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Depuis novembre 2007, Olivier Gaignet partage sur son blog ses réflexions sur Dieu et sur l’Eglise. bien sûr,
mais aussi sur la marche du monde. Il nous invite à réfléchir à des thèmes aussi essentiels que : notre société, les autres religions,
la télé, la politique, l’art, sans oublier ses propres paroissiens.
Les billets des cinq premières années (de novembre 2007 à septembre 2012 )ne figurent plus sur ce blog. Pour les consulter, se référer aux cinq volumes intitulés: "Ma paroisse.com", que vous pouvez vous procurer en envoyant un mail à : olivier.gaignet@yahoo.fr



vendredi 17 juin 2022

Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2749 : La France n'a pas su conquérir le coeur des Maliens !

Très souvent, étant donné que j'ai vécu 9 années au Mali et que je reste toujours en contact avec des amis à Bamako, l'on me demande ce que je pense de ce qui se passe dans ce pays. La vérité va être dure à entendre, mais il faut se rendre à l'évidence : malgré que cette guerre nous a coûté 55 morts, et plus de 10 milliards d'euros de frais divers, sans parler de nombreux chefs djihadistes éliminés, l'échec de la politique française au Mali paraît total.

La France avait cru bien faire en Libye, en chassant Kadhafi, ce qui a conduit les djihadistes à se replier sur le Sahel. De là, on a pensé qu'ils allaient déferler sur Bamako, ce dont d'ailleurs des experts, comme Vincent Hugueux, doutent aujourd'hui. La France a été appelée au secours ; en 2013, l'opération Serval les a bloqués. Mais, comme l'a fait remarquer l'historien militaire Michel Goya, "la grande erreur a été de rester..."  Oui mais, depuis quelque temps, la France n'était plus présente en Afrique, au profit d'autres puissances (Chine, Russie,  Etats du Golfe...). La lutte contre le djihadisme a donc été vue comme une opportunité pour Paris, en 2013, de revenir dans le jeu africain.  Or, la France n'est pas, n'est plus chez elle en Afrique !

Résultats : la France, il est vrai, a empêché les djihadistes de disposer d'un sanctuaire au Sahel ; mais il ne suffit pas de tuer des chefs ; cela n'a pas empêché la présence djihadiste de se développer massivement depuis 9 ans, outre la région du Sahel, dans l'ensemble du pays. Actuellement, ils sont présents quasiment dans les 2/3 du Mali, à l'ouest, au sud ; et la pression qu'ils exercent annonce la menace d'un encerclement progressif de Bamako. 

Entre temps, les djihadistes se sont aussi répandus au Burkina-Faso et au-delà ; ils sont aussi aujourd'hui dans les pays des côtes d'Afrique de l'Ouest, faisant de ces pays la nouvelle ligne de front, loin du Sahel, des groupes djihadistes...Tandis que la présence militaire n'a pu empêcher que, depuis 2015, les violences ont fait plus de 23 500 morts parmi la population civile, dont plus de 10 000 au Mali.  A quoi servira-t-il de dire alors que les problèmes que va subir le pays seront dus au départ regrettable des soldats français ?  Cette analyse serait déplacée !

Nos politiques ont mal analysé la situation : on n'a cherché au Sahel qu'une solution militaire, oubliant en outre, malgré les leçons de l'Afghanistan et ailleurs, que ce n'est pas avec des interventions étrangères que l'on peut régler les problèmes d'un pays. De toute façon, la seule lutte armée ne peut résoudre le problème de l'avancée de l'islamisme radical.  Une piste aurait été de travailler à écouter la population, d'essayer de répondre à leurs besoins de base : eau, assainissement, alimentation (pour les hommes comme pour le bétail), sources d'énergie, éducation, emplois pour les jeunes, collecte des rares eaux de pluie, aménagement de bassins de rétention, etc... Car les vraies raisons du terrorisme sont la pauvreté !

 Mais en réalité, qu'est-ce qu'on a apporté, en termes de santé, de transport et autres ? Il ne suffisait pas de tuer des djihadistes (2 800 en 9 ans) ; il aurait fallu surtout conquérir le coeur des Maliens.  Mais les politiques n'ont pas donné à nos militaires cette essentielle mission... Nos soldats ont fait le travail qu'on leur demandait, c'est tout ; et encore, dans de très mauvaises conditions : ce ne sont pas eux qui sont en cause dans cet échec !  Mais la France n'est pas parvenue à convaincre les Maliens que son action militaire allait améliorer leur quotidien... Et les populations se sont détachées de nous.

Par ailleurs, Paris a soutenu IBK, président du Mali de 2013 à 2020, malgré la corruption du régime et son incapacité à apporter justice, éducation ou santé dans les zones libérées. Et quand une junte militaire a renversé IBK pour prendre le pouvoir, Paris a refusé de la reconnaître, lui parlant avec un ton perçu comme arrogant et néo-colonial. "Le Monde" du 18 février dernier rappelait que le chef de la diplomatie, Jean-Yves Le Drian, a qualifié la junte d'  "illégitime et hors de contrôle", déclarant même en public à leur égard : "Mais quels cons ! Les Maliens n'ont pas apprécié que la France fasse la fine bouche vis-à-vis de la junte, alors que dans le même temps, E. Macron allait à l'intronisation au Tchad du fils du dictateur Idriss Déby, et qu'elle vend sans états d'âme des armes à l'Arabie Séoudite...  Alors que, dans ces deux pays, les droits de l'homme ne sont pas respectés.                                                            

 Fallait-il humilier ainsi le Mali, alors que l'on prend tant de gants pour ne pas humilier la Russie ?  Et je passe sur d'autres réflexions du même jus ! Des propos d'une rare violence.  Paris a multiplié les maladresses. Ainsi que l'a dit alors un diplomate : "Si notre choix était de ne pas partir, il fallait baisser le ton. Il est vrai que le pouvoir malien est illégitime, mais ce n'était sûrement pas le meilleur moyen de discuter avec lui que de le traiter ainsi."  C'est au contraire une forme d'arrogance qui s'est installée !

Voici l'analyse du chercheur Rahmane Idrissa, de l'African Studies Centre de l'université de Leyde aux Pays-Bas : "La France n'a pas su dialoguer avec les opinions publiques sahéliennes.  Elle pense bien faire, mais son erreur est de croire qu'elle comprend mieux le Mali que les Maliens. Or, la compréhension de l'appareil militaire français est souvent daté, limité aux divisions ethniques et à une séparation nord-sud."  Il est dommage que trop de commentaires, tel celui publié en page 9 dans "La Croix-L'Hebdo" de ce 16 juin, ne s'inspirent pas de telles réflexions !

Ma conclusion, je la tire d'un article de "La Croix" du 18 février dernier : "A la suite du 2° coup d'Etat de la junte, le 24 mai 2021, celle-ci a manifesté une plus grande indépendance vis-à-vis de Paris.  Devons-nous nous en étonner ? Et l'annonce, maladroite et précipitée, de la fin de Barkhane il y a un an par E. Macron, a poussé les autorités maliennes à se tourner vers la société privée russe Wagner pour remplacer les Français. Paris multiplie alors des mises en garde qui fouettent l'orgueil des Maliens et aiguisent la détermination du pouvoir de Bamako à pousser vers la sortie des Français devenus bien encombrants."  La leçon, c'est que, si l'on veut soutenir les Etats en difficulté en Afrique, même avec la meilleure bonne volonté du monde, il faut sans doute s'y prendre autrement."

Evidemment, il y a plein d'autres éléments que je n'ai pu apporter, vu le peu d'espace que permet ce genre de billet : il aurait fallu 4 pages !  Mais j'ai voulu donner à voir ce qui arrive quand l'arrogance vis-à-vis d'un Etat étranger se fait trop forte, et lorsque l'on ne fait pas l'effort de comprendre l'espace mental africain !!!


4 commentaires:


Olivier a dit…

Excellent article sur la situation au Sahel page 2 dans le "Ouest-France" de ce mardi 21 juin.
Cela confirme ce que je vous partageais :
- des régions entières contrôlées par les djihadistes
- l'on va dire désormais peut-être que, depuis le départ des soldats français, la situation se dégrade ; mais le journaliste, Patrick Angevin, précise que "la dégradation de la situation avait commencé bien avant le départ de Barkhane".
- "Parce que les problèmes de fond n'ont jamais été réglés."
- Par exemple, "les problèmes structurels très profonds, avec une lutte pour les ressources de la terre. Sur ce terrain, les groupes djihadistes s'implantent..."
Et enfin, "le grand défaut de l'approche française, ... avoir bloqué les initiatives de certains gouvernements pour essayer de trouver des bases de discussion avec les djihadistes, bien implantés, avec des appuis dans les communautés."

TESSIER DENIS a dit…

"La France n'est plus chez elle Afrique " mais les Africains se sentent de plus en plus chez eux en France.
Il me semble urgent que l'occident agisse encore plus pour maintenir ces populations dans leur pays. C'est a dire les aider à vivre dignement et le terrorisme régressera.
Les jeunes Maliens ou Sénégalais ou Magrébins etc.. n'ont qu'une idée fuir vers l'Europe..

Thérèse a dit…

Bonjour Olivier
Blog 2749 : La France n'a pas su conquérir le cœur des Maliens !
Il aurait fallu surtout conquérir le cœur des Maliens.
Mais les politiques n'ont pas donné à nos militaires cette essentielle mission ...
Olivier Tu nous montre un chemin pour conquérir les cœurs.
Dimanche avec le résultat aux élections en France.
Un gouvernement polychrome c'est peut-être la solution. Donner la parole à tous. ☀
Dieu a donné un don personnel à chacun.
Moi j'ai confiance.
Critiquer mais attention ☀️
D'abord bien connaître les informations ☀️
Les comprendre les analyser, par le dialogue.
Merci Olivier d'éclairer, d'aider, à interpréter les informations. ☀

L'article de Ouest France ce mardi 21 juin 2022. Est vraiment bien, Ça confirme ce que tu as écris dans le blog.
Ne pas bloquer les initiatives de chacun. 💫

Olivier a dit…

Voici une réaction d'un de mes frères, qui vit à Sartrouville, à propos de cet article concernant les rapports entre la France et le Mali :


"J'avais fait suivre à Alexandra (sa fille) l'article du journal "L'Echo de l'Ouest" sur le point de vue d'Olivier, qu'elle a envoyé à une copine de fac., Amy, qui fait de la peinture de manière très originale, sur des supports variés.

En fait, je vous parle d'Amy car elle est d'origine Malienne et c'est pourquoi Alexandra a pensé que le texte d'Olivier l'intéresserait.

Elle lui a répondu : "Ah, enfin, quelqu'un donne un point de vue intelligent sur les relations entre la France et le pays de naissance de mes parents !".

Si ça se diffuse dans la très nombreuse communauté d'origine Malienne de la région Parisienne, tu auras eu de très nombreux lecteurs et lectrices, Olivier !