Bienvenue !

Vous avez des choses à dire...
Vous vous posez des questions, pour donner un sens à votre vie...
Vous cherchez un espace d'échange convivial pour exprimer ce que vous ressentez...
Vous attendez des réponses à vos questions...


...Alors, en réponse à vos attentes, Olivier Gaignet vous propose de vous exprimer librement.
Ici, tout pourra être dit dans les limites de la courtoisie et du respect mutuel.

Merci d'avance de votre participation.


Depuis novembre 2007, Olivier Gaignet partage sur son blog ses réflexions sur Dieu et sur l’Eglise. bien sûr,
mais aussi sur la marche du monde. Il nous invite à réfléchir à des thèmes aussi essentiels que : notre société, les autres religions,
la télé, la politique, l’art, sans oublier ses propres paroissiens.
Les billets des cinq premières années (de novembre 2007 à septembre 2012 )ne figurent plus sur ce blog. Pour les consulter, se référer aux cinq volumes intitulés: "Ma paroisse.com", que vous pouvez vous procurer en envoyant un mail à : olivier.gaignet@yahoo.fr



mercredi 13 mars 2019

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2262 : "L'Eglise est appelée à renaître" (Mgr Gaillot)


Propos recueillis par Jérôme Cordelier (Le Point)

Le Point : Vous qui avez toujours eu une grande capacité d'indignation, êtes-vous révolté, et de quelle manière, par ce que vous entendez sur l'Église aujourd'hui ?
Jacques Gaillot : Mon regard ne se porte pas habituellement sur l'Église, mais sur le monde de l'exclusion : les sans-abri jetés à la rue, abandonnés. C'est inacceptable ! Quand ils débarquent à Paris, ces hommes, ces femmes, ces enfants n'ont plus qu'un seul bien : leur dignité. Ils s'entassent au bord du périphérique ou sous les ponts. C'est une honte ! Personne, à travers le monde, ne veut des minorités qui sont à la recherche d'une terre et d'un avenir. Voilà ce qui m'indigne, avant tout, aujourd'hui. Pour répondre à votre question, ce que j'entends dire sur l'Église ne me révolte pas. J'ai toujours préféré le sort des individus à celui des institutions, et, en ce moment, je suis du côté des victimes d'abus sexuels. Leurs paroles me touchent profondément. Leurs blessures deviennent les miennes.

Le film de François Ozon sur l'affaire Preynat, un documentaire d'Arte sur des abus sexuels commis par des prêtres sur les religieuses… L'Église est fortement interpellée par la société, en France en particulier. Avez-vous vu ces films ? Comment réagissez-vous ?
J'ai aimé le film de François Ozon, qui est respectueux et plein d'émotions. Comme il est difficile pour la vérité de sortir de l'ombre et venir au jour ! Le secret est tellement enfoui et protégé ! C'est un lourd couvercle à soulever. Les familles concernées se divisent et sont ébranlées. Personne n'en sortira indemne. Mais « la vérité vous rendra libre », dit Jésus. Le documentaire sur les religieuses abusées sexuellement par des prêtres a été un choc. Je me suis senti humilié et indigné devant l'injustice faite à ces religieuses. Comme le disait Victor Hugo : « On fait la charité quand on n'a pas su imposer la justice. » La charité suppose la justice. On l'avait oublié.

Ressentez-vous actuellement une « cathophobie » en France ?
Je ne l'ai pas constaté. Il y a surtout une suspicion sur les prêtres, qui leur cause une grande douleur, même quand ils ne l'expriment pas. J'en souffre avec eux.

L'Église de France est-elle de plus en plus réactionnaire, comme le montre l'historien et sociologue Yann Raison du Cleuziou dans son dernier livre, Une contre-révolution catholique (Seuil) ?
Il y a toujours eu une frange conservatrice dans l'Église de France. Elle est influente et se fait entendre aujourd'hui. Le discours identitaire a le vent en poupe. Affirmons notre foi. Faisons part de nos convictions. On ne peut pas tout accepter. Si l'on fait comme tout le monde, on n'a plus rien à dire. Ce discours identitaire peut être rassurant, mais il ne va pas au cœur de l'Évangile, à savoir la solidarité avec ceux que la société délaisse. « J'étais un étranger et vous m'avez accueilli. » Si l'on vibre à de telles paroles, on peut être sûr de ne pas être comme tout le monde !
 
 La société française est-elle entrée dans une « ère post-chrétienne », comme le souligne le directeur de l'Ifop, Jérôme Fourquet, dans son dernier livre, L'Archipel français (Seuil) ?
Je le crois. Nous avons basculé dans un monde nouveau. Il y a une nouvelle façon pour l'individu d'habiter l'espace et le temps et de vivre sa foi s'il est croyant. L'Église catholique en France est devenue minoritaire, avec un effacement de ses structures et de sa culture. Elle n'est plus une référence. On se passe d'elle. Mais l'Évangile est toujours jeune. Il n'est pas cantonné dans l'institution de l'Église. Il continue sa course, tourné vers l'avenir, hors frontières et hors de tout cadre religieux. Il est vécu en pleine modernité, porté par des femmes et des hommes libres, solidaires des plus démunis.

 Le pape vous avait reçu en tête-à-tête en 2015. Continuez-vous de le soutenir ?
Je suis à fond avec le pape François qui porte le printemps de l'Évangile. Cela ne m'empêche pas de le critiquer quand il a des paroles que je trouve regrettables : ainsi, à propos de son soutien à des évêques pendant son voyage au Chili, de son appréciation sur le « genre », de sa réflexion sur les homosexuels…

En quoi ce pape restera-t-il dans l'histoire ?
Il restera pour moi le pape de l'ouverture, franchissant les frontières en donnant la main aux migrants.

Y a-t-il des moments où il vous déçoit ?
Hélas, oui ! En ce moment, je suis déçu de voir que les réformes de fond se font toujours attendre. Le droit de l'Église reste inchangé. La réforme de la curie romaine n'est toujours pas faite.

Comprenez-vous qu'il déçoive ?
Je m'y résous ! Il est pris sans doute par ces problèmes de pédophilie qui n'en finissent pas ! Il a le souci de l'unité et ne veut pas provoquer de schisme, il est prudent. Mais il en est à la sixième année de son pontificat. C'est maintenant ou jamais qu'il faut agir.

Est-il entravé dans son action par un pouvoir gay omniprésent au Vatican, comme le soutient le journaliste et chercheur Frédéric Martel dans son livre Sodoma ?
Je n'ai pas lu ce livre, mais je me souviens du titre d'un autre, François au milieu des loups. Le pape a des ennemis. Des cardinaux expriment leurs désaccords avec lui. Que François puisse rester un homme libre au Vatican relève de l'exploit ! Mais l'existence d'un « pouvoir gay omniprésent » au Vatican me surprend et me laisse perplexe.

Les réactionnaires sont-ils en train de gagner au sommet de l'Église ?
Je ne l'espère pas. J'attends de la part de François des initiatives qui surprendront. François d'Assise, dont il a pris le nom, fut un réformateur radical de l'Évangile.

L'existence même de l'Église catholique est-elle menacée par la crise actuelle ?
L'Église catholique n'est pas appelée à disparaître, mais à renaître. Les bouleversements qu'elle connaît préparent cette difficile naissance. Les braises du Ressuscité ne sont pas éteintes. La sève de l'Esprit saint continue d'irriguer le peuple de Dieu. Je suis heureux de vivre cette époque qui prépare un printemps à l'Église.

Pourquoi n'y a-t-il plus de voix forte qui porte la parole de l'Église, en France notamment ?
Nous traversons une zone de turbulences. En France, particulièrement. La parole est absente. Quand les Gilets jaunes ont commencé à descendre dans la rue, en novembre dernier, j'aurais aimé qu'une voix de l'Église se fasse entendre pour faire briller la justice, étant donné l'injustice sociale dont nous souffrons tous et les inégalités qui ne cessent de se creuser.

Avez-vous toujours du ressentiment vis-à-vis de cette Église romaine qui vous a écarté ?
Je n'ai jamais eu de ressentiment envers l'Église romaine. Heureusement ! On vit mal quand on a du ressentiment dans son cœur. J'ai souffert d'une blessure d'injustice. Mais l'Église a su m'ouvrir un chemin qui m'était inconnu pour l'Évangile. Je lui en suis reconnaissant.

S'il y avait une décision importante à prendre pour changer l'Église, laquelle serait-elle, de votre point de vue ?
J'ai conscience qu'une décision, si importante soit-elle, ne pourrait pas changer l'Église. Il en faudrait beaucoup… Je me risque cependant à en proposer une. Dans des pays qui en ressentent la nécessité, nous devrions pouvoir appeler des femmes et des hommes d'expérience, mariés ou pas, ayant un travail, pour exercer un ministère dans l'Église. Je n'ai jamais été hostile à des prêtres mariés. Mais pourquoi ne pas commencer par ouvrir cet accès aux femmes ? Ces changements significatifs devraient se faire avec l'accord des communautés et de l'évêque, et pour un temps donné. Il ne s'agirait plus d'attendre des candidats qui se présentent, mais de prendre l'initiative de l'appel en fonction des besoins de l'Église.



0 commentaires: