Je vous communique mon homélie de ce dimanche de la Sainte Famille sur la paroisse.
Ah ! La Sainte Famille, quelle
merveille ! Joseph à l’atelier,
oeuvrant consciencieusement à fabriquer une porte ou façonner une charpente
(Joseph le charpentier), Marie plongée dans la prière tout en préparant le
repas, jetant un coup d’œil de temps en temps à Jésus enfant jouant avec trois
morceaux de planche ramassés dans l’atelier de son père : plus sage que
moi, tu meurs !
Mais, dans tout cela, quoi de
commun avec nos familles d’aujourd’hui, traversées par des ruptures ou
recomposées, mono-parentales ou pacsées ?
Et dans lesquelles, lors des repas de Noël ou du Nouvel an, il vaut
mieux éviter de parler politique ou religion si l’on veut maintenir une
certaine harmonie. En sortant de tels rendez-vous, parfois, l’on peut se
dire : « Ah ! Dans la Sainte Famille, cela devait être plus
simple ; et là au moins, l’on s’entendait bien, et le Christ était présent… »
Dieu merci, la scène décrite dans
l’évangile de ce jour permet de remettre les choses à leur place ! En
effet, ce que l’on définit comme une famille un peu idéale se trouvait pourtant
dans une situation pas très « catholique », si je puis m’exprimer
ainsi ! Voyez Marie et Joseph : dans leur couple, rien ne se passe
comme prévu. Une vierge qui est enceinte avant le mariage, un époux qui n’est
pas le père biologique, Jésus qui fait une fugue, des parents qui vivent
ensemble sans être mariés : difficile à donner comme exemple à des jeunes
couples aujourd’hui !
Mais c’est cela qui est
instructif ! Car, à travers la vie
de ce couple atypique, la Bible, la Parole de Dieu nous aide à comprendre que,
comme l’a dit le pape François, je le cite : « la famille idéale
n’existe pas » ; et l’histoire de la Sainte Famille nous permet de
saisir que la vie de Dieu peut arriver à naître et à grandir même à travers des
situations invraisemblables, sans rapport avec les exigences de la Loi juive
d’alors, pas plus que du Droit Canon aujourd’hui.
Or, trop souvent, nous avons
gommé cet aspect hors norme de la Sainte Famille, pour en faire la famille
idéale, telle que nous la rêvons, en mettant de côté tout ce que cette Sainte
Famille a dû traverser comme épreuves, ou incompréhensions, vu son incroyable
histoire.
Mais le rêve nous poursuit de
redevenir une famille unie et apaisée. D’où la blessure que l’on ressent à
n’être pas la famille rêvée, avec la petite fille qui vient de divorcer, le
frère avec lequel on est fâché suite à une maudite affaire d’héritage, ou ce
fils qui vit désormais avec un copain, ce que l’on n’arrive pas à encaisser.
Justement, la Sainte Famille
a-t-elle quelque chose à nous dire par rapport à tout cela ? Quatre pistes de réflexion :
Premièrement, c’est Maxime Le
Forestier qui chante : «On ne choisit pas ses parents, on ne choisit pas
sa famille. » Croyez-vous que Joseph, ou Marie, avaient choisi la
situation qu’ils ont eu à vivre ? Cependant, ils l’ont assumée. De la même
façon, pour nous, c’est sans doute lorsque l’on accepte que son couple, ou sa
famille, ne soit pas idéal, que l’on se révèle enfin mûr et adulte, quand on
décide, quand on choisit, malgré tout, telle qu’elle est, de l’aimer.
2° piste : Joseph a su
accueillir Marie, malgré sa grossesse surprenante, tandis que Marie lui a fait
confiance, sans trop comprendre ce qui se passait. Ils ont accepté de ne pas
tout comprendre, de ne pas tout commander, comme face à Jésus qui, par sa fugue
au Temple, leur avait échappé. Mais, avec le temps, ils ont construit et fait
grandir leur amour. Et moi, dans ma famille, telle qu’elle est, dans mon couple,
avec mes proches, qui ne sont pas vraiment tels que j’aurais pu l’espérer,
comment est-ce que je contribue à entretenir l’écoute et la bienveillance,
l’acceptation de chacun et sa valorisation ? Plutôt que d’user mon énergie
à me lamenter.
3° piste : Est-ce que le
fils qui est homosexuel, ou la belle-fille, même si elle nous a fait des
crasses, ont toujours leur photo sur le frigo ? Car, vous le savez mieux
que moi, c’est souvent sur le frigo, ou sur les murs de nos salles de séjour,
que nos histoires de famille se racontent, et que l’on peut mesurer la place,
ou l’absence de chacun…
Dernière réflexion : il nous
arrive fréquemment d’être tristes parce que nos enfants ne pratiquent plus, ou
lorsque nos petits-enfants ne sont pas baptisés. Là encore, rappelons-nous
qu’ils ne sont pas pour cela abandonnés de Dieu. J’aime bien cette formule du
pape François disant que les familles, qu’elles soient pratiquantes ou non,
n’en restent pas moins, je le cite, « des usines d’espérance ». Ceci
est une formule à retenir ! C’est-à-dire qu’en elles, malgré nos craintes,
rien n’est jamais perdu. Bien sûr, tant mieux si vos enfants pratiquent
régulièrement et font baptiser leurs propres enfants. Mais si tel n’est pas le
cas, au lieu de vous faire le reproche d’avoir échoué dans votre travail d’éducation,
soyez positifs, et confiez-les au Seigneur par votre prière et votre exemple de
foi. Croyez-vous que Marie et Joseph n’étaient pas inquiets par rapport à
Jésus, qui, entre autres, avait l’air de tout remettre en cause dans la
religion juive de son époque ?
Deux exemples en terminant :
.
lorsque, à l’occasion de leur préparation au mariage, je rencontre des
jeunes couples, dont la plupart ne pratiquent plus du tout, si je leur demande
pourquoi ils veulent se marier à l’église alors qu’ils ne vont pas à la messe,
ils me répondent souvent en faisant référence à la foi de leurs parents ou de
leurs grands-parents, une foi qu’ils admirent, et dont ils ont gardé le
meilleur : peut-être pas la pratique, mais le souci de mettre leur futur
couple dans la main de Dieu, et de vivre en conformité aux valeurs de
l’Evangile. D’ailleurs, on appelle ceux-ci, dans notre jargon
ecclésiastique : « des pratiquants de l’Evangile ».
.
même chose pour les couples non mariés qui font cependant baptiser leurs
enfants ; et cela, parce que pour eux, même s’ils ne viennent pas
régulièrement à l’église, Jésus et l’Evangile restent quelque chose de parlant.
C’est à partir d’exemples tels
que ceux-ci que je rappelais cette formule du pape François disant que la
famille, c’est « une usine d’espérance ».
Une dernière bonne
nouvelle : vendredi matin, une paroissienne était toute heureuse de
m’annoncer que, dans sa famille, où l’on ne s’était jamais retrouvés au complet
depuis des années, des pas avaient été faits, des réconciliations étaient
advenues, si bien qu’au réveillon de Noël, tout le monde était présent.
La Sainte Famille a été une usine
d’espérance ; à chacun de nous de faire en sorte qu’il en soit ainsi,
également, dans chacune des familles où Dieu nous a plantés ! Amen !
Qu’il en soit ainsi !
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire