Nombre de catholiques se sentent déstabilisés, frustrés, meurtris même, de ne pouvoir participer, en chair et en os, en ce 5° dimanche de Carême, à une "vraie messe". La messe à la télé, sur YouTube (même avec le pape), sur Rcf, Kto ou encore avec France-Culture le dimanche matin, c'est formidable, et c'est une chance ! Mais, comme l'expriment beaucoup : "ça ne remplace pas !" Pour les plus fidèles à l'eucharistie, il s'agit vraiment là d'une grande souffrance. Avec cette question : comment allons-nous traverser cette tempête, si nous ne sommes pas nourris, boostés par le Pain de Vie ? Il va nous manquer quelque chose, peut-être même l'essentiel...
Alors là, je voudrais apaiser votre crainte. Non pas que je veuille sous estimer l'importance de l'eucharistie, ni celle du rassemblement dominical, si cher au coeur de tant de catholiques. Mais la réalité nous invite à prendre un peu de recul. Excusez-moi si mes mots peuvent vous surprendre, mais il me semble que, parmi les multiples conséquences du tsunami que nous vivons, il y a peut-être à se demander ce que nous avons fait de la messe ???
Attention ! Encore une fois, la messe, j'y crois ! Et, comme beaucoup d'entre vous, je m'y nourris ; chaque jour, je m'y laisse bousculer, construire, envahir par Dieu ; avec mes frères et soeurs catholiques pratiquants.
Ensemble en effet, comme nous le chantons régulièrement, "nous sommes le Corps du Christ...".
Mais, mais, et cela fait bien 20 ou 30 ans, sinon plus, que je me le demande, et je sais que je suis loin d'être seul, avons-nous suffisamment mesuré, étudié, analysé, écouté, compris, ce que signifiait le fait que, d'année en année, de décennie en décennie, nos église se vidaient ? A quoi cela a-t-il servi d'avoir ainsi fermé les yeux sur la désertion massive de nos églises ? Pourquoi tant de couples, tant de jeunes, tant d'enfants - et qui n'étaient pas tous des imbéciles, des personnes de mauvaise volonté ni des fainéants ou sans idéal - ne s'y sont pas reconnus ? Quand ils ne s'en sont pas sentis rejetés, oubliés ou mis de côté ? Et pourtant, nombre d'entre eux croient en Dieu, aiment le Christ... D'ailleurs, eux aussi peuvent être d'excellents "pratiquants" de l'Evangile...
En outre, je pense ici, comme vous sans doute, aux divorcés-remariés, aux homosexuels, méprisés pendant tant d'années ; mais aussi aux handicapés (pas souvent de places réservées pour leurs fauteuils, alors que parfois, par contre, la société en a prévu, mais sur le parking, et à l'extérieur de l'église...). Et les plus démunis, osent-ils venir ? Se sentiraient-ils chez eux ?
Est-ce que ça ne pose pas question que tout ce monde-là soit absent ? Mais alors, il est où, en réalité, le Corps du Christ ?
Comment analyser le fait que, pendant des siècles, on s'est permis d'accuser de "péché mortel" les personnes qui n'étaient pas "pratiquantes" ? Qui d'entre nous aurait un coeur si peu évangélique, et l'esprit assez méchant pour condamner ainsi à mort certains de ses enfants, même très imparfaits ? Que pouvait donc en penser, "là-haut", le Bon Berger ?
J'arrête là mon discours, un peu iconoclaste. Loin de moi pourtant de vouloir casser la baraque ! Cette Eglise, j'en ai besoin moi aussi. Et, comme vous je suppose, j'en souffre d'autant plus ! A titre d'éclairage, voici ce que vient d'écrire le théologien dominicain italien Alberto Ambrosio, co-responsable du séminaire des Bernardins à Paris et professeur de théologie et d'histoire des religions au Luxembourg (voir "La Croix" du 23 mars) :
"On a perdu une partie du peuple, à force de lui faire comprendre que, pour se montrer bon chrétien, il fallait aller à la messe." Et de poursuivre en disant : "Je frappe fort, volontairement, car avec le virus, dans l'Eglise aussi, il y aura une reddition des comptes entre des théologies embourgeoisées, d'apparat, de salon, et d'autres qui vont au centre de l'existence, chrétienne aussi. Le virus amènera, qu'on le veuille ou pas, un retour à l'essentiel, non seulement dans la société civile et politique, mais aussi dans l'Eglise, trop souvent ankylosée dans des doctrines théologico-liturgiques qui ne parlent qu'à une étroite portion du monde."
Quant à l'autre "portion du monde", la plus nombreuse, puisse cette tempête nous ouvrir les yeux sur elle, et sur ce qu'elle attend de nous ! Et si c'était un appel de l'Esprit-Saint pour que notre Eglise catholique s'ouvre enfin à tous ? Et si ce jeûne eucharistique était un temps de désert pour nous aider à réfléchir à "l'après" ? En se demandant si on va alors tout recommencer "comme avant", dans nos messes, comme s'il ne s'était rien passé...
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Sur une question aussi cruciale, vos commentaires seront bien sûr les bienvenus !
dimanche 29 mars 2020
Le Blog de l'Arche de Noé 85, n° 2318 : On a condamné les personnes qui n'allaient pas à la messe !
Publié par
Olivier Gaignet
à
08:40
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8 commentaires:
Dans ce temps de confinement, je ressens plus encore le sens de l'Eucharistie qui me redit l'amour du Christ pour chacun(e)de nous. Un appel à se faire proche de celles et ceux dont on ne parle pas, qu'on ne regarde pas, qu'on n'écoute pas,...C'est le" Service du frère" sous toutes ses formes.
Je souhaite que ce temps amène plus de fraternité dans l'Eglise. Une messe pour tous : accueil chaleureux, homélie actualisée et compréhensive, intentions de prière adaptées à ce qui se vit dans le monde d'aujourd'hui, un envoi qui donne sens à notre vie.
Témoin de la messe télévisée de ce jour !
En effet, la Parole de Dieu commentée par le prêtre, n'empêche pas de faire le lien avec l'actualité. Elle devient plus humaine. Citer des exemples concrets peuvent aider à la compréhension des lectures. Un bel exemple nous en a été donné, ce matin, lors de la messe à la télévision.
Bonjour Olivier
Merci pour ce billet,je partage tes réflexions et tes interpellations. Je vis mon ministère de diacre dans une paroisse qui organise 2 à 3 fois par an ce que nous appelons le "caté dimanche". C'est un moment qui rassemble autour d'un thème de réflexion les enfants à partir de l'éveil à la foi, les jeunes( les parents sont invités) les ados (collégiens, lycéens) et les adultes.De 9 H 30 à 10 H 45 chacun vit un temps de partage adapté aux âges et le rassemblement se termine à 11 H par l'eucharistie. Je constate dans les groupes d'adultes que les pratiquants réguliers ont toujours tendance à vouloir profiter de la présence de jeunes parents (pratiquants occasionnels) pour leur rappeler qu'ils devraient revenir à la messe du dimanche pour rajeunir l'assemblée. Ce réflexe me paraît contre productif, d'autant qu'il ne repose pas sur une réflexion sur les raisons de cette absence et sur la forme de nos eucharisties. Je pense que pour ceux qui se sont éloignés nos eucharisties sont hermétiques, peu fraternelles et que cette génération a besoin d'abord d'être éclairée à partir de la Parole de Dieu. Une Parole qui pourrait être partagée à partir du vécu des personnes, de leurs interrogations.
J'espère que pendant ce jeune eucharistique, l'Esprit Saint va agir et nous pousser à inventer d'autres manières de transmettre la Bonne Nouvelle.
Merci Olivier de continuer à nous secouer fraternellement.
Bonjour Olivier
Heureuse d'avoir un peu de temps pour revenir plus souvent te lire...
Et dans ton billet du jour je retrouve aussi mes préoccupations et celles de beaucoup de mes amis... Que pourrions-nous faire pour donner l'envie de participer à nos célébrations ? J'ai le souvenir d'une période après concile...les années 70...un répertoire de chants joyeux, rythmés, des groupes de jeunes avec leurs instruments de musique, des initiatives d'accueil...et puis peu à peu...ou bien un jour... ce type de chants a été banni, les prières renouvelées (des Notre Père, des Credo) laissées de côté...j'ai commencé à trouver les célébrations plus tristes. Pourquoi les églises américaines avec Gospel sont-elles pleines ?
Les pauvres humains que nous sommes ont aussi besoin de joie (je pense à ton billet sur le rire !!!) Nous aimons les textes, nous aimons l'eucharistie...et nous aimons aussi célébrer la joie d'être là
J'avais écrit un commentaire à propos du rire...quand je l'ai envoyé pffuit....il s'est envolé. J'espère mieux me débrouiller aujourd'hui!
Une ancienne paroissienne de Fontenay Marie-France Dauce
Bonjour Marie-France,
Petit bonheur du matin !
En effet, j'ai plaisir à lire votre commentaire qui reflète bien ce que nous attendons des messes de demain. A chacun(e) de nous d'y prendre part selon nos possibilités !
Je vous connais par votre engagement au sein de l'action des chrétiens pour l'abolition de la torture. Aux Sables, votre soutien nous a aidés à prendre par à ce combat.
Belle journée !
Le soir du vendredi 13, on annonçait que les personnes de plus de 70 ans, ne pouvaient plus aller à la Messe, le dimanche suivant. J’ai essayé de compter combien de personnes pourraient y assister, parmi celles qui viennent régulièrement. Je n’en ai pas trouvé 5… j’ai dû en oublier… mais… Quel échec pour nous !
Ce n’est pas que vous ne vous êtes pas battu pour rendre les célébrations plus vivantes, plus joyeuses où les gens participent…
Pour moi, c’est comme ça que je vois l’avenir ! Michèle Clavier disait : « Tous célébrants ! » Bien sûr, chacun à sa place … Rendre les gens acteurs ! J’ai été à bonne école avec vous et sans peine, on allait dans la même direction. J’y crois toujours et je peux dire que je me bats encore…
Mais il nous faut accepter que nous ne verrons pas beaucoup de changement, peut-être une petite amélioration ! Je ne pense pas que la lettre pastorale de Mgr Jacolin nous aide beaucoup !
Bonjour Denise et merci pour votre petit mot... Oui en effet je me souviens que nous avons été en contact à travers l'ACAT qui reste mon engagement !
je lis le commentaire suivant...d'une ancienne paroissienne comme moi! Je m'étais fait la même réflexion ! Qui restera-t-il si nous, septuagénaires, octogénaires, n'allons plus à la messe !
Nous sommes sur la même longueur d'onde...mais évitons la nostalgie, regardons en avant malgré tout.... Espérance..
Bonjour Olivier
Le mot magique * écouter * tu as trouvé !
Je ressens au fond de moi même une
violence terrible .
Mettre les pieds à l'église de ma paroisse,
c'est impossible, trop c'est trop ; je ne peux
plus adhérer à ce que j'ai vu et entendu :
des valeurs pas reconnues, rejetées
ou mises de côté .
Le corps du Christ ? Où est il ?
Olivier cette Eglise j'en ai besoin,
comme toi, moi aussi .
Ne pas aller à la messe ! J'ai vécu de
longues années dans le confinement
C'était dur parfois . Mais quelqu'un était là pour m'
* écouter * Mille Mercis
Surprise
Je vois maintenant on m'accompagne
avec le confinement .
Prenons soin de nous pour * écouter *
On a tous un don que Dieu nous a donné .
Merci pour le blog c'est précieux .
L'ÉGLISE est là !
Amitié
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