Homélie de ce dimanche en l'église St Hilaire de Talmont.
Dès l’aube, est-il dit dans l’Evangile, Jésus était en train de donner un enseignement religieux dans le Temple, tout tranquillement. Et sa façon de faire la catéchèse était si intéressante que, comme le précise St Jean, « tout le peuple venait à lui. » Eh bien figurez-vous que, ce qui s’est passé avec Jésus, dans le Temple de Jérusalem, c’est comme si ce matin, un groupe de paroissiens énervés entraient tout à coup dans cette église et venaient placer sous le nez du Seigneur une femme pécheresse de la paroisse, afin de la faire condamner ! Vous imaginez les cris et l’agitation !
Mais Jésus, plutôt que de crier
avec les accusateurs, reste silencieux. Il se baisse, et, apparemment, semble
écrire quelque chose, mais quoi ? sur le sol terreux du Temple. A propos,
c’est la seule fois où l’on voit Jésus écrire dans les évangiles. Mais à quoi
Jésus pense-t-il alors ? Sans doute est-il dérangé par cette irruption
déplacée en ce lieu sacré ? Mais que pense-t-il du péché de cette
femme ? Doit-il lui aussi la condamner ?
Et pourquoi n’a-t-on pas amené également en jugement l’homme avec lequel elle a
péché ? Il est vrai que celui-ci s’est peut-être caché sous l’évier, ou
réfugié dans un placard ?
Pendant ce temps, les accusateurs de la femme, se considérant bien sûr comme de bons croyants, s’impatientent. Ils sont sûrs de leur fait ; ils défendent la loi, la bonne morale, les valeurs de la religion, face à une femme qui a péché. Entre les deux, Jésus se trouve comme assis entre deux chaises. S’il ne condamne pas cette femme adultère, il méprise les commandements de Dieu ; mais s’il confirme qu’elle a péché et qu’elle doit être condamnée, il va tourner le dos à cette miséricorde de Dieu dont il est le messager…
Le grand St Jérôme a fait deux
suggestions : ou bien sur le sol, Jésus a écrit un passage de la Ste
Ecriture sur le pardon de Dieu envers les pécheurs repentants ; ou bien,
quel humour, il aurait inscrit sur le sol la liste des nombreux péchés de ces
accusateurs se pensant « bons croyants ».
C’est alors que fuse cette réponse sans appel : « Que celui d’entre vous qui n’a jamais péché lui jette la première pierre ! » L’art de Jésus, c’est d’avoir invité les accusateurs à prendre conscience de la poutre qu’il y avait dans leur œil, en les invitant à entrer en eux-mêmes et à examiner de plus près leur conscience et leur propre comportement. Mais cela, sans excuser le moins du monde le péché de cette femme ; au contraire, il l’exhorte fortement en lui intimant ceci : « Désormais, ne pèche plus. »
Quelle est pour nous la leçon de cet évangile ? Toujours profondément actuelle ! Combien de fois, dans les différentes paroisses où j’ai vécu, j’ai rencontré de semblables réactions. Lorsque j’étais en service pastoral à Bamako, au Mali, les bénévoles du Secours catholique avaient élu comme président un divorcé ; protestations scandalisées d’un certain nombre de bons chrétiens, alors que cet homme en situation de divorce, et cela pour des raisons que je ne développe pas, était depuis des années profondément engagé dans le soutien des plus défavorisés. Ah, « les valeurs chrétiennes » !
Autre fait : étant sur Paris, j’ai vu une responsable de chorale qui a été écartée quand on a découvert qu’elle était lesbienne. On l’a alors privée de son service !
Ailleurs, en Vendée une maman, très engagée en catéchèse, a été priée de rester chez elle lorsque l’on a découvert qu’elle militait dans un parti de gauche considéré comme anticlérical. Et je pourrais multiplier de tels exemples, et vous aussi sans doute !
C’est aussi le message que le pape François a donné à travers cette fameuse réflexion, en avion, à son retour des JMJ de Rio en juillet 2013, lorsqu’il a dit, en réponse à une question d’un journaliste à propos des homosexuels : « Si une personne est gay et cherche le Seigneur avec bonne volonté, qui suis-je pour la juger ? »
Au sein de l’Eglise aujourd’hui,
beaucoup ont une face de carême, et se condamnent les uns les autres ;
ceci est sans doute l’une des causes de l’effondrement de la chrétienté. Or, si
Jésus n’a pas condamné cette pécheresse, comment pourrions-nous dire que tel
pécheur n’a pas sa place dans notre communauté ?
En tout cas, c’est bien à chacun de nous, pécheur, que Jésus dit : « Va, et ne pèche plus ! »
Amen !
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