Ce samedi 17 mai, les députés ont approuvé, par 75 voix contre 41, la création d'un droit à l'aide à mourir. Un vote sur l'ensemble de la proposition de loi est prévu le 27 mai. Cette actualité pressante m'a inspiré le billet de ce jour.
Dans les Ehpad ou les établissements de santé, ou à domicile parfois, il est difficile de ne pas se poser de fortes questions par rapport à la fin de vie ; lorsque l'on voit des personnes qui "traînent" sur des lits, ou enfoncés dans leur fauteuil durant des mois, sinon des années, lourdement handicapées, avec parfois des troubles cognitifs, un cancer, un parkinson, alzheimer ou autres... Quel choc pour les familles, qui se sentent impuissantes et ont tendance à culpabiliser. En outre, les aidant à domicile n'en peuvent plus. Question : comment cela se fait-il que l'on ne meure pas plus tôt ? Si ça dure, c'est quand le moment de débrancher ? Faire mourir et laisser mourir, on n'a pas de réponse à ça ! Et les soignants sont très impactés également.
L'on constate que nombre de ces personnes, plus ou moins âgées ou dépendantes, semblent abandonnées : personne ne vient les voir ; parfois les enfants sont loin, ou ils sont fâchés ; pas de neveux... Pas étonnant que certains de ceux qui ont encore leur esprit réclament une aide à mourir ! J'entendais cette réflexion : "J'aimerais mieux que papa, il meure ; mais on ne va pas le faire mourir !" Il est vrai que, comme l'a fait remarquer le député communiste Yannick Monnet lors du récent débat à la Chambre des députés : "Il ne peut y avoir d'évidence en matière d'aide à mourir !" Le 17 mai, le député insoumis Christophe Bex a publiquement partagé ses "doutes" : "Si les malades sont bien pris en charge, demanderont-ils toujours à mourir ?"
Or, il y a tout un discours qui nous a dit : "Il est interdit de tuer". Alors qu'il s'agit d'abord, d'une façon plus positive, d'être proche de la personne qui souffre. Au-delà des piqûres pour atténuer la souffrance et calmer la douleur, l'objectif est d'abord de rejoindre la personne, de garder le contact avec elle, de lui parler, même si elle semble incapable de communiquer. Passer lentement près d'elle, dire bonjour, caresser le visage, même si apparemment il n'y a pas de réaction. L'idéal, c'est de connaître l'histoire de la personne, savoir ce qui lui plaisait, pour essayer de la rejoindre. J'aime bien ce qu'a dit soeur Mary Barron, la présidente de l'Union internationale des supérieures générales, dans la basilique St Pierre, lors de leur rassemblement le 3 mai : "Nous sommes la caresse de Dieu pour les souffrants."
Dans ce but, il est important de sauvegarder la relation humaine jusqu'au bout, l'amour jusqu'au bout. Souvent, les soignants ont ce souci ; mais ils sont trop peu nombreux, et disposent de peu de temps ; ils sont un peu perdus ! J'ai constaté personnellement que, dans divers établissements, les infirmières n'ont pas toujours des consignes claires leur permettant de savoir comment accompagner les souffrants ; et il faudrait développer et multiplier les possibilités de soins palliatifs dans notre pays ! Cependant, souvent, les soignants échangent et se concertent à propos de l'attitude à avoir par rapport à leurs patients ; d'ailleurs, il n'y a qu'en équipe qu'une telle attention est supportable, afin d'accompagner au mieux les personnes jusqu'au bout, et permettre à chaque personne de se battre pour vivre pleinement, dignement, malgré la souffrance.
Le pape François, proposant une méditation sur la fin de vie lors de l'audience générale du 9 février 2022, disait ceci : "Les anciens doivent être soignés comme un trésor de l'humanité. Ils sont notre sagesse. Il est inhumain d'accélérer la mort des personnes âgées." Un an après, dans le cadre de son voyage à Marseille, le 23 septembre 2023, le pape François insistait : "La fin de vie, ce n'est pas une question religieuse, c'est une question d'humanité."
En effet, sur ce sujet, le clivage entre l'Eglise et les non croyants ne tient plus. Ce ne sont pas seulement les croyants des diverses religions qui se révoltent contre certaines perspectives concernant une aide à mourir, mais nombre de soignants et de personnes elles-mêmes handicapées. L'aide active à mourir soulève dans l'opinion un débat qui dépasse le clivage traditionnel entre conservateurs et progressistes.
Le journal "La Vie" du 15 mai 2025 cite cette déclaration de Jean-Luc Mélenchon, qui a fait de l'euthanasie une cause personnelle : "C'est un droit de se posséder soi-même", déclarait-il en 2022. Ce qui étonne le philosophe d'origine vendéenne, Jacques Ricot : "Il est troublant que des gens qui se réclament du socialisme adoptent la logique ultralibérale, selon laquelle ce que je fais de moi n'a aucune répercussion sur le corps social !"
Outre ces considérations, l'on peut se poser des questions sur la fin de vie interpellant précisément nos Eglises diocésaines et nos communautés religieuses à ce sujet. Il est étonnant qu'en ces temps difficiles, la Pastorale de la santé au niveau diocésain n'appelle pas à une réflexion, tant par rapport aux établissements de santé que sur les maisons de retraite des religieux : Chavagnes, Mormaison, les Brouzils, le Landreau, St Laurent... La loi Léonetti est-elle bien appliquée ? Elle demande que les personnes écrivent leurs dernières volontés concernant la fin de vie en désignant une personne de confiance. Cela est-il une réalité ? Il serait nécessaire qu'une question d'une telle importance fasse l'objet d'un réel suivi, tant dans les divers établissements de santé que ceux qui sont tenus par les diocèses et communautés religieuses. Il en va d'un réel respect dû à nos malades et à nos anciens ! Une présence aimante est essentielle. "Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, vous devez aussi le faire pour eux, car c'est là la loi et les prophètes." (Matthieu 7/12)
Une ultime citation, tirée d'une allocution du pape François en janvier 2020 :
"Je pense tant de bien accompli par les services médicaux dans le domaine des soins palliatifs, où les malades en phase terminale sont accompagnés avec un soutien médical, psychologique et spirituel qualifié, afin qu'ils puissent vivre dans la dignité, réconfortés par la proximité de leurs proches, la phase finale de leur vie terrestre. J'espère que ces centres continueront à être des lieux où la “thérapie de la dignité” est pratiquée avec engagement, nourrissant ainsi l'amour et le respect de la vie. (...) Celui qui, sur le chemin de la vie, a allumé ne serait-ce qu'un flambeau dans les heures d'obscurité d'une personne, n'a pas vécu en vain."
5 commentaires:
En effet c'est une question extrêmement délicate, il me semble que chaque cas est unique et que légiférer n'est pas la bonne solution...cela ouvre une porte...
La loi Claeys-Léonetti, si elle était vraiment appliquée, répondrait peut-être à toutes les problématiques. C'est ce qu'il faut développer, créer beaucoup plus d'unités de soins palliatifs, former le personnel (une vraie gageure en ces temps de pénurie !) pour que chacun soit accompagné comme tu l'as si bien dit Olivier !
D'un point de vue sociétale, budgétaire, la 2ème partie de la loi sur la fin de vie : Euthanasie et suicide assisté, si elle est votée, se fera dans de très mauvaises conditions : surendettement du budget de l'état, manque de personnel soignant. Il suffit comme j'en ai fait l'expérience de se retrouver aux urgences de l'hôpital publique des Sables d'Olonne pour constater la dégradation de notre système médical. Les partisans de la mort dans la "dignité" me font rire : c'est quoi la "dignité", ce nouveau concept bien pratique pour inciter les personnes à demander l'euthanasie, de faire intérioriser aux personnes fragiles "je ne veux pas être une charge pour la famille, la société".
Heureusement que Bayrou a fait séparer la 1ère partie de cette loi sur les soins palliatifs. La majorité des députés voteront cette 1ère partie de la loi, reste encore à la budgétiser. Ce sont les personnes isolées, fragiles qui sont visées par la 2ème loi. Dans les autres pays, on constate une augmentation exponentielle de l'euthanasie.
Chaque cas est délicat, relève de l'intime, il n'y a pas juger des choix des personnes, juste les aimer en silence et en respect, sans jugement; une législation dans ce domaine peut ouvrir à d'autres perspectives inquiétantes.
Olivier Concernant le message du 18 mai je pense que la souffrance de la personne en fin de vie est de ne pas être entourée pas considérée de n'être pas tout simplement aimée Ayant travaillé pendant huit en en soins palliatifs ayant été moi même malade s'il vous plaît un peu de respect de douceur sont les meilleurs lénifiants pour vivre jusqu au bout Aimons nous les uns les autres vraiment et la solution est trouvée pour vivre jusqu'au bout
Moi je me suis battue toute ma vie professionnelle pour accompagner la vie jusqu'au bout ça n'enlève pas toute la souffrance mais ça l'adoucit parce qu'on ne laisse pas la personne seule jusqu'au bot Elle est une personne dans sa dignité d'enfants de Dieu Elle est ma sœur ou mon frère j'ai toujours gardé l'homme debout jusqu'au bout surtout pour ceux qui étaient les plus délaissés Bonne A M
Nous avons eu une célébration du sacrement des malades au cours de la messe dimanche dernier C'était très beau
Quelle chance de belles choses au milieu de toute cette souffrance du monde Ça regonfle les batteries pour nous aider à rester vigilants à tous ceux que nous avons la chance de croiser chaque jour Belle journée
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