Encore une homélie, allez-vous me dire !
Mais plusieurs m'ayant demandé le texte de mon homélie en la Basilique de St Laurent-sur-Sèvre, lors du récent dimanche de la Ste Famille, le 27 décembre, je me permets de vous présenter ce que j'ai alors essayé d'exprimer.
Je
voudrais profiter du cadre de cette
liturgie de la Sainte Famille pour vous proposer une petite réflexion sur les
grands enjeux de la famille et sur le projet de Dieu par rapport à nos
familles.
Tout
d’abord, la famille qu’est- ce que c’est et à quoi sert-elle ? Le récent
synode nous l’a rappelé, la famille c’est le socle, le terreau où, à travers
les enfants, se construit l’Homme, la Femme de demain. Car la famille, c’est la
cellule de base de la société, ce qui permet à notre société de se construire
harmonieusement.
Cet
été 2015, à Rome, lors d'une audience générale, voici comment le pape François a défini la famille :
« La famille, c’est l’hôpital le plus proche, la première école des
enfants, le groupe de référence éducative pour les jeunes, le lieu de l’amour
pour un homme et une femme, et la meilleure maison de retraite pour les
personnes âgées.» Intéressant non ? Après avoir entendu cela, toute la
place Saint Pierre a applaudi à tout rompre. En outre, la famille, c’est aussi le lieu où l’on
apprend à pardonner, à être solidaire, etc…
Il
est important, en un temps où la famille pourrait sembler ringardisée, ou
dépassée, de lui redonner toutes ses lettres de noblesse. Le pape, les curés et
les bons cathos ne sont pas les seuls à croire en la famille ; dans la
société civile aussi, malgré les apparences, beaucoup croient en elle. François
de Singly
par exemple, l’un des sociologues les plus crédibles de notre pays, a écrit
ceci : « Jamais la famille n’a eu autant d’importance ;
car chacun a besoin de liens familiaux vrais pour l’aider à construire son
identité, et à faire émerger les ressources qu’il possède au plus profond de
lui-même. »
Ceci
dit il ne faut pas être naïf ; on sait bien ce qui se passe dans chacune
de nos maisons ! Le pape lui-même a reconnu qu’il n’existe pas de famille
modèle; je le cite encore : « Bien sûr, ce que l’on vit, n’est pas
l’idéal, ce n’est pas ce qui devrait être, ni ce dont nous rêvons. » Mais
on a tellement sublimé, idéalisé, sacralisé la famille que nombre de nos jeunes,
de nos contemporains, ne s’y retrouvent plus, et, ne s’y retrouvant plus, ne se
marient plus. Car on a fait de la famille un idéal un peu inaccessible.
Alors,
pour y voir plus clair, tournons-nous vers la Bible. Or, dès la première page,
que remarquons-nous ? Dès les origines, le modèle familial connaît ses
premiers ratés. En témoigne la toute première cellule familiale, Adam et Eve et
leurs enfants ; elle fut marquée par le meurtre d’Abel et l’exclusion de
Caïn. En
guise de démarrage, difficile de faire mieux !
Et si l’on déroule
les pages, que découvre-t-on ? Sarah qui pousse son mari Abraham dans les
bras de sa servante Agar pour lui assurer une descendance, Esaü trompé par son
frère Jacob, Joseph vendu par ses frères jaloux.
Et on
continue : Moïse abandonné au bord du Nil, puis se comportant de façon
turbulente avec sa famille adoptive, sans parler de l’adultère de David avec la
femme de l’un de ses généraux, etc… Il y aurait aussi bien d’autres exemples à
citer !
Qu’est-ce que cela
veut dire ? Qu’est-ce que Dieu veut par là nous signifier, dans cette
Histoire, soit disant « sainte » ?
Ce que l’on
constate, c’est que, dans la Bible, les histoires de familles sont pour le
moins compliquées. La famille biblique, n’est pas vraiment un modèle à imiter.
Et toutes ces histoires viennent nous confirmer qu’il n’y a jamais eu d’âge d’or
de la famille.
Et le Nouveau
Testament non plus n’est pas tendre avec la famille ; d’ailleurs au sein
même de la Sainte Famille, les relations ne sont pas simples : l’évangile
de ce dimanche le fait ressentir. Et vous connaissez l’épisode au cours duquel
Jésus renvoie vertement sa mère et ses frères, quand ceux-ci cherchent à
l’empêcher de prêcher.
Ceci dit, à travers
les histoires qu’elle nous rapporte ainsi, la Bible vient résonner avec nos
histoires humaines, avec tout ce qui nous semble bancal dans nos familles. Mais,
ce qui est instructif, dans tous ces écrits bibliques de familles un peu
désordonnées, c’est de voir comment Dieu vient les aider, les éclairer dans
leurs blessures.
Les récits bibliques
n’ont pas pour but de légitimer ces conduites de meurtres, d’incestes, ou
d’adultères, mais ils nous montrent, et je vous donne une clef de lecture,
comment Dieu ne rejette pas les personnes qui ont transgressé ! La Bible
nous montre comment Dieu vient investir ces situations pour permettre à Abraham, à David et autres, de ne pas être écrasés par leurs
déviations ou échecs, mais de repartir et revivre autrement.
La leçon de tout
cela, c’est que tous nos modèles de familles, de la plus ordinaire à la plus recomposée, ou la plus décomposée ou
cassée, tous peuvent bénéficier de la grâce de Dieu, de sa miséricorde, de sa
compréhension en même temps que de son appel à repartir d’un pas nouveau.
En effet, comme dit
le pape François, « si Dieu n’avait pas un regard de bonté par rapport aux
personnes divorcées-remariées, aux mères célibataires, aux enfants nés hors
mariage, aux personnes homosexuelles, il ne serait pas Dieu. »
De la même façon,
tout cardinal, tout prêtre, tout chrétien qui aurait un regard négatif sur ces
personnes, cesserait sur le champ d’être
chrétien.
En cas de
difficultés, n’hésitons pas à rejoindre des groupes de réflexion, des équipes
de foyers, des associations familiales diverses, pour voir avec d’autres comment
avancer.
Dimanche dernier, en
cette Basilique, nous sommes passés par la porte de la Miséricorde. Ce matin, nous
venons d’entendre saint Jean nous dire que, malgré nos imperfections, « nous
sommes appelés enfants de Dieu ». Laissons-nous guider par l’Enfant de
Bethléem, pour qu’il nous aide à gérer notre vie familiale dans sa paix et dans
sa lumière !
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