En mai dernier, alors que je faisais ma retraite annuelle à Moissac dans un monastère de la communauté "Marie Mère de l'Eglise", chez des religieuses apparentées aux Soeurs Dominicaines, la responsable des novices, que j'avais accompagnée quand elle était jeune fille à Fontenay-le-Comte, m'a demandé de témoigner devant ces jeunes novices sur ma vie de prêtre. J'avais alors griffonné quelques notes, très incomplètes, que je vous partage en ce jour anniversaire de mes 55 ans d'ordination...
Le plus dur pour moi, ce furent les deux 1° années : on a tout à découvrir à la fois, tout vous tombe dessus en même temps. Et quand on est le plus jeune prêtre en un endroit, il faut s'occuper à la fois des enfants et des jeunes, lancer des initiatives, soulager la tâche des prêtres plus âgés. Tout en apprenant ce qui concerne le ministère, à à célébrer des baptêmes, des mariages, mais aussi l'accompagnement des malades, des personnes âgées, les sépultures à assurer : 4 sépultures le même jour à Luçon, 3 mariages le même jour, 15 baptêmes à la fois. Diriger une colonie de vacances à Luçon, gérer un cinéma à St Jean de Monts, etc... Et toutes ces 1° années, pas encore de jour de repos pour les prêtres.
Mais, grande richesse, pendant mes 10 premières années, j'ai peu à peu découvert les possibilités d'oeuvrer avec des laïcs ; c'était nouveau ! Surtout grâce à la JOC (Jeunesse Ouvrière Catholique) et l'ACO (Action Catholique Ouvrière). Je me souviens des assemblées JOC à Luçon, auxquelles participaient jusqu'à 80 jeunes... Et la chance que j'ai eu d'être aumônier de la JOC sur la Vendée pendant 5 ans ; avec une équipe de jeunes responsables remarquables, dont deux sont devenus prêtres Roland et Joseph), un autre diacre (Jocelyn), tel autre responsable départemental CFDT (Jacques), un autre permanent national de la JOC (Jean-Louis). Cela m'a fait prendre conscience une fois pour toutes de l'importance du rôle des laïcs dans le Peuple de Dieu, et de la nécessité de lier la vie de tous les jours et l'Evangile.
Puis, je suis parti 9 ans au service du peuple et de l'Eglise du Mali, au milieu des musulmans. Ce qui fait que je n'ai pas du tout la même perception désormais des musulmans, des étrangers ni des migrants, si souvent mal compris en France et accueillis de façon fort peu évangélique trop souvent. L'important alors, c'était de vivre en frère avec toute cette population, dans une région quasi totalement hors des frontières visibles de l'Eglise. Non pas pour faire du prosélytisme et convertir les musulmans, mais pour me convertir avec eux au Dieu vivant.
Ensuite, 6 années de bonheur à Paris, comme responsable du service missionnaire de l'Eglise de France, tout en étant chargé du suivi des prêtres français "Fidei donum" (envoyés en mission pour un temps) en Afrique, Asie, et dans les territoires d'Outre-Mer. Là, j'ai senti battre le coeur de l'Eglise de France, aux dimensions de l'Eglise universelle.
Puis, 18 ans comme curé-doyen, dont 3 années à Montaigu, 10 aux Sables d'Olonne et 5 à Fontenay-le-Comte, dont 3 aussi comme curé de Fontaines, Auzay..., en soutien au prêtre d'alors, Gilbert, période suivie de 5 années à Mortagne-sur-Sèvre, puis 5 années également à Bourgenay-Talmont. Avec à présent, depuis quelques années, la présidence du groupe interreligieux du Pays des Olonnes, et la responsabilité sur le diocèse de Luçon de l'oecuménisme, ainsi que des relations avec les Juifs. Je m'y retrouve très à l'aise.
Pendant toutes ces années, ce qui m'a permis de tenir, c'est l'amitié de tant de personnes, prêtres, religieuses, laïcs, qui m'ont fait confiance, et m'ont appris à aimer les gens, l'humanité, avec le coeur de Dieu. Malheureusement, j'ai été loin d'être parfait ; j'ai sans doute blessé des personnes et déçu beaucoup de gens, sinon Dieu lui-même. Cependant, beaucoup de personnes ont dû prier pour moi car, jamais je ne me suis découragé. Je me suis dit sans cesse : "Seigneur, je ne sais pas ce que j'arriverai à faire, ce que je devrai être, mais je te le confie." Avec cette formule du théologien protestant danois Kierkegaard que je me suis souvent répétée : "Dieu s'occupe bien des affaires de Dieu" !
De toute façon, ce qu'on ne réussit pas à faire, Dieu le complète. Mais, comme le disait la jeune juive assassinée à Auschwitz en 1943, Etty Hillesum, avec foi et courage : "Cher Dieu, je vais essayer de continuer à t'aider encore quelque temps..."
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Voici en partie ce que Etty avait dit alors : "Je vais t'aider, mon Dieu, à te mettre au jour dans les coeurs martyrisés des autres... Tu ne peux pas nous aider, mais c'est à nous de t'aider et de défendre jusqu'au bout la demeure qui t'abrite en nous... La question à se poser n'est pas tant : Qu'est-ce que Dieu va faire de nous ? Mais plutôt : Qu'allons-nous faire de lui ? Laisserons-nous s'éteindre la flamme de la bonté et de l'espérance sous les flots du mal, ou chercherons-nous à la maintenir vivante coûte que coûte ?"
1 commentaires:
Merci pour le partage de ton témoignage, Olivier. C'est toujours riche de voir et comprendre un peu du chemin parcouru par les uns et par les autres. La parole et le partage par la parole sont aussi importants que les actes et l'exemplarité car c'est dans et par la Vie de Tous que Dieu fait Son Oeuvre.
Alors Merci, Olivier, pour tout cela et merci aussi d' "essayer de continuer à (L)'aider encore quelque temps"
Merci pour Lui, merci pour Toi et merci pour Nous !
En union de pensées et de prières amicales et fraternelles.
Au nom du Père, et du Fils et du Saint Esprit !
Amen.
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