Homélie de la Pentecôte, dans le parc de Bourgenay :
La Pentecôte, un sacré coup de vent dans le ciel de Jérusalem ! Ou plutôt, devrais-je dire, un coup de vent sacré ; accompagné d’un bruit énorme, tandis que du feu se répand à profusion, à travers des « langues », au-dessus ce cette foule immense, venant de 17 nations, représentant l’ensemble du monde connu d’alors. En racontant cet événement, Luc, de façon évidente, fait référence à cette scène fondatrice de la foi juive ; rappelez-vous, lorsque Dieu s’est révélé au peuple juif rassemblé au pied du Mt Sinaï, à travers le feu, le tremblement de terre et les éclairs, tandis qu’étaient remis à Moïse les 10 commandements.
La correspondance est forte entre ces deux manifestations divines, et il y a un lien entre les deux situations. Au Sinaï, Dieu fait don à son peuple de la loi, que chez les Juifs, on appelle la Thora ; cette loi qui constitue aujourd’hui encore le socle de notre vie en société, et pas seulement chez les Juifs, à savoir : tu donneras la 1° place au Seigneur ton Dieu, tu ne voleras pas, tu respecteras ton prochain, tu ne tueras pas, etc.
En gros, c’est Dieu qui nous supplie, et non pas nous commande, de l’aimer, de le servir, et de servir notre prochain. Malheureusement, ces commandements, on ne les connaît plus ; mais pire encore, on ne les met plus en pratique ! La preuve, ce qui se passe en Ukraine, les divisions dans les familles, le rejet des personnes en difficulté trop souvent…
Par contre, ce matin, en ce moment même, à la synagogue des Sables, nos frères Juifs commémorent ce cadeau magnifique que Dieu a fait à l’humanité, à travers ces 10 commandements. A cette occasion, ils se rappellent que leurs ancêtres étaient au pied de la montagne avec Moïse. C’est alors en effet qu’a commencé la grande histoire d’amour entre Dieu et l’humanité. N’oublions pas que ce sont là nos racines, et que de cet événement, nous sommes les enfants, les Juifs étant, selon la belle expression de Jean-Paul II, « nos frères aînés", et pour Benoît XVI, « nos Pères dans la foi ».
Avez-vous remarqué que la 1° lecture a commencé par ces mots : « Quand arriva le jour de la Pentecôte » ? Il n’est pas sans signification que le don de l’Esprit-Saint se soit fait le jour même de la Pentecôte juive, alors qu’était célébré, sur la grande place de Jérusalem, le souvenir du don de la Torah.
Tandis que les Hébreux, sortis d’Egypte, étaient des fuyards, terrorisés par le pharaon, les Juifs rassemblés à Jérusalem vivaient eux aussi dans une certaine peur, en tout cas une grande inquiétude, suite au départ de Jésus ; qu’allaient-ils devenir ? Alors, au Sinaï, Dieu a donné aux Hébreux la plénitude de sa loi, pour qu’ils puissent continuer leur marche avec courage au milieu du désert, vers la Terre promise. De la même façon, à Jérusalem, l’étape suivante, c’est la force de son Esprit que Dieu a donné à cette foule issue de 17 nations.
La 3° étape, c'est la nôtre : pour que nous ayons la force de continuer à vivre en témoins de son Amour dans notre monde aride, qui est un désert de foi, un désert d’humanité, un désert de fraternité, Dieu souhaite que nous gardions ses commandements. « Si vous m’aimez, nous disait à l’instant Jésus dans l’Evangile, vous garderez mes commandements. » Et pour que nous puissions garder sa loi et augmenter notre foi, aujourd’hui même, il nous envoie son Esprit.
Mais il est vrai que chez nous, la bataille n’est pas gagnée. J’entendais récemment cette réflexion d’Eric-Emmanuel Schmitt, l’un des écrivains français les plus lus, converti récemment : « En Europe, les intellectuels tolèrent la foi, mais la méprisent. La religion passe pour une résurgence du passé. Croire, c’est rester archaïque ; mais nier Dieu, c’est devenir moderne. » Mais de quelle modernité s’agit-il, quand on sait qu’il y a 30 % des Européens qui sont superstitieux, qui vont consulter des voyants ou des devins, ou croient en n’importe quoi ? Sans Dieu en tout cas, notre monde est comme un avion sans pilote, et il risque de se crasher !
Ceci dit, constatons les faits, mais surtout, ne nous affolons pas : car de même que les Hébreux, dans une mauvaise passe, ont reçu la force des 10 paroles, de même que les pèlerins de passage à Jérusalem ont reçu la force de l’Esprit, un cadeau semblable nous est proposé en ce jour ; tandis que Dieu va à présent graver sa Loi, non plus sur la pierre, mais dans les cœurs des disciples que nous sommes.
Comment cela se
fera-t-il ? Et je termine par là.
Par une parole et un geste tout simples, malheureusement trop peu fréquents
dans nos liturgies, alors qu’ils sont d’une symbolique éclatante ; C’est alors
le moment de « l’épiclèse », un terme un peu étrange qui vient du
grec et signifie : « veiller sur ». A deux reprises, pendant le temps de la
consécration, le prêtre étend les mains, sur les offrandes d’abord, puis sur le
peuple rassemblé, tandis que, par le chant, vous tous, l'ensemble du peuple de Dieu, laïcs, religieuses et prêtre, vous êtes associés à cette prière consécratoire.
Ce n’est donc plus alors le prêtre seul, mais nous tous qui demandons que l’Esprit Saint vienne sanctifier le pain et le vin, et remplir le cœur du peuple des croyants. Faisons nôtre cette prière chantée, que nous reprendrons solennellement au moment de la consécration, à travers ces deux refrains :
Vienne ton Esprit sur ce pain et ce vin !
Vienne ton Esprit sur ton peuple rassemblé !
Amen ! Alléluia !
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire