Quand je pense que, lorsque je me trouvais au Mali, à la mission où je vivais, nous n'avions même pas le téléphone ! Ou plutôt, l'appareil existait, mais il a été en panne 8 ans sur les 9 années que j'ai passées là-bas ! Et à présent, grâce au portable et à internet, l'on peut suivre un coup d'état dans ce pays presque comme si l'on y était. Hier encore, j'avais au téléphone une ancienne connaissance, de religion musulmane, à Bamako. Même si les choses se sont un peu calmées depuis le jeudi 22 mars, date du lancement du putsch par des sous-officiers et des hommes du rang, l'inquiétude demeure. Autour du grand marché de Bamako, beaucoup de boutiques, de magasins ont été pillés. Les jeunes soldats en ont marre en effet d'être envoyés au casse-pipe dans le nord-est du pays, où ils sont soumis à une forte pression du mouvement de libération de cette région, l'Azawad, le berceau de la culture touareg, ainsi que de la part de groupes islamistes liés à Al-Quaïda ; et cela, sans disposer de moyens suffisants pour le combat, ni d'un projet clair de la part du gouvernement qu'ils viennent de renverser.
Pour l'instant, les principaux responsables religieux du Mali sont engagés dans des négociations afin de trouver une solution à la crise politique dérivant de ce coup d'état. Des rencontres, regroupant les responsables catholiques, dont Mgr Jean Zerbo, archevêque de Bamako, protestants et musulmans du pays, ont lieu avec les partis politiques qui sont, dans l'ensemble, opposés à ce coup d'état ; mais aussi, avec ceux qui le soutiennent d'autre part, afin de proposer une porte de sortie à la crise. Les responsables religieux impliqués dans les négociations font partie de ce que l'on appelle, au Mali, "l'Union Sacrée des Leaders religieux". Il est intéressant de constater que ce type d'instance existe, alors que beaucoup, en France, croient encore qu'il est impossible d'avoir, où que ce soit, un vrai dialogue, constructif, pour la paix, avec des musulmans.
Voilà un pays qui, depuis le précédent coup d'état, en 1991, qui avait abouti au renversement d'un général dictateur, avait commencé à prendre goût à la démocratie et à la liberté d'expression ; mais il vient d'être atteint par les ondes de choc de la chute du dictateur libyen. Quand vous devez faire face à une rébellion décidée à vos frontières, qu'est-ce que vous faites ? Si rien ne bouge, cela finit par craquer quelque part ! Et quand tout le monde prend la poudre d'escampette devant une bande de jeunes soldats poussés à bout, cela veut en dire long sur l'état d'esprit d'un pays et, plus largement, de la région ouest en Afrique et de l'ensemble du monde !
Pour l'instant, tout ce que les USA, la France, la Banque Mondiale savent faire, c'est brasser des moulins à vent de paroles et suspendre leur aide économique. On a vraiment un problème, sur cette planète, avec l'accompagnement des peuples, particulièrement les plus défavorisés !
Face à un putsch sans issue, quoi penser ? Quoi faire ? Une réhabilitation du "Politique", au sens le plus large et le plus noble du terme, est vraiment de la plus grande actualité ! De tels enjeux sont-ils présents, compris, désirés, au sein de la campagne électorale en France ? A l'appel de ces soldats, de ces sous-officiers, de ces sans-grade du Mali, la question mérite d'être posée.
mercredi 28 mars 2012
Le Blog du Curé de Fontenay-le-Comte n° 1.405 : La question des sans-grade, au Mali
Publié par
Olivier Gaignet
à
08:10
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