Voici le texte des Dix points de Seelisberg proclamés par l’Église catholique, le 5 août 1947.
Ceci est un petit retour historique qu'il n'est pas sans intérêt de rappeler. De quoi s’agissait-il ? C’était la première déclaration pour une révision du christianisme à l’égard du judaïsme, juste après la Shoah. Le texte commençait ainsi : « Nous venons d’assister à une explosion d’antisémitisme qui a conduit à la persécution et à l’extermination de millions de Juifs vivant au milieu des chrétiens… ».
Rappelons les événements. Du 30 juillet au 5 août 1947 eut lieu à Seelisberg, en Suisse, une
conférence internationale extraordinaire du Council of Christians and Jews, pour étudier les causes de l’antisémitisme chrétien et tenter d’y porter remède. Parmi les soixante-dix personnalités venues de dix-sept pays, on comptait vingt-huit Juifs (dont Jules Isaac ; le Grand Rabbin de Roumanie, Alexandre Safran ; le Grand Rabbin adjoint de France, Jacob Kaplan ; l'écrivain Josué Jéhouda, de Genève ; le professeur Selig Brodetzki, président du Conseil représentatif des Juifs d'Angleterre, etc.) ; vingt-trois protestants, neuf catholiques et deux orthodoxes grecs.
Lors de cette conférence, les chrétiens prirent conscience de l’état de l’enseignement chrétien à l’égard des Juifs et du judaïsme. Ils mesurèrent l’étendue de la responsabilité chrétienne dans le génocide hitlérien et comprirent qu’il fallait d’urgence corriger l’enseignement chrétien. Ils élaborèrent dix points, largement inspirés des dix-huit propositions de l’historien Jules Isaac pour éradiquer les préjugés contre les Juifs.
1. Rappeler que c'est le même Dieu vivant qui nous parle à tous, dans l'Ancien comme dans le
Nouveau Testament.
2. Rappeler que Jésus est né d'une Vierge juive, de la race de David et du Peuple d'Israël, et
que Son amour éternel et Son pardon embrassent son propre peuple et le monde entier.
3. Rappeler que les premiers disciples, les Apôtres et les premiers martyrs étaient Juifs.
4. Rappeler que le précepte fondamental du christianisme, celui de l'amour de Dieu et du
prochain, promulgué déjà dans l'Ancien Testament, et confirmé par Jésus, oblige "Chrétiens
et Juifs" dans toutes les relations humaines, sans aucune exception.
5. Éviter de rabaisser le Judaïsme biblique ou post-biblique dans le but d'exalter lechristianisme.
6. Éviter d'user du mot "Juifs" au sens exclusif de "ennemis de Jésus" ou de la locution
"ennemis de Jésus" pour désigner le peuple juif tout entier.
7. Éviter de présenter la Passion de telle manière que l'odieux de la mise à mort de Jésus
retombe sur les Juifs seuls. Ce ne sont pas les Juifs qui en sont responsables, car la Croix, qui
nous sauve tous, révèle que c'est à cause de nos péchés à tous que le Christ est mort.
(Rappeler à tous les parents et éducateurs chrétiens la grave responsabilité qu'ils encourent
du fait de présenter l'Evangile et surtout le récit de la Passion d'une manière simpliste.
En effet, ils risquent par là d'inspirer, qu'ils le veuillent ou non, l'aversion dans la conscience
ou le subconscient de leurs enfants ou auditeurs. Psychologiquement parlant, chez des âmes
simples, mues par un amour ardent et une vive compassion pour le Sauveur crucifié, l'horreur
qu'ils éprouvent tout naturellement envers les persécuteurs de Jésus, tournera facilement en
une haine généralisée des Juifs de tous les temps, y compris ceux d'aujourd'hui.)
8. Éviter de rapporter les malédictions scripturaires et le cri d'une foule excitée : "Que son
sang retombe sur nous et sur nos enfants", sans rappeler que ce cri ne saurait prévaloir
contre la prière infiniment plus puissante de Jésus : "Père, pardonnez-leur, car ils ne savent
pas ce qu'ils font."
9. Éviter d'accréditer l'opinion impie que le peuple juif est réprouvé, maudit, réservé pour une
destinée de souffrances.
10. Éviter de parler des Juifs comme s'ils n'avaient pas été les premiers à être de l'Église.
Ce message avait été rédigé par les membres chrétiens de la Commission. Ces points demeurent valables aujourd'hui ! Et il faut continuer d'avancer dans la réflexion, car l'antisémitisme est toujours vivant malheureusement...
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