Homélie à St Hilaire la Forêt et au Gué de Velluire
« Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent… » Vraiment, il faut s’appeler Jésus pour oser dire des choses pareilles ! Franchement, c’est tout simplement pas possible. Récemment encore, un bon chrétien me disait : « telle personne m’a humilié, je ne lui pardonnerai jamais ! » Et nous-mêmes, comment vivons-nous cet appel de Jésus à dépasser nos ressentiments ? Quand dans nos familles se vivent des situations de division par exemple, comment régler cela ? Sans parler des oppositions politiques virulentes, dans notre pays, entre partisans et opposants de tel ou tel candidat…
Et pourtant, dans nos églises, cela ne nous gêne pas de chanter «Peuple de lumière », ou « Nous sommes le Corps du Christ », alors que nous pratiquons un amour à géométrie variable ; et c’est cette attitude que Jésus remet en cause : « Si vous vous contentez d’aimer ceux qui vous aiment, nous dit-il, quelle reconnaissance méritez-vous ? Les païens n’en font-ils pas autant ? » La logique humaine en effet, ce n’est pas la logique de Dieu, qui aime et qui pardonne. « Car, entendions-nous à l’instant dans l’évangile, lui, il et bon pour les ingrats et les méchants ! »
Pour y voir plus clair, il nous faut commencer par regarder la façon de faire de Jésus ; et ce que nous découvrons, c’est qu’il ne trie pas les humains, entre ceux qui croient en lui et ceux qui le rejettent. Non seulement il aime celui qui mérite son amour, mais il aime aussi celui ou celle qui ne l’aime pas, et ne l’aimera jamais en retour. Il a embrassé Judas qui l’avait vendu, il a confié au Père ceux qui pourtant l’avaient cloué sur la croix : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font », etc… Relisons l’Evangile, les exemples ne manquent pas !
Finalement, si nous les chrétiens, nous avons tant de peine à aimer nos ennemis, c’est sans doute parce que nous n’avons pas assez contemplé, médité, prié, assimilé le regard de Jésus, l’attitude de Jésus vis-à-vis de l’autre qui ne l’aime pas. Alors que c’est justement l’objectif de la liturgie : par exemple, en nous mettant sous les yeux aujourd’hui l’attitude de David qui, au lieu de tuer Saül son ennemi, renonce à ses sentiments de haine pour faire le choix de la non-violence. Entre nous, si un jour un grand sentiment de vengeance s’empare de votre cœur, lisez et priez ce passage du 1° livre de Samuel, et vous en ressortirez apaisés !
Attention ! Il ne s’agit pas de se forcer à éprouver de la sympathie pour celui qui nous a fait du mal, mais de répondre au mal par le bien. Comme ce monsieur qui m’a dit un jour : « Désormais, j’ai décidé de toujours répondre au mal par le bien. »
Signe magnifique de la présence de l’Esprit au-delà de notre monde catho, je vous partage en terminant quelques réflexions de grands sages de l’humanité, qui peuvent nous inviter à nous situer dans une attitude qui ressemble à celle de Jésus, vis-à-vis de ceux qui ont pu nous faire du mal.
. l’empereur Marc-Aurèle disait par exemple :« C’est le propre de l’homme d’aimer ceux qui l’ont offensé. »
. écoutons aussi Lao-Tseu, fondateur du Taoïsme : « L’homme bon, je le traite avec bonté ; et celui qui n’est pas bon, je le traite aussi avec bonté ; ainsi, j’obtiens la bonté. »
. cette phrase très interpellante aussi de Martin-Luther King : « Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères ; sinon, nous allons mourir tous ensemble comme des idiots. »
. le Dalaï-Lama, quant à lui, nous offre ce conseil : « Remerciez vos ennemis ; ils sont vos plus grands maîtres. Ils vous apprennent à faire face à la souffrance et à développer la patience, la tolérance, la compassion, et cela, sans attendre de retour. »
. tandis que Saint Augustin disait : « Suppose que Dieu veut te remplir de miel, si tu es rempli de vinaigre, où mettras-tu ce miel ? »
Profitons de ce temps d’eucharistie pour laisser Dieu faire le grand remplacement dans notre cœur, en chassant nos mauvais sentiments pour nous remplir du miel de son amour ! Amen !
2 commentaires:
Merci pour cette belle homélie, Olivier, qui nous invite, par le texte de de dimanche, à reconnaître en chacun (y compris soi) la part d'Amour et la part de Dieu qui l'habite.
Y-a t-il plus grande preuve d'Amour, plus grand acte d'Amour que de pardonner et d'aimer sans condition aucune ?
Cela peut sembler parfois inaccessible, loin de nous, réservé à une petite minorité d'Hommes et de Femmes sur Terre, que l'on peut appeler des Saints et des Saintes ; mais ce sont aussi de simples petits gestes, des petits mots ordinaires et bien choisis, des petites pensées sincère, des prières de Coeur, des attentions fraternelles, etc. Qu'y-a-t-il donc de "surhumain" là-dedans.
Aimer son prochain et lui offrir la grâce de Pardon, quoi qu'il fasse ou dise, est-ce si difficile qu'on le pense ?
Il suffit pour cela d'observer nos enfants, nos petits-enfants, de les observer avec tendresse et d'apprendre d'eux, en toute humilité.
Les enfants ont un si grand Coeur. S'ils sont entourés d'Amour Bienveillant et Juste, de parents et d'adultes respectueux, les enfants sont capables de se pardonner entre eux. Combien de fois avons-nous été encouragés à "pardonner à nos ennemis", à nos adversaires ou à nos rivaux lorsque nous jouions dans les cours d'école, les parcs ou jardins ? Parfois même entre frères et soeurs, faisant suite à des chamailleries d'enfants ?
Pardonner à son Frère, bien au-delà du cercle familial, c'est quelque chose que nous savons toutes et tous faire ! Au fond, c'est quelque chose que nous avons toutes et tous déjà pratiqué !
L'important étant désormais de s'interroger sur la façon dont nous pouvons aujourd'hui, en tant qu'adultes, poursuivre ce chemin qui nous est offert depuis que nous sommes nés.
Peut-être qu'en grandissant, les enfants devenus adultes oublient d'où ils viennent et ce qu'ils ont vécu ? Libre à chacun de se rappeler qui il est, l'enfant qu'il était, ce qu'il portait en lui et ce qu'il porte toujours au plus profond de lui, en son sein, en son Coeur dénué de tout, dénué d'expériences "troublantes" ou malencontreuses ayant pu atteindre sa Lumière et sa Paix Profondes.
Enfants, tout cela nous était si naturel.
Devenus adultes, cela peut nous demander un effort de retrouver "notre véritable nature profonde".
Peut-être est-il désormais davantage question d'intention que d'éducation ?
Que souhaitons-nous vraiment vivre, offrir et partager ?
La prière de Saint François d'Assise est une prière très parlante sur ce sujet :
"Seigneur, fais de moi un instrument de ta paix,
Là où est la haine, que je mette l’amour.
Là où est l’offense, que je mette le pardon.
Là où est la discorde, que je mette l’union.
Là où est l’erreur, que je mette la vérité.
Là où est le doute, que je mette la foi.
Là où est le désespoir, que je mette l’espérance.
Là où sont les ténèbres, que je mette la lumière.
Là où est la tristesse, que je mette la joie.
O Seigneur, que je ne cherche pas tant à
être consolé qu’à consoler,
à être compris qu’à comprendre,
à être aimé qu’à aimer."
La répétition du "que je mette" montre bien l'effort et la responsabilité qui nous incombent.
Cela me fait penser également à une citation que l'on attribue souvent au Talmud sur laquelle j'étais tombée à l'âge de 12 ans en jetant un coup d'oeil furtif et intéressé sur le cahier de philosophie de ma grande soeur qui partageait ma chambre. Cette citation m'avait tant interpellée qu'elle était la première d'un petit carnet de citations que j'avais créé que j'emmenais partout avec moi. Cette citation met l'Homme face à ses responsabilités. Quel caractère de nous-mêmes voulons-nous transmettre autour de nous ? Cela m'interpelait beaucoup...
Voici la citation en question :
"Fais attention à tes pensées,
car elles deviendront des paroles.
Fais attention à tes paroles,
car elles deviendront des actes,
Fais attention à tes actes,
car ils deviendront des habitudes.
Fais attention à tes habitudes,
car elles deviendront ton caractère.
Fais attention à ton caractère,
car il est ton destin."
Et si le destin de l'Humanité résidait dans le caractère que nous souhaitons donner à nos habitudes, à nos actes, à nos paroles, à nos pensées... à l'attention aussi que nous portons sur nous-mêmes, sur les autres et sur le monde qui nous entoure...
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