de se sentir toujours montrés du doigt, sans parler des multiples rumeurs...
Si bien que beaucoup disent : "L'idée que cela nous renvoie, c'est qu'on n'est pas à notre place ici. Si tous les jours on est montrés du doigt, c'est que la France, globalement, ne souhaite pas qu'on reste là." Savons-nous que d'après une récente enquête, réalisée à partir de 1000 Français musulmans ayant choisi de quitter notre pays, 71% ont quitté la France "pour moins subir le racisme et la discrimination", 64% pour vivre leur religion sereinement, 41% pour progresser professionnellement ? Tandis que plus de la moitié (54%) disposent d'un niveau master ou plus, autant de têtes pensantes perdues pour notre pays. Et d'après leurs réponses, ils sentent "un poids en moins sur leurs épaules", "avec des personnes habillées de toutes les façons, coiffées de toutes les façons", "dans des milieux beaucoup plus multiculturels qu'en France", comme au Royaume Uni, au Canada ou ailleurs...
Mais comment se fait-il que tant de Français aient de la peine à accepter celui qui diffère de lui, qu'il soit juif, musulman, ou autre ? D'où vient ce manque d'ouverture, qui semble si ancré dans nos crânes, à Paris comme dans les villages les plus reculés de notre pays ? Qu'est-ce que cela dit de notre compréhension de la devise de notre pays ? Avons-nous laissé le diable ronger nos racines chrétiennes fraternelles ? L'Evangile aurait-il été mal prêché chez nous, puisque nombre de catholiques sont mal à l'aise tant avec les juifs qu'avec les musulmans ? Et l'on ose encore croire que la France peut donner des leçons de vivre-ensemble et de démocratie au reste du monde ? Taisons-nous, que diable, et faisons enfin notre examen de conscience ! Puisse l'exemple des Corses, durant les années sombres, éclairer enfin notre pauvre lanterne...
Pour cela, méditons et re-méditons l'Evangile, tout en laissant Saint-Exupéry nous interpeller : "Si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m'enrichis !" (dans "Citadelle")
3 commentaires:
Je n'ai pas besoin de faire de discours pour dire que je suis complètement solidaire de ces idées !!!
Merci
Votre billet m'a fait penser à ce que j'ai vécu au lendemain du 7 janvier 2015. A la sortie de l'école publique où j'allais chercher mes petites filles, une maman voilée, avec qui je parlais parfois, m'a pris dans ses bras et m'a chuchoté : "Camille, si vous saviez comme j'ai peur pour mes enfants !". Je porte de manière visible une petite croix en bois, j'ai appris peu après que son époux était un imam.
Il n'est pas forcément indispensable de s'aimer pour vivre en bonne intelligence ensemble et se respecter. La seule exigence pour que ça marche, c'est qu'il faut obligatoirement de la réciprocité..
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