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Ici, tout pourra être dit dans les limites de la courtoisie et du respect mutuel.

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Depuis novembre 2007, Olivier Gaignet partage sur son blog ses réflexions sur Dieu et sur l’Eglise. bien sûr,
mais aussi sur la marche du monde. Il nous invite à réfléchir à des thèmes aussi essentiels que : notre société, les autres religions,
la télé, la politique, l’art, sans oublier ses propres paroissiens.
Les billets des cinq premières années (de novembre 2007 à septembre 2012 )ne figurent plus sur ce blog. Pour les consulter, se référer aux cinq volumes intitulés: "Ma paroisse.com", que vous pouvez vous procurer en envoyant un mail à : olivier.gaignet@yahoo.fr



mercredi 16 décembre 2020

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2534 : "La mer, c'est l'inexorable nuit sociale où la pénalité jette ses damnés." (Victor Hugo)

 Avez-vous lu, lundi, dans le "Courrier des lecteurs" ce message terrible intitulé : "La politique migratoire européenne fait honte" ? "Les naufrages se multiplient... On voit l'Europe détourner le regard... Pendant ce temps, tandis que beaucoup se passionnent pour la course du "Vendée Globe", des centaines d'enfants, de femmes et d'hommes périssent noyés dans l'anonymat... Pour la plus grande gloire de l'Europe ?"

Comment chanter paisiblement dans nos églises "Il est né le divin Enfant", la nuit de Noël, dans un tel contexte ? 

Ci-dessous, un texte de Victor Hugo, extrait du chapitre 8 des "Misérables", qui se révèle d'une étonnante et redoutable actualité.


Un homme à la mer ! Qu'importe ! Le navire ne s'arrête pas. Le vent souffle, ce sombre navire-là a une route qu'il est forcé de continuer. Il passe.
L'homme disparaît, puis reparaît, il plonge et remonte à la surface, il appelle, il tend les bras, on ne l'entend pas ; le navire, frissonnant sous l'ouragan, est tout à sa manœuvre, les matelots et les passagers ne voient même plus l'homme submergé ; sa misérable tête n'est qu'un point dans l'énormité des vagues.
Il jette des cris désespérés dans les profondeurs. Quel spectre que cette voile qui s'en va ! Il la regarde, il la regarde frénétiquement. Elle s'éloigne, elle blêmit, elle décroît. Il était là tout à l'heure, il était de l'équipage, il allait et venait sur le pont avec les autres, il avait sa part de respiration et de soleil, il était un vivant. Maintenant, que s'est-il donc passé ? Il a glissé, il est tombé, c'est fini.
Il est dans l'eau monstrueuse. Il n'a plus sous les pieds que de la fuite et de l'écroulement. Les flots déchirés et déchiquetés par le vent l'environnent hideusement, les roulis de l'abîme l'emportent, tous les haillons de l'eau s'agitent autour de sa tête, une populace de vagues crache sur lui, de confuses ouvertures le dévorent à demi ; chaque fois qu'il enfonce, il entrevoit des précipices pleins de nuit ; d'affreuses végétations inconnues le saisissent, lui nouent les pieds, le tirent à elles ; il sent qu'il devient abîme, il fait partie de l'écume, les flots se le jettent de l'un à l'autre, il boit l'amertume, l'océan lâche s'acharne à le noyer, l'énormité joue avec son agonie. Il semble que toute cette eau soit de la haine. 
Il lutte pourtant, il essaie de se défendre, il essaie de se soutenir, il fait effort, il nage. Lui, cette pauvre force tout de suite épuisée, il combat l'inépuisable. 
Où donc est le navire? Là-bas. À peine visible dans les pâles ténèbres de l'horizon.
Les rafales soufflent ; toutes les écumes l'accablent. Il lève les yeux et ne voit que les lividités des nuages. Il assiste, agonisant, à l'immense démence de la mer. Il est supplicié par cette folie. Il entend des bruits étrangers à l'homme qui semblent venir d'au-delà de la terre et d'on ne sait quel dehors effrayant. 
Il y a des oiseaux dans les nuées, de même qu'il y a des anges au-dessus des détresses humaines, mais que peuvent-ils pour lui ? Cela vole, chante et plane, et lui, il râle. 
Il se sent enseveli à la fois par ces deux infinis, l'océan et le ciel; l'un est une tombe, l'autre est un linceul. 
La nuit descend, voilà des heures qu'il nage, ses forces sont à bout ; ce navire, cette chose lointaine où il y avait des hommes, s'est effacé ; il est seul dans le formidable gouffre crépusculaire, il enfonce, il se roidit, il se tord, il sent au-dessous de lui les vagues monstres de l'invisible ; il appelle. 
Il n'y a plus d'hommes. Où est Dieu ? 
Il appelle. Quelqu'un ! Quelqu'un ! Il appelle toujours. Rien à l'horizon. Rien au ciel.Il implore l'étendue, la vague, l'algue, l'écueil ; cela est sourd. Il supplie la tempête ; la tempête imperturbable n'obéit qu'à l'infini. 
Autour de lui, l'obscurité, la brume, la solitude, le tumulte orageux et inconscient, le plissement indéfini des eaux farouches. En lui l'horreur et la fatigue. Sous lui la chute. Pas de point d'appui. Il songe aux aventures ténébreuses du cadavre dans l'ombre illimitée. Le froid sans fond le paralyse. Ses mains se crispent et se ferment, et prennent du néant. Vents, nuées, tourbillons, souilles, étoiles inutiles ! Que faire ? Le désespéré s'abandonne, qui est las prend le parti de mourir, il se laisse faire, il se laisse aller, il lâche prise, et le voilà qui roule à jamais dans les profondeurs lugubres de l'engloutissement. 
O marche implacable des sociétés humaines ! Pertes d'hommes et d'âmes chemin faisant ! 
Océan où tombe tout ce que laisse tomber la loi ! Disparition sinistre du secours ! Ô mort morale! 
La mer, c'est l'inexorable nuit sociale où la pénalité jette ses damnés. La mer, c'est l'immense misère. 
L'âme, à vau-l'eau dans ce gouffre, peut devenir un cadavre. Qui la ressuscitera ?


2 commentaires:


Marie-France Dauce a dit…

Il faut bien le génie du grand Hugo pour nous faire vivre ce long calvaire de l'homme abandonné, en proie à la tempête, et qui lutte contre toute attente, au mépris de toute logique, jusqu'à la fin.

Je revois ces migrants que nous accueillons à Fontenay comme ailleurs, qui ont eu la "chance" eux de s'en sortir, qui taisent souvent par pudeur leur parcours....Non, nous n'avons pas à nous féliciter nous, européens, français, de l'attitude de nos pays devant ce drame qui dure...

Et pour rejoindre un peu le billet d'hier, si Dieu n'existe pas (Dieu...un Esprit supérieur...) peut-on imaginer que les grands savants déjà cités, plus les poètes, les auteurs....ne soient que la rencontre hasardeuse de cellules et de bactéries ? Ainsi que nous bien sûr ?...Difficile à croire ...

Elodie a dit…

C'est vrai que ce partage est poignant.
L'on y ressent tant la détresse humaine, en proie au désarroi, à l'absurdité, au mépris.
L'on y ressent tout autant la grandeur et l'implacabilité des Eléments et de la Vie. La force de Dieu aussi.
Bien sûr que l'on peine à percevoir Dieu dans cette tourmente et dans ces vagues, dans ces houles déchaînées, accaparantes, étouffantes, menaçantes...
L'on peut se demander où est Dieu dans ces moments-là...
Et pourtant, pourtant, Il est bien là.
Lorsque la lutte n'est plus, lorsque tout espoir Humain est englouti, lorsque la folie humaine atteint certaines limites, les mains de Dieu et la présence de Dieu viennent accueillir tous les naufragés de la Vie et des tempêtes, celles et ceux qui sont poussés à entreprendre des traversées si dangereuses.
Qu'est-ce qui pousse ces migrants, par exemple, à prendre de tels risques ?
La guerre et la folie humaine, probablement ; mais aussi l'espoir et l'espérance.
L'espoir d'un à-venir meilleur ailleurs.
L'espoir d'une terre d'accueil, de paix et de repos.
L'espoir d'être considérés, aimés et respectés pour ce qu'ils sont, des frères et soeurs de L'humanité...
Ils sont prêts à risquer leur Vie et celle de leurs femmes, de leurs enfants, dans l'espoir et l'espérance que quelque chose d'autre, plus proche de Dieu, et peut-être moins proche des ombres humaines, existe.
Dieu est bien là, à chaque instant, veillant sur tous ces migrants embarqués et entassés dans des bateaux de fortune. Il est présent auprès d'eux et veille sur eux.
Il est bien là présent aussi dans les profondeurs des océans, pour accueillir et recueillir dans ses mains celles et ceux qui auront une place de premier choix à côté de Lui.
Nous sommes si petits face aux éléments...
Les humains ont parfois peut-être trop cette tendance à se vouloir, coûte que coûte, par bêtise, par orgueil et par ignorance,au-dessus de Tout.
Mais au-dessus de Tout, il y a Dieu, il n'y a pas Nous !
Dieu et Partout !
Dieu est Grand !
Et nous, nous sommes simplement là !
Nous sommes si petits !
Remettons-nous en à ce qui existe de plus Grand que soi !
Prier à l'unisson, se regrouper et partager, s'entraider et se soutenir, cela fait déjà grandir nos coeurs et nos âmes... nous rapprochant chaque jour un peu plus de Dieu.
Au-delà des migrants, au-delà des guerres, au-delà de toutes ces misères, dont il est important d'avoir conscience et qu'il est nécessaire d'aider et d'accompagner, il y a déjà tellement d'âmes à la dérive...
Que pouvons-nous faire dans notre Vie, dans notre entourage aussi, pour faire remonter à la surface de l'eau, plus près du Ciel et de la Lumière de Dieu, ces âmes glissantes et qui petit à petit sombrent jusque dans les profondeurs... les regarder... les reconnaître... les accueillir... les écouter... leur tendre des mains... leur offrir un peu de soutien... de chaleur... partager un repas... leur apporter un peu de lumière et de répit pour leur permettre de respirer un peu et de remonter, tout doucement, à leur rythme, à la surface ; là où l'air est plus léger, la lumière plus douce et l'oxygène plus sain...